“La musique peut nous emmener dans des paysages sonores uniques comme celui de la pochette”
1 Lost 6:27
2 Rivers of Pangea 17:38
3 Changhsingian 3:23
4 Valley of the Sunken Forest 9:11
5 These Trees are our Homes 5:49
6 Ice Shelf 5:48
7 With the Rising Tide 12:00
8 Cruising Dark Seas 5:07
9 Good-Bye to these Fields of Gold 4:26
10 Of Nightmares and of Dreams 5:54
Bonus Tracks (40:51)
11 Session 2012 (Part 1) 6:17
12 Session 2012 (Part 2) 10:00
13 Session 2012 (Part 3) 7:57
14 Session 2012 (Part 5) 6:57
15 Dreaming at Hanging Rock 9:40
(CD 75:49 /DDL 116:39)
(Ambient soundscapes)
LOST! On peut être perdu de bien des façons. Perdu, comme dans se perdre ou être perdu dans ses pensées. Ou être simplement perdu entre deux idées…entre deux projets. C'est un peu ce perdu que Michael Brückner fait référence pour ce dernier album de Bridge to Imla composé, enregistré et masterisé avec son complice Hans-Dieter Schmidt. On recule à l'époque de The Radiant Sea où le duo était à la remorque du label Winter-Light. Composée pour être performée en concert, la musique de The Radiant Sea devenait perdue dans le temps. Pour 9 mois! Le duo Allemand s'est mis à composer une musique alternative qui a trouvé sa voie jusqu'ici. LOST fut égaré sur des enregistrements depuis la formation du duo, qui proposait sa musique avant tout sur SoundCloud, soit depuis 2012 à 2021. LOST est ni plus ni moins, pour l'essentiel, une extension de The Radiant Sea. Donc une musique ambiante pleine de mystères et de légendes…
C'est par le gémissement d'un violoncelle que la pièce-titre nous plonge tout de go dans les ambiances de l'album qui a débuté avec un éclat bourdonnant d'où s'échappe une bonne dispute de chimpanzés. Titre ambiant avec des effets d'écho roulant en boucles et des épisodes mélodiques évasives, Lost attire notre attention avec ce violoncelle, qui deviendra un violon pleureur, injectant un drame lyrique dans d'intenses arrangements musicaux et un magma sonore rempli d'un dialogue toujours à décoder. Après une courte introduction de matières électroniques, Rivers of Pangea déploie sa structure minimaliste composée d'ions séquencés qui roulent en boucles ascensionnelles. Des nappes de synthé, flottantes plus que volantes, caressent cette continuelle ascension horizontale ayant cette caractéristique d'absorber tout ce qui passe et de le filtrer en douce mélodie ambiante. La basse étend son ombre vampirique accompagnée par des coups de sabots d'un unijambiste alors que cette flûte venue de nulle part chante une mélodie ayant ce soupçon du Moyen-Orient. Une belle musique qui perd son léger dominant rythmique vers la 8ième minute pour entraîner Rivers of Pangea dans un dialogue violon/violoncelle encerclé d'effets sonores d'une nature qui peu à peu reprend vie. Des battements! D'étranges battements qui sonnent comme ces vieux rafiots boucanant qui étouffent et reprennent vie sous les douces incantations du piano en habit de Mike Oldfield. Il n'y manque que The Sailor's Hornpipe! Changhsingian est du genre ambiant expressionniste vivant dans un marécage et ses esprits maléfiques. Esprits ayant pris une forme plus organiques dans l'ouverture de Valley of the Sunken Forest. Une ligne de basse attend que le demi-silence s'installe pour faire éclore ses lents battements dont l'irradiation forme une couche rampante. Ce fascinant rythme attire un piano qui joue seul dans cette forêt abandonnée à l'eau. On appelle ça un très beau titre parti de rien! Une vaguelette de sons oscillant harmonieusement amène le violon gémissant de These Trees are our Homes à nos oreilles. Le rythme oscillant devient vite un ver-d'oreille, même avec l'essaim de distorsions bougé au hasard d'une évolution qui nous amène dans une ambiance Asiatique remplie de tristesse.
Des pas, comme des mini-explosions, dans l'eau réveille les ambiances sibyllines de Ice Shelf. On ne trouvera pas plus dérangeant qu'ici dans LOST. Les battements stoïques et répétitifs de la basse voyagent dans ce titre qui ne s'est jamais défait des emprises de son introduction. Des filets réverbérants strient la délicatesse endormie sous With the Rising Tide. Des perles d'eau tintent dans ce décor bourdonnant qui se rempli de fines nappes de synthé dont les orchestrations sont comme des explosions mal retenues. On sent la puissance dormante de ce titre par ses filaments réverbérants et ses nappes de synthé contenus dans une vision séraphique. C'est un très beau moment dans cet album où la tension demeure au zénith. Un piano pensif émiette ses songes alors que les puissants woosshh et waasshh s'élèvent pour guider cette sérénité vers un tsunami sonore de deux minutes. L'eau retirée fait entendre les dégâts avec des gongs désordonnés et ce violon chinois toujours pleureur. Cruising Dark Seas est un mini With the Rising Tide, plus musical. Alors que très cinématographique, la musique de Good-Bye to these Fields of Gold est construite pour le genre d'adieu dans les films hollywoodiens. Sans être à l'image totale de son titre, la musique de Of Nightmares and of Dreams respire à peine cette différence entre les deux états. On y trouve deux courants musicaux. Un construit sur la douceur du piano et des effets de chatoiements roulant en boucles alors que l'autre est dirigé vers une turbulence gonflée par des tintements divers et des ombres mugissant. Bref, tout dépend de notre interprétation!
Très généreux de leur art, le duo met à la disposition lus de 40 minutes de musique additionnelles si on achète LOST, version cd ou téléchargement, sur le site Bandcamp du duo. La quadrilogie de Session 2012 propose des variations plus sereines, même plus acoustiques de certains passages de LOST. Et Session 2012 (Part 5) prend une tangente plus rock progressif électronique. Délicat avec sa vision philarmonique pour orchestre de chambre, Dreaming at Hanging Rock fait partie d'une compilation de musique ésotérique pour amasser des fonds pour les feux de broussaille en hiver 2019 en Australie. Un beau 40 minutes qui amène une vision plus épurée au drame musical de LOST.
Un peu comme de The Radiant Sea, l'univers de LOST semble être sur le point d'exploser sans jamais y arriver. Cette dualité entre ces ambiances et les mélodies, fortement guidées par le violon et le piano, arrivent à donner des moments magiques. Mais il faut se laisser envelopper par les ambiances et la musique de Bridge to Imla si on veut voyager à travers des fantaisies musicales qui sont au service de notre imagination. Et lorsque nous avons deux musiciens aussi solides que Michael Brückner et Hans-Dieter Schmidt, la musique peut nous amener vers des paysages uniques comme celui de la pochette signée par Andreas Schwietzke.
Sylvain Lupari (13/04/21) *****
SynthSequences.com
Disponible au Bridge to Imla Bandcamp
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