“À la fois envoûtant et mystique, Saphonic est une aventure musicale où le dark ambient côtoie des rythmes de plus en plus incontrôlables”
1 Le Rasoir D'Occam 22:41
2 Metropolis 6:44
3 Interstellar Overload 5:54
4 Lolita's Waveform 4:48
5 Technoff 21:00
MuseaRecords DR8480
(CD 70:57)
(Berlin School Vintage)
Avant Wizard, Awenson avait une vie. Il a débuté avec Shadows (Awen) en 2005. SAPHONIC est son 2ième album. Un album étrange où le rythme croît paisiblement avant d'exploser littéralement avec l'impétueux et dynamique Technoff. Et déjà on sent toute la passion qui anime Awenson pour la MÉ aux mouvements libres et aléatoires qui flottent ou sautent sauvagement dans une atmosphère très cosmique. En SAPHONIC, on comprend vite toute la dimension de Joël Bernard qui nous offrira quelque 3 ans plus tard son petit chef d'œuvre; Wizard.
Une lente onde cosmique ondoie et multiplie une série de vagues qui roulent dans un cosmos étoilé. Le Rasoir D'Occam est un long mouvement quasi inerte où le rythme stationnaire est mû par des modulations morphiques qui sont parfois lourdes et parfois discrètes. Un long titre ambiant inspiré des premières œuvres de Klaus Schulze avec un synthé aux ondes ocrées et métalliques qui déplace ses couches flottantes dans un univers empreint d'une certaine mélancolie. De fines oscillations plus harmonieuses défilent derrière cette muraille musicale, façonnant ainsi un étrange paradoxe entre le silence des astres et le chant des étoiles, où des souffles d'ombres déferlent comme des soupirs nostalgiques pour finalement embrasser les accords limpides dont la résonnance épouse les réverbérations des ondes afin d'étendre leurs gémissements métalliques. S'ensuit une étrange danse abstraite avec le cercle des arpèges limpides qui entrecroise d'autres accords hésitant, offrant à Le Rasoir D'Occam une finale où l'harmonie défie la noirceur cosmique. Titre à la fois fascinant et macabre, Metropolis avance à coups de couches d'orgues qui marchent sur une sinueuse onde résonnante. Un synthé mélodieux émerge de cette marche de la mort lente et violonne une fine sérénade qui s'étend jusqu'aux frontières de l'irréel, là où pulsations et nappes pulsatives font dévier l'aubade aux portes de la cacophonie. Mais il ne s'agit que d'un bref désordre musical, car un beau mouvement du séquenceur se dessine avec des accords sautillant. Ils ceinturent le mouvement où un vent de métal souffle tout juste derrière pour éteindre un peu trop rapidement ce titre captivant. Façonné dans le même moule, Interstellar Overload débute avec un lourd mouvement linéaire où les battements de synthé pulsent avec une fébrilité croissante dans un univers sonore éclaté d'une sombre implosion. C'est une course contre la musique où les pulsations sont plus consistantes et tracent une fébrile ondulation qui s'évente dans des souffles et battements d'un univers cosmique devenu corrosif. Par la suite de fins arpèges cristallins scintillent et dansent dans cet univers en suspension, sculptant un mouvement séquentiel qui continue sa route minimaliste dans le ventre d'un synthé aux modulations pulsatives et aux lourdes couches ténébreuses dont les modulations caustiques de même que les délicieux solos nasillards et torsadés trahissent la passion d'Awenson pour Klaus Schulze.
Lolita's Waveform offre une langoureuse structure rythmique avec un déhanchement séquentiel qui se dandine comme un cowboy solitaire chevauchant les plaines cosmiques. C'est une belle ballade structurée sur le ballant d'une basse qui se dandine comme un mouvement séquentiel minimalisme où les solos de synthé circulent parmi des effets sonores analogues aux effluves cosmiques. Technoff débute avec de fines pulsations qui virevoltent en tous sens. Une cymbale appui le mouvement, suivi d'un bass-drum qui martèle une lourde et insistante pulsation alors que des nappes de synthé papillonnent avec fébrilité. Technoff suit une tangente démoniaque avec ses percussions débridées qui martèlent un rythme hyper nerveux à l'ombre de mugissements rauques d'un synthé créatif, sinon attentif au développement du second plus long titre de SAPHONIC. Un synthé qui libère des solos sauvages et torsadés dans une débauche rythmique rarement entendue dans un titre de MÉ avec un beat endiablé qui épouse à merveille ce lourd techno progressif. C'est de la MÉ de style Berlin School vitaminée d'un foudroyant rythme infernal où les lignes de synthé s'entrecroisent tout en échappant des sonorités glauques et des fracas aux échos bruyants. Des spirales aux résonnances agressives circulent dans cet amas de sonorités électronique qui continue à accroître sa morsure rythmique avec de superbes permutations dans ses tonalités. Une pièce de titan qui se termine dans le calme et dans la sérénité sous les ondes valsantes d'un synthé romanesque qui échappe des bribes étoilées, forgeant ces si beaux couchés musicaux électroniques.
À la fois envoûtant et mystique avec ses sombres couches d'un synthé très métallisé, SAPHONIC est une périlleuse aventure musicale où l'ambiant ténébreux côtoie des rythmes qui deviennent de plus en plus incontrôlables. Je dirais que c'est un album intense et puissant à cause de la forte présence d'une mélancolie terrée derrière de somptueuses et mystérieuses couches d'un synthé mordant et ardent. En fait, nous entendons à travers SAPHONIC les premiers vestiges de Wizard et les fortes influences de KS sur le synthésiste Français.
Sylvain Lupari (27/04/11) ***½**
Disponible chez Groove nl
Comments