“Peu d'artistes peuvent vraiment faire de la Berlin School comme Bertrand Loreau et avec Lambert Ringlage; où est le silence?”
1 In Search Of Silence Part 1 (41:03) a) Engines of Search 6:25 b) Rain of Stars 5:55 c) Orbital Journey 10:34 d) Space Flight 4:14 e) Arise in the Desert 5:57 f) A World Apart 7:58 2 In Search Of Silence Part 2 (13:30) a) Walking on Dunes of Time 13:30 3 In Search Of Silence Part 3 (16:55) a) Meeting One Self 4:22 b) Introspection 5:52 c) To the Center of the Earth 6:41 Spheric Music | SMCD 6304
(CD 71:28) (Vintage Berlin School)
La MÉ de style Berlin School vintage existe encore. Vous savez ce vieux modèle avec des ambiances aussi cosmiques que méphistophéliques et des rythmes aussi mous que flous qui prennent force et qui forment au travers des murailles de sons des figures en constante évolutions? Eh bien…si bien des artistes réussissent à atteindre ces niveaux, peu peuvent le faire comme Bertrand Loreau. En fait depuis sa toute première réalisation chez Spheric Music en 2012, avec l'album Journey Through the Past, le brillant synthésiste de Nantes étend sa dominance sur le genre avec une telle aisance que chaque album réussit à surpasser le précédent et à surprendre son public. IN SEARCH OF SILENCE ne fera pas bande à part!
Cette 2ième collaboration avec Lambert Ringlage débute avec des vagues astrales qui propulsent des pépiements électroniques. In Search Of Silence Part 1 s'ouvre dans une symphonie de bruits ambiants où erre un bon synthé aux harmonies aussi rompues que l’anarchie des sons qui dominent le territoire de Engines of Search. Les étoiles sifflent et s'effritent alors que des séquences palpitent sans but ni rythme précis et que le synthé sculpte des solos qui s'étirent en bourdonnements comateux. Nous sommes dans une sphère d'expérimentation des sons et de réchauffement des machines lorsque Rain of Stars enchaîne avec un mouvement de séquences qui fait gambader ses ions innocemment sous une densité sonique qui refroidit les cendres de l'Armageddon. Et toujours, les vagues de synthé sont concentriques dans leurs enveloppes cosmiques. Des voix et des poussières de brumes naît le superbe mouvement de Orbital Journey. L'ossature rythmique de Rain of Stars étend son approche minimaliste qui se métamorphose en cabriole à peine plus rapide mais définitivement plus enjouée. Les ambiances sont tissées de brumes cosmiques et de poussières d'étoiles alors que le synthé multiplie des solos qui sonnent comme les complaintes d’un saxophoniste heureux mais toujours nostalgique. Et plus on avance dans In Search Of Silence Part 1 et plus la structure de rythme se métamorphose au gré de la fluidité des doigts agiles qui torturent le séquenceur. Ainsi, Space Flight dévoile un rythme féroce où les ions séquencés bondissent dans les reflets de basse de leurs comparses. Le synthé injecte des solos qui sont plus musicaux et moins solitaires avec une approche sibylline qui nargue le côté mélodieux de ces chants synthétisés. Nous sommes dans le cœur de la MÉ vintage avec des ombres de Tangerine Dream, périodes Phaedra à Sorcerer, qui planent sur des structures de rythme teintées de nébulosité. Arise in the Desert suit avec une structure rythmique plus molle. Ici, le mouvement de séquences déploie de larges boucles avec 5 accords qui roulent et s'amusent avec leurs ombres tandis que les synthés ajustent leurs charmes avec des harmonies célestes. Et les solos sont ravageurs pour ceux qui raffolent, comme moi, des artistes qui n'ont pas oublié les préceptes de la MÉ. Ils flottent comme de superbes chants de rossignols dans un décor lunaire. C'est un peu comme si Jean-Michel Jarre infiltrait les ambiances de TD.
Les bourdonnements résiduels de Arise in the Desert se jettent dans A World Apart. Le synthé revêt encore la peau d'un saxophone avec une approche de Blues alors que des séquences écorchent leurs membranes avec des tons organiques pour clopiner dans un décor qui embrase leur vélocité pour un bref instant, juste avant que des ambiances cosmiques n'enveloppent le tout. Le rythme renaît! Plus doux il sautille avec difficulté tandis que les solos de synthé restent toujours aussi séduisants, aussi accrocheurs avec leurs teintes de saxophoniste endeuillé qui mêle larme et hargne avec une infinie tendresse. In Search Of Silence Part 2 reprend tous les attributs de la partie 1 avec une belle progression dans la marche minimaliste des séquences. La seule différence est dans l'approche sphéroïdale du mouvement qui donne une approche plus contemporaine à un titre qui respire Klaus Schulze à plein nez, période Body Love, sauf pour les solos de synthé qui sont plus électroniques, moins nostalgiques et plus aérés. Les effets, les ambiances et le décor, quoique j’aime bien ce subtil parfum de Jarre, sont tellement près de KS…On ne peut pas aimer ne pas aimer! Et c'est aussi vrai avec la trilogie de In Search Of Silence Part 3 qui découd sa structure de rythme entre mouvements vifs et/ou ambiants, sur les mêmes bases que In Search Of Silence Part 1. Sauf qu'ici, la structure est plus condensée et varie assez vivement ses approches. Pour un, Meeting One Self débute lourdement, comme un métissage de ['ramp] et Redshift, avant de s'assagir avec une phase plus ambiante. Les synthés sont toujours de délicieux objets décoratifs avec de très beaux solos et des effets à faire bourdonner nos oreilles. Introspection offre une structure vive avec un combat entre séquences limpides et lourdes, les lourdes gagnent, avec une pluie de solos très Schulze. Isolé dans son coin, To the Center of the Earth est dantesque, tant dans son rythme que ses ambiances, et termine un opus très fort où les amateurs de Berlin School rétro en auront plein les oreilles. Très fort et très beau! L'effet est encore plus dévastateur avec une écoute scindée en 2. On écoute In Search Of Silence Part 1 un soir et ses 2 petits frères de sons l'autre soir. Ainsi toute la force de cet album nous frappe de plein fouet. À recommander fortement! Il se fraie une place dans mon Top 10 de 2016!
Sylvain Lupari (22 Novembre 2016) ****½*
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