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Writer's pictureSylvain Lupari

Broekhuis, Keller & Schönwälder The Vlagdwedde Tapes (2022) (FR)

C'est un réel plaisir de renouer avec la signature esthétique New Berlin School de BKS

1 Witte Wieven 9:51

2 Vlagtwedde Tape 2 17:33

3 Raindrops on the Roof 14:29

4 Westerwolde Triple 15:52

5 Am Großen Baum 13:56

(CD/DDL 71:42)

(Ambient New Berlin School)

Voilà quoi, un bon 3 ans que Broekhuis, Keller & Schönwälder nous avait convié à un festin musical! Purple était ce dernier rendez-vous. Un bel album tranquille dont les ambiances et les éléments virevoltants qui sont au cœur de ce THE VLAGDWEDDE TAPES, un album studio composé et enregistré dans la ville de Vlagtwedde située dans la province de Groningue en Hollande. BKS renoue avec son style plus Berlin School en offrant 5 belles structures avec des rythmes évolutifs pas trop accentués. Enfin, juste assez pour tenir nos neurones éveillées.

C'est avec une onde de sons qui subdivise sa couleur et sa texture, voguant entre sérénité et turbulence que Witte Wieven s'accroche à nos tympans. De couleur orange chaud de lave luxuriante à du bleu céruléen métallisé, cette onde cristallise notre écoute tout en détachant un filament vibratoire qui pulse dans un mouvement circulaire. Finement stroboscopique, cette structure pulsatoire est comme un souffle rythmique qui bat comme une discrète ombre cadencée sous ces nappes de synthé dont Detlev Keller et Mario Schönwälder font fluctuer les couleurs et textures au gré de leurs émotions. Cette dualité dans les textures et couleurs chromatiques des synthés de l'univers de THE VLAGDWEDDE TAPES est le principal argument de séduction, incluant cette densité aléatoire des brouillards orchestraux, des ambiances de ce nouvel album de Broekhuis, Keller & Schönwälder. De brouillard orchestral à odes chtoniennes, ces nappes étalent leurs sortilèges, étreignant une chaleur et une froideur sans âme jusqu'à ce qu'une ombre flûtée amène un dynamisme qui fait éclater la tranquillité de Witte Wieven à l'orée de sa 8ième minute avec une courte phase de rythme composée de séquences turbulentes qui gravitent et sautillent dans une anarchie arythmique. Des tapements sur une peau de bois caoutchouteuse initie le rythme de Vlagtwedde Tape 2. Les bondissements résonnent dans un panorama décoré d'ombres sibyllines dont la discrète chorale éthérée se fond dans un brouillard orchestral aux élans dramatiques. Cette structure de rythme méditatif s'active un peu plus dès la 1ière minute franchie. Des battements pulsatoires, suivis par des riffs de clavier sonnant étrangement comme une guitare, structurent alors une approche rythmique sphéroïdale. Minimaliste et hypnotique, ce rythme, qui fait très Ashra par moments, évolue avec une légère courbe d'accentuation sous une diversité musicale des synthés dont de très beaux staccatos tsiganes, un peu après la 5ième minute, et des solos fragmentés en courtes visions harmonieuses ainsi que des jets de brume orchestrale. Sans flirter avec le style ambiance ténébreuse, la musique respire un peu de cette atmosphère mystique qui est propre au style Berlin School ambiant. Des tintements percent cette fascinante opacité rythmique autour de la 8ième minute, appelant une courte phase atmosphérique avant que Vlagtwedde Tape 2 ne réactive son rythme dans les solos d'une flûte charmeuse de serpents pour une seconde phase qui est nettement plus intense

Ondes de synthé papales avec une fine texture de voix dans les harmonies, Raindrops on the Roof fait entendre sa fascinante ascension cadencée par des gouttes d'eau rythmiques. Cette marche cadencée est un élément de rythme ambiant qui zigzague avec une relative bonne vitesse sous les diverses textures des synthés et d'une ombre de basse qui y jette une chaleureuse aura dramatique. Les gouttes font place à des arpèges qui tournoient en boucles sphériques sous les pulsations d'une ligne de basse dont les rayons résonnants attisent le pouvoir de percussions sobres mais efficaces. Le rythme délaisse son enveloppe ambiant-méditatif, accélérant subtilement la cadence dans un univers rempli des légendes sonores de Tangerine Dream avec des souffles de trompettes apocalyptique et des caresses d'un mellotron au diapason des émotions des années vintage. Un très bon titre qui nous ramène aux années d'or de Keller & Schönwälder. Il y a beaucoup d'intensité dans un titre comme Westerwolde Triple. Son ouverture est remplie d'ondes et de souffles de synthé tissés dans une vision spectrale. La basse étend une ombre qui amplifie le mystère, alors que des pulsations et des tintements de baguettes en verre inventent un rythme sans entrain où tintent une mélodie décimée sous des ululements stridents. Un synthé trace des mouvements de sirènes circulaires, rappelant les univers dystopiques de Vangelis, sur un parcours qui tranquillement prend une forme rythmique plus accentuée autour de la 6ième minute. Ce rythme est plus réservé à l'usage des neurones que pour faire agiter nos pieds, devenant un excellent complément à une musique composée avec un souci du détail pour ambiances de film d'angoisse, initiée par ces harmonies du synthé qui gémissent en virevoltant comme des lucioles assoiffées de sang en seconde partie de Westerwolde Triple. Composé dans les studios de Detlev Keller à l'automne 2021, Am Großen Baum délaisse les couleurs gothiques de l'album afin d'offrir une texture électronique plus contemporaine. La musique et ses ambiances défilent de longilignes ondes de synthé qui forment des boucles séquencées roulant en cascade. Ces boucles deviendront une belle source d'harmonies spectrales à mesure que le titre mange ses minutes. Cette spirale horizontale forme un corridor magnétisant où des accords de clavier tintent dans les ondulations d'une ligne de basse et les chants d'un chœur sans âmes. Des percussions éparses émiettent un rythme latent, orné de riffs de clavier qui virevoltent et éjectent des ruades dans une structure où les bruits organiques ajoutent un élément additionnel à cette mosaïque de sons dirigée par une structure de rythme aux éléments irréguliers.

THE VLAGDWEDDE TAPES est un retour aux sources pour Broekhuis, Keller & Schönwälder qui délaisse sa signature plus lyrique dévouée aux couleurs pour emprunter les routes rythmiques de ses origines. Il y a beaucoup d'éléments dans cet album qui nous ramènent aux années analogues de Tangerine Dream, de même qu'aux premières années de Keller & Schönwälder. Ces éléments se retrouvent dans les synthés et le mellotron alors que Bas Broekhuis continu de développer son ingéniosité à travers des concepts de rythmes qui se démarquent dans un astucieux maillage séquenceur et percussions électroniques. Un très bel album où c'est un plaisir de renouer avec la musique d'un autre trio berlinois qui, à sa façon, a estampiller le très bel univers de la musique électronique de sa signature très esthétique.

Sylvain Lupari (17/01/23) ****½*

Disponible on Manikin Bandcamp

(NB: Les textes en bleu sont des liens sur lesquels vous pouvez cliquer)

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