“Ron a raison; Totem est enivrant, provocant et littéralement pour les adeptes du Berlin School et tous ceux qui aiment les structures de rythmes compliquées”
1 Marrakech 12:01 2 Far Beyond 12:31 3 Adante 10:26 4 Enkore 14:14 5 Freak Mout 11:28
(CD/DDL 60:41)
(Sequencer-based Berlin School)
Un râlement industriel passe d'une oreille à l'autre! Nous n'avons pas le temps de suspecter une phase d'ambiances abyssales que déjà le séquenceur hoquète une ligne spasmodique avec des ions cristallins qui sautillent maintenant dans un râlement qui n'a jamais quitté le décor arrière de Marrakech. Le séquenceur crache une autre ligne de séquence dont le mouvement monte/descend résonne de sa lourdeur imprécise. Des pads de synthé étirent leurs présences sous formes de solos qui sont difficilement identifiable dans cette masse de sons et de rythmes des séquenceurs. Les séquences pleuvent de toutes les directions avec leurs différences tonales et leurs axes de rythmes indépendants qui se touchent, sinon se croisent, dans un carrefour de séquences et de rythmes séquencés qui défilent sous les caresses de synthé aux tonalités très Tangerine Dream des années Encore. Le rythme est captivant, même si pas trop entraînant, à cause des séquences et de leurs reflets tonals qui sont le catalyseur d'un mouvement en constante mutation. Le rythme est dans le style Berlin School avec un petit passage moins dominant qui sert à requinquer les séquenceurs qui explosent d'ingéniosité en trafiquant une gamme de percussions et d'éléments percussifs qui nous laisse pantois. À cet égard, ce qui se passe après la 7ième minute est du pur génie. La cadence se fracture en morceaux composites où les effets d'écho, les ombres et les reflets argentés ainsi que d'autres ions arrivant en renfort étendent une faune rythmique qui tinte avec un effet jouissif pour les tympans. Ce ballet de créativité se prolonge même jusqu'à la dernière seconde de Marrakech. Ça part TOTEM du bon pied, et pas juste un peu! Mon ami Ron Boots était très enthousiasmé à propos de ce nouvel album de Beyond Berlin. Il le décrivait comme étant étourdissant, provoquant et tout à fait brillant. Et il ne faisait pas juste la promotion de cet album disponible chez Groove, il visait juste. Les séquenceurs ici sont tout simplement époustouflants. Il n'y a aucune batterie électronique dans TOTEM. Mais il y a 3 paires de mains, celles de Rene de Bakker, Martin Peters et d'Oscar van den Wijngaard, qui soutirent des trésors de créativité rythmique tout au long des 61 minutes d'un album va vous surprendre à chacun de ses titres.
Deux lignes de séquenceur tracent le rythme de Far Beyond. Une troisième ajoute une vision mélodique qui est reprise par un synthé et ses brises mielleuses. D'autres lignes de séquences s'invitent dans cette chorégraphie lunaire où le rythme bat doucement, comme dans une ballade lunaire. Les synthés soufflent des harmonies évasives qui collent plutôt bien à la réalité du titre en étant assez distantes, alors que des pads de brume étendent une aura de mysticisme. Ce mouvement minimaliste complète sa palette de tonalités magnétisantes avec des séquences organiques qui caquètent dans le genre Robert Schroeder et d'autres dont les reflets de paillettes vont et viennent dans des endroits stratégiques de Far Beyond. On reste dans les mouvement lunaires avec le succulent Adante et ses libellules soniques qui papillonnent de leurs ailes lumineuses. Ce que nous avons ici est une superbe ballade morphique qui se tisse seulement avec les innombrables capacités des séquenceurs et synthétiseurs. C'est déjà dans mon iPod Touch section musique de nuits, à côté de Far Beyond qui est juste un peu moins romantique. Titre composé et enregistré lors de la pratique de Beyond Berlin en vue du festival E-Live 2017, Enkore est un autre petit bijou de rythme en égard de mouvements de séquenceurs qui a sans doute pavé la voie à TOTEM, considérant la présence d'Oscar van den Wijngaard dans le groupe depuis. On ne peut parler ici de rythme proprement dit. Il s'agit d'une ritournelle annoncée par un mouvement du séquenceur auquel se greffent une multitude de séquences, d'effets percussifs et psychédéliques dans un tintamarre stationnaire. Les synthétiseurs sont aussi très actifs en injectant des nappes apaisantes, notamment en début, ainsi que différents effets tonals qui sont en étroite symbiose avec les différents éléments qui se soutiennent dans une masse sonique qui tangue entre le côté expérimental pour séquenceurs et du psybient. Freak Mout conclut ce TOTEM sur une autre note. Le séquenceur est toujours très attrayant avec des accords qui sautillent fragilement sur une mare gelée, entraînant une autre ligne qui y danse tout aussi gracieusement. Ici, les synthés sont plus exploités avec des harmonies sifflotées dans des bancs de brumes chthoniennes. C'est la vrai nature du Berlin School avec une ossature convulsive et des ambiances sombres où rôdent les harmonies d'une flûte secrète. Bon, je parlais de vrai nature du Berlin School! Mais les choses changent à partir de la 6ième minute…Le séquenceur fait dribbler ses ions qui voltigent que ces objets errant sur un convoyeur déréglé. On pense tout de suite à Chris Franke, et avec raison! Les séquenceurs tissent un superbe lit rythmique où des arpèges miroitant s'agrippent à une solide ligne de basse. Freak Mout devient un bon rock électronique avec des accords qui tintent comme des fonds de bouteilles vides sous les caresses chaudes d'un synthé qui a égaré ses nappes chthoniennes lorsque le rythme à pris d'assaut nos oreilles. Ces nappes reviendront avec les chants et solos nasillards d'un synthé qui peine à suivre la créative progression rythmique de Freak Mout.
Je suis pleinement en accord avec Ron Boots; TOTEM est étourdissant, enivrant et tout à fait génial. Un must pour les fans de Berlin School, ça c'est certain! Mais aussi un indispensable pour les fans de séquenceurs et des structures alambiquées qui sont issues de l'ingéniosité et de l'audace de ceux qui manipulent ces séquenceurs. Autant efficace les oreilles à l'air libre que bien emmitouflées dans des écouteurs, ce TOTEM de Beyond Berlin fera sans doute partie des meilleurs albums du genre en 2019!
Sylvain Lupari (11/05/19) ****½*
Disponible chez Groove NL
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