“Red Live @ USA est encore un autre grand album de Berlin School minimaliste et numérique d'une qualité sonore exceptionnelle de BKS”
1 St. Mary's, Philadelphia 19:53 2 Music with Space, Princeton 41:40 3 Star's End FM 1:04:30 Manikin | MRCD 7103
(2CD/DDL 207:33) (Berlin School)
Sorti en Mars 2012, l'album Red propulsait la musique de la série sur les couleurs du trio Berlinois et prenait son véritable envol avec une musique qui alliait ambiances, rythmes morphiques et rythmes plus élaborés dans une mixture électronique qui transcendait celle des 3 premiers albums de cette série débutée en 2003 avec Noir. Quelques 2 mois plus tard, Broekhuis, Keller & Schönwälder entamait une série de concerts sur la Côte Est américaine. Série de concerts qui allait amener le célèbre trio au mythique Star's End le 13 Mai 2012. RED LIVE @ USA est le document audio qui retrace les grandes lignes de ces concerts qui débutaient par un arrêt au Music With Space le 5 Mai 2012 au WPRB 103,3 FM à Princeton.
Enregistré à l'Église de St. Mary's Hamilton Village, Philadelphie, St. Mary's, Philadelphia débute ce double album soigneusement mixé et présenté dans le coutumier digipack de Manikin avec une ouverture aussi multicolore qu'un feu d'artifices sonore. Des nappes, des ululements, des effets organiques et des voix spectrales coiffent une introduction où les cymbales et percussions de Bras Broekhuis déferlent comme des vagues de bruits au-dessus d'une tempête qui cherche pourtant le calme. Les échantillonnages de voix sont assez dérangeants avec une approche aussi attrayante que sibylline alors que tout doucement se tait la clameur des feux avec une belle ligne de flûte qui flotte avec délicatesse sur les cendres de ce champ de bataille sonique. D'une élégance inouïe, ce chant rencontre encore un perséide de bruits hétéroclites qui sont moins violents que les 2 premières minutes de St. Mary's, Philadelphia. Les percussions s'éveillent à la porte des 6 minutes. Si leurs présences sont timides, mise à part ces délicieux effets de percussions manuelles, la séquence qui suit établit les paramètres d'une rythmique flottante qui se fait secouer les ambiances par des coups de percussions sobres mais efficaces. Et s'ouvre alors dans nos oreilles une aventure sonique digne des grands moments de Klaus Schulze, périodes Balckdance à Mirage, avec une bonne ligne de basse soutenue qui monte et descend en boucles dans des nappes de voix éthérées ainsi que des cliquetis qui ornent un décor d'ambiances où s'ébattent divers solos de synthé sous les percussions très dans la note de B.B. Un moment magique qui s'amplifie avec les secondes! Il ne faut pas chercher ici dans les titres performés lors de ces concerts une interprétation des titres de l'album Red. Il y en a peu de liens à faire! Et c'est sans doute sur Music with Space, Princeton que l'on peut trouver un quelconque fil conducteur, notamment avec le titre Red One. Son introduction est tissée de larges nappes de synthé qui flottent parmi des effets électroniques et percussifs. Ce panorama d'ambiances cosmiques est bercé par des nappes dont les lentes tonalités de vieil orgue se transforment en un dense voile orchestrale où cogitent toujours ces bruits qui tissent ce lien de charme entre nos écouteurs et nos tympans. Alors que les percussions rongent leur frein, le mouvement planant de Music with Space, Princeton se transforment un peu plus ténébreux avec des nappes de violons et de voix qui unifient une présence cauchemardesque. Cela va plus loin que Schulze! Ça sent les lents mouvements de paranoïa nocturne de Remy dans son stupéfiant Exhibitions of Dreams. Le rythme se met à clopiner après la barre des 17 minutes avec un mouvement du séquenceur qui fait boitiller ses ions comme un gourou marchant sur des tisons ardents. Les effets cosmiques adhèrent à ce mouvement métronomique tandis que les cliquetis des percussions y vont d'une danse hésitante. Les solos sortent des interstices des synthés, dessinant des cercles qui se défont et se reforment avec une présence digitale qui reste aussi séduisante que ces bons solos des années analogues. Plus lent mais confortablement comparable à Red One, Music with Space, Princeton termine sa marche rythmique hypnotique quelques 25 minutes plus tard alors que se dessine un nouveau panorama d'ambiances.
Pour un peu que l'on aime les longues structures minimalistes, qui sont au bord des portes de Morphée mais qui sont aussi en mode rythmes coulants et transformables, Star's End FM est le summum de RED LIVE @ USA. Et lorsque l'on sait combien St. Mary's, Philadelphia nous avait charmé autant que Music with Space, Princeton, ça donne tout un aperçu de la profondeur de ce dernier album de Broekhuis, Keller & Schönwälder! Ce long fleuve sonique de plus d'une heure débute avec des vagues de synthé qui flottent dans le néant. Déjà les solos sont en mode charme avec des chants astraux. Et déjà Bas Broekhuis envoie des salves de cymbales qui donnent une dimension plus dramatique à cette introduction cousue de soie et qui est déjà animée par une structure de rythme légèrement sautillante aux portes des 8 minutes. Les nappes de voix et les effets électroniques, très bigarrés, ajoutent cette dimension électronique inqualifiable qui cerne ces œuvres fascinantes. Cette 1ière phase de rythme est vivifiante comme un Cha-Cha cosmique. Le maillage entre les percussions et les multiples croisements des séquences est aussi séduisant que les solos, très aériens, sont ensorcelants. Cette phase s'évanouit 14 minutes plus loin, entraînant Star's End FM dans une courte phase de méditation qui s'évaporera à son tour avec une 2ième phase rythmique plus soutenue. Le jeu des percussions est savoureusement magnétisant et donne toute la liberté nécessaire au nombreux solos de synthé qui roucoulent dans une soyeuse ondée de voix brumeuses. Et même si ce mouvement affiche une certaine intensité, il s'éteindra avec de bons effets percussifs et une ligne de basse qui tente de réanimer le tout. Sans avoir pris connaissance du temps, nous sommes déjà rendus au point des 40 minutes et quelques, Star's End FM achève avec une ultime phase de rythme qui est poussée par un splendide mouvement du séquenceur et de ses ions hypnotiques qui sautillent roulent en boucles. Les 25 dernières minutes de ce long titre fleuve sont les plus percutantes de RED LIVE @ USA avec cette signature musicale très motorique de Broekhuis, Keller & Schönwälder et dont on ne se lasse jamais d'entendre et/ou de découvrir sous une autre forme, comme ici. Un autre très bel album d'une qualité sonore exceptionnelle du trio de Berlin! Chapeau les boys!
Sylvain Lupari (08/06/17) *****
Disponible on Manikin Bandcamp
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