“4 Stories a juste ce qu'il faut pour éveiller la curiosité et enflammer l'amour de la MÉ”
1 Gradient 17:37
2 Sepia 17:04
3 Polyaural 17:10
4 Ultra 16:31
(DDL 58:58)
(Indie Electronica Berlin School)
C'est durant ce dernier été que Steve Baltes et Stefan Erbe se sont produit en streaming pour LSB Cologne. Et autant le dire tout de go, ce FOUR STORIES n'a pas été conçu dans la facilité, contrairement à son prédécesseur A-11! Dans des ambiances hypothéquant lourdement les ouvertures, comme les finales, le duo Baltes & Erbe sort de sa zone de confort pour flirter avec une approche plus industrielle qui enveloppe les 4 structures de cet album. Deux de ces structures, Sepia et Ultra appartiennent au premier album du duo, S-thetic². Alors que les deux autres sont soutirés de l'album Electric Garden. Sauf pour Ultra, chaque titre repose sur des introductions et des finales plus approfondies. Ossatures rhythmiques similaires? Pas vraiment! Comme les intros, les structures de rythmes sont plus approfondies avec un décor tonal amplifié par cette vision industrielle qui est plus présente ici que dans les albums précités. Les rythmes fusionnent entre l'Électronica et la Berlin School et sont entourés d'une pléiade de bruits industriels aussi métalliques qu'hétéroclites et même parfois ectoplasmiques. Le duo dont la synergie est toujours au sommet de ses capacités nous en met plein les oreilles avec un flair très avant-gardiste en ce qui a trait aux énormes possibilités d'une musique électronique industrielle.
L'introduction de Gradient sert à ajuster les instruments et réchauffer les ambiances avec un bourdonnement sourd qui échappe de délicats filaments écarlates, des bruits percussifs et une ligne de piano songeant à sa mélodie. Les orchestrations s'invitent de même que des gouttes d'eau solidifiées dans l'art industriel. Nous sentons l'intensité mordre graduellement cette ouverture ambiante processionnelle qui laisse filer une première structure de rythme après la 7ième minute. Des percussions métalliques sautent sur sa membrane ambiante, mordant à pleines dents le discret mouvement spasmodique du séquenceur. Une minute plus tard, les percussions harponnent la structure de Gradient de concert avec une bonne ligne de basse pulsatrice. Le rythme qui en sort est un savoureux downtempo avec des nappes orchestrales et des effets percussifs métalliques. De minute en minute, le titre affiche sa constance au niveau de l'intensité des émotions qu'il procure en laissant partir une belle ligne de piano mélodieuse qui se fane dans cette férocité qui continue de gruger l'enveloppe de ce titre qui fond dans une lente finale dont la vision atmosphérique est séduite par ce goût de métal expiant ses derniers souffles métallurgiques. L'ouverture de Sepia me fait penser à un gros ballon qui s'évente après avoir consommer les restants d'une usine désaffectée. Tout en sonorité d'un bleu acier et/ou d'un rouge apoplectique, son panorama industriel se met à vivre douloureusement au bord de sa 7ième minute. Le rythme étouffé dans une sphère remplie de poussières d'iode et d'éther fait entendre une série de battements coulant en séquences. Des chants gothiques et industriels ainsi que des murmures mijotent dans le décor, alors qu'on sent le rythme étendre autant sa vigueur que sa capacité à faire évoluer Sepia dans un pattern aussi statique et puissant au niveau sonore que celui de Gradient. Le jeu des percussions, la nappe de basse pulsatrice, des cris semblables à une corne de vuvuzela forgée dans l'acier et des ululements d'une bête mécanique sont des éléments sonores parmi tant d'autres qui remplissent son derniers tiers. Une finale conçue dans une violence à peine carbonisée que ses cendres font renaître une machinerie dont les voix mécaniques restent les derniers maîtres.
La seconde partie de ce concert diffusé en streaming est de loin la plus intéressante. Issu des poussières de la finale de Sepia, Polyaural propose une ouverture d’ambiances plus électroniques que mécanisées. On entend une structure de rythme apparaître quelques 30 secondes après la 3ième minute. Le mouvement séquencé monte et descend comme dans un bon Berlin School propulsé par du matériel de Jean-Michel Jarre. En effet, il ne manque que les baguettes chinoises pour identifier avec authenticité cette structure avec celle que le synthésiste français offrait en Chine en 1981 avec le titre Arpegiateur sur Les Concerts en Chine. Le mouvement reste encore plus séduisant dans cette approche avec des voix ectoplasmiques qui le survolent, de même que des nappes de brume industrielle lorsque non-orchestrale. Tranquillement, Polyaural traverse la barrière du temps pour affronter une tempête électro-magnétique un peu avant la 10ième minute. Une phase alimentée par des effets de percussions s'évaporant à chaque coup dans un nuage métallisé alors que les nappes de synthé philarmoniques coulent en opposition, donnant cette fausse impression de ralentir la cadence. Un très bon titre qui se termine comme tout bon Berlin School! Seul titre à ne pas franchir la barre des 17 minutes, Ultra propose une structure atmosphérique, avec des tonalités plus organiques que métalliques, qui dérive dans les tranquillités du Cosmos. Un piano étend sa délicatesse sous une arche philarmonique où tintent des tiges métalliques qui s'entrechoquent dans les brises des orchestrations. Une ligne de rythme sculpté dans du caoutchouc devient la possession du séquenceur après la 5ième minute. Son va-et-vient enchante un violon tzigane ainsi que le piano tentant d'exorciser les ambiances. Une ligne de basse se prenant pour une voix imite le rythme séquencé, créant un doux murmure douteux sur ce mouvement hypnotique que des échantillonnages et des effets de voix, incluant une cantatrice cosmique, enveloppe d'un linceul irréel. Ces percussions mourant dans un nuage métallisé revienne faire un détour sur ce titre dont la finale se déhanchant jusqu'à mourir devient un souvenir qui se perd dans des nuages mécanisés.
Offert tel quel, sans aucune retouche ni autres effets ajoutés, A FOUR STORIES LIVE SESSION est un album qui navigue entre les différentes phases de la MÉ contemporaine. La première partie est fortement rehaussée par cette approche de psybient industrielle qui recouvre la musique d'un vernissage de particules métalliques. Du plaisir pour les oreilles! La seconde moitié est plus traditionnelle en offrant un Berlin School de qualité avec un léger zest d'audace. Juste ce qu'il faut pour attiser la curiosité et allumer l'amour de la musique électronique. Bref, un très bel album de Steve Baltes & Stefan Erbe offert uniquement en format téléchargement.
Sylvain Lupari (04/10/21) *****
Disponible au BaltesErbe Bandcamp
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