“Navigant entre ses structures astrales et ses rythmes de rock cosmiques progressifs, Hydra réussit à tisser le lien manquant entre ces deux univers”
1 Hydra 15:50 2 Eclipse 10:14 3 Reflections 10:15 4 Outland 14:22 5 Diorama 19:25 SynGate | CD-R AT02
(CDR 70:05) (Progressive Berlin School)
HYDRA débute là où TMA avait abandonné sur Sequentrips. Bien que composé avec Wolfgang Barkowski (Alien Nature), cet album, qui est assez différent du poétique et lunaire Medusa, est une œuvre qui respire beaucoup plus les fragrances des lourds rock cosmiques progressifs de Torsten M. Abel que les poésies astrales d'Alien Nature. La batterie électronique est solide, les riffs de clavier/synthés y sont secs et hachurés et la guitare de Martin Rohleder, présente sur Reflections, quoique discrète, et Outland ajoute encore plus de poids à des titres lourds et puissants qui semblent sortir des sessions de Sequentrips.
L'intro de la pièce-titre est poussée par de lointains vents d'Orion qui soufflent sur des dunes cosmiques, soulevant des poussières cristallines et un nuage d'ions séquencés qui tournoient maladroitement en de cerceaux aux contours édentés. Ces séquences aux tonalités graves tournoient comme un lasso qui manque de vélocité, moulant ses rotations imparfaites à des frappes de percussions qui peinent à ingérer cette étrange structure stroboscopique. Et le rythme prend forme. D'abord incertain, il augmente la cadence avec un bon jeu de percussions dont les frappes symétriques réveillent les ondes enveloppantes d'un synthé malmenées par ces séquences noires qui tournoient en d'imparfaites sphères harmoniques. Entre ses phases échevelées et tranquilles, Hydra prend son assurance rythmique avec d'imposant solos de synthé qui emprisonnent ces séquences dont les cerceaux saccadés sont harponnés par de puissantes percussions, plongeant la pièce-titre dans les toiles d'un puissant space rock progressif. Premier bijou d'ambiances sur HYDRA, Eclipse offre une délicate intro ambiosphérique avec des brises argentées qui flottent dans les échos de percussions étouffées. Le synthé sculpte de superbes solos magiques qui étendent leurs voiles musicales comme des chants de vampires alors qu'un mouvement de séquences trace une ligne rythmique qui tournoie en longs cercles érodés. Et ce synthé est magique! Traçant ses souffles dont les solos épousent ceux d'Adelbert Von Deyen sur Sternzeit, il étend ses harmonies spectrales sur une structure qui secoue sa mélancolie avec des percussions qui battent une mesure rythmique amplifiée par un tournoyant chapelet de séquences. Malgré cette approche rythmique sphérique, Eclipse garde sa noblesse onirique, pointant ses solos cosmiques et torsadés dans une brume dont les amples mouvements morphiques chloroforment une samba électroniques qui ne peut que plier l'échine devant tant de beauté astrale. C'est très mais très beau! Des souffles creux un brin angoissant ouvrent Reflections dont l'intro s'apparente à un voyage cosmique perturbé par une chute de météorites. Une ligne aux séquences zigzagant d'une ivresse néantisée amorce un rythme en spirale avec des ions qui hésitent à danser. Les percussions tombent et les ions sauteurs pilonnent sur place. Ils tracent des mouvements rotatoires aux courbes hachurées alors que les percussions sont plus martelées, plongeant Reflections dans un lourd rock cosmique avec des synthés aux tonalités d'orgues qui sifflent comme sur Eclipse et des riffs d'une guitare discrète qui laisse toute la place à la beauté des synthés.
Après une intro ambiosphérique, le rythme de Outland court avec de fines pulsations dans les strates et solos d'une guitare lunaire. Le rythme est croissant et étreint un deuxième souffle qui est plus nerveux avec des séquences spasmodiques qui tressaillent fiévreusement sous un beau duel guitare/synthés dont les solos ondulatoires caressent une forme rythmique devenue intense. Une autre ligne de séquences pilonne ce galop entêté qui s'abreuve des frappes percussions qui roulent avec tapage et des pulsations qui cognent frénétiquement alors que la guitare de Martin Rohleder fouette cet élan débridé de solos bouclés. Diorama se présente à nos oreilles avec une intro intergalactique à la Jean-Michel Jarre. Les couches de synthé qui roucoulent dans des brises cosmiques sont séduisantes. Elles éveillent doucement une première phase rythmique qui virevolte de son mouvement circulaire sous des riffs de synthé rappelant l'univers harmonique de Tangerine Dream. Ce rythme timide amplifie sa cadence avec une approche spiralée que des frappes de batterie électronique et d'autres séquences aux reflets prismiques emportent jusqu'aux portes des solos de synthé langoureux qui chantonnent dans les brumes d'éther d'un cosmos poétique. À l'aube de ses 10 minutes, Diorama étreint une phase plus lunaire où de violents vents stridents masquent des carillons de poussières musicales qui pleuvent sur des arpèges harmoniques, camouflant un rythme timide qui pulse avec insécurité dans cet oasis cosmique bariolé de percussions aux frappes aussi asymétriques que les errements cosmiques peuvent autoriser. Et peu à peu, Diorama dévie vers sa troisième phase avec une approche plus spasmodique où le rythme reste flou, même si très présent, concrétisant le monde d’ambiguïté qui gravite tout au long de cette longue aquarelle cosmique que sont ses 3 actes.
Navigant entre ses structures astrales et ses rythmes de rock cosmiques progressifs, HYDRA réussit à tisser le lien manquant entre ces deux univers dont les antipodes nourrissent constamment les ambiguïtés. C'est du gros rock cosmique où les percussions ont le dessus sur les séquences et avec juste ce qu'il faut pour ne pas effrayer les puristes qui trouveront leurs comptes dans le très beau Eclipse et l'énigmatique Diorama.
Sylvain Lupari (25/02/13) ***½**
Disponible au SynGate Bandcamp
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