“Voici une belle surprise dans le style Berlin School vintage remplie de bizarres pattern de rythmeset de grandes ambiances d'un Mellotron magique”
CD 1 (73:29)
1 Bell's Call 4:13
2 Darkness Rising 7:30
3 Nightprogram 12:05
4 Out of the Spheres 6:01
5 Rusty Nail 5:18
6 Say Goodbye to Yesterday 9:56
7 Don't Surrender to Hate 3:02
8 The Long Cure 25:07
CD 2 (75:59)
1 Downwards we Go 17:36
2 Desert Trail 3:57
3 After Dallas 18:15
4 Shielded Transformer 4:57
5 Wisdom 22:27
6 Glass Cabinett 4:21
7 A Summer's Funeral 4:07
(2CD 149:28)
(Berlin School and cinematographic music)
Christian Fiesel n'est pas un nouveau nom dans le domaine de la MÉ. Inspiré par le Berlin School rétro, et ces ambiances qui transitaient entre nos oreilles avec des vapeurs d'éther, ainsi que le Krautrock plus expérimental, il a composé plus d'une vingtaine d'albums où le bruit et la dissonance des sons allaient de pair. Son approche de composition changea radicalement lorsqu'il se procura un Mellotron en 2015. De bizarre sa musique devint plus accessible pour le genre film d'horreur et de science-fiction. C'est ainsi qu'il a joint le label Aural Films pour cosigner des œuvres de musique cinématographique pour films sombres et noirs avec le célèbre Wolfgang Alien Nature Barkowski et 3 avec le très renommé Jack Hertz, grand compositeur de musique de film aux USA. Un contact avec Hagen von Bergen, propriétaire du label Allemand Bi-Za Records ouvrit les portes pour la réalisation de HAGEN'S DELIGHT, un titre qui dépeint toute l'affection de Hagen von Bergen pour la musique de Christian Fiesel. J'ai été renversé par cet album dont la musique fut écrite entre 2014 et 2016. Autopsie d'un album où le Mellotron nous entraîne dans un féerique univers de peur!
La première chose qui me séduit avec Bell's Call est cette étrange sensation de pénétrer dans la lugubre ambiance de The Keep avec un dense voile ambiosphérique très ténébreux où fredonnent des voix lucifériennes. Les ambiances sont tissées de brouillard suintant d'une bruine brunâtre et de lamentations d'une guitare aux harmonies vampiriques. Les accords qui tintent dans ce décor glauque ajoute une touche de nostalgie bien sentie. Christian Fiesel n'utilise aucun séquenceur et c'est pourquoi ses figures de rythmes sont étonnement envoûtantes, comme dans Darkness Rising et ses multiples boucles oscillatrice qui montent et descendent avec très bonne nuance dans le ton et la cadence. Le tout est soigneusement enveloppé de voix chthoniennes et d'une ambiance paranormale. J'ai comme l'impression d'entendre du Tomita dans un drame d'horreur japonais. C'est très bon et ça démarre bien HAGEN'S DELIGHT! Nightprogram porte assez bien son appellation! Un étrange et ensorcelant battement instaure une rythmique feutrée mais tout de même assez hypnotique. Les nuages se déplacent avec des chants dans la bruine et imprègnent une sordide ambiance. Cette fusion des synthés et Mellotron est une arme redoutable dans cet album. Et cela donne un effet si sibyllin que nos sens restent cloués à ce fascinant chant occulte qui épouse une tangente amplifiée en mi-parcours avec des effets de distorsions et des chants d'ectoplasmes pressés de nous envahir. De vifs mouvements oscillatoires instaurent une rythmique cacophonique qui fait très années expérimentales de la MÉ pour un séduisant 3 minutes. Et là, c'est tellement évident, j'ai cette impression que Kraftwerk et son Radioland envahit l'espace sonore. Jusqu'ici, je suis totalement sous ensorcellement. Out of the Spheres propose une structure de rythme en forme de spirographe dont les tons et les grésillements forment une toile sonique circulaire alors que la lointaine structure de rythme dans Rusty Nail s'essouffle dans un dense magma de sons et d'effets sépulcraux. Say Goodbye to Yesterday propose une très belle introduction découpée dans les charmes du Mellotron. Des nappes de vieil orgue, des murmures d'incantation chthoniennes et des harmonies flûtées flottent comme des nuages obituaires jusqu'aux portes des 5 minutes. Des percussions lourdes martèlent un rythme lent qui progresse avec peine à travers moult effets sonores. Christian Fiesel imagine en musique la difficile procession d'une caravane et c'est assez réussi. Un titre explosif et créatif? Don't Surrender to Hate va séduire les fans de ['ramp] et autres avec un splendide jeu de rythme construit en mode Dance Music joué avec un léger décale dans l'écho. Inséré ici rend cette courte pièce tout simplement magique. The Long Cure est un long titre très ambiosphérique avec quelques tumultes qui secouent par moment sa quiétude. Les ambiances sont plus translucides que totalement obscures avec des brises creuses, une chorale chthonienne et un long passage, ainsi qu'une finale, plus éthérée.
Downwards we Go reflète assez bien la vision cinématographique obituaire de Christian Fiesel qui nourrit le 2ième CD de HAGEN'S DELIGHT. Le synthésiste natif d'Hambourg joue merveilleusement bien à l'intérieur de ses ambiances en émiettant une structure de rythme décousue qui désagrège ses fragments dans une 1ière partie assez psychotronique, alors que les 9 dernières minutes de Downwards we Go s'évaporent dans un bon moment de douceur contemplative. Desert Trail sort du lot avec sa guitare acoustique qui tente de gratter une mélodie dans des effets sonores et des nappes à saveurs de trompettes qui font très Tangerine Dream, que l'on a pu remarquer les influences aussi dans Downwards we Go. After Dallas fait très Steve Roach, alors que le court Shielded Transformer fait très ambiances de film d'épouvante où la fin du monde arrive avec sa horde de démons affamés. Wisdom présente une violente tempête de vents autant sombres que criards et dont les deux tonalités s'affrontent dans un duel tintamarresque. Sont-ce les trompettes des anges annonciateurs d'apocalypse? Toujours est-il qu'on a l'impression de descendre dans le creux de la terre avec des bruits d'une marginalité sonique aussi dérangeante que séduisante. Wisdom se déroule en plusieurs phases. Ainsi, si l'impression d'émerger des ténèbres pour se faire caresser par de séduisants vents harmonieux c'est pour replonger dans une spirale, comme un purgatoire, où le tapage renaît afin de nous ramener encore plus loin dans les entrailles des noirceurs. Deux courts titres séparent nos oreilles de cette 1ière écoute de HAGEN'S DELIGHT. Glass Cabinett est un titre très dérangeant idéal pour un film d'horreurs aux images éprouvantes. C'est sordide à l'os! A Summer's Funeral est un superbe titre. Plein de délicatesse malgré son enveloppe mortuaire, le titre offre une suite d'arpèges qui sautillent avec une approche mélodieuse qui se fond à une chorale d'embaumeurs. C'est très bon et assez incitatif pour remettre HAGEN'S DELIGHT en mode écoute. Voilà un très belle surprise! Un album étonnant qui plaira assurément aux amateurs d'une Berlin School des années inimaginables.
Sylvain Lupari (29/04/17) *****
Disponible chez BI-ZA records
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