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Writer's pictureSylvain Lupari

CHUCK VAN ZYL: Spacetones (2019) (FR)

Les 40 premières minutes sont incroyablement sauvages et porte ombrage au reste d'un album où je viens de découvrir un virtuose du séquenceur

1 Spacetones Part 1 38:45

2 Spacetones Part 2 8:08

3 Spacetones Part 3 21:53

(CD/DDL 68:48)

(Berlin & England Schools)

Aussi invraisemblable que ça vous semble, je n'ai jamais entendu la musique de Chuck van Zyl. Ce célèbre DJ de la non moins célèbre émission radiophonique Star's End, qui existe sur les ondes WXPN depuis 1976, est aussi un musicien-synthésiste qui a réalisé près de 40 albums depuis le milieu des années 80. En solo, avec Art Cohenpour The Ministry of Inside Things ou avec Andrew Rath et Peter Gulch pour Xisle, sa musique est majoritairement axée sur de longues improvisations qui soit visitent les territoires de panoramas ambiants ou ceux plus animés de Tangerine Dream, période Peter Baumann. SPACETONES est un deuxième album sur Groove et retrace les grandes lignes de son concert au fameux festival E-Day à Oirschot au printemps 2018.

C'est une ouverture inspirée du Cosmos et de ces poussées de wooshh remplis de particules poussiéreuses que s'amorce le voyage de Spacetones Part 1. En fait, cette introduction fait rejaillir en sons les visions de son titre. Des bruits dissonants, distordus et d'étoiles scintillantes virevoltent dans un maelstrom sonore d'une floraison inspirée aussi par ces sortilèges sonores des jeux vidéo, comme de ces possibles dialectes avec ces habitants des étoiles. Chuck van Zyl n'éternise pas cette intro. Dès les 5 minutes dépassées, il jette le canevas d'une structure rythmique avec un premier jet du séquenceur. Deux petites basses pulsations coupent la ruade minimaliste d’une structure vive inspirée des années Logos de Tangerine Dream. Dans une formule où le séquenceur structure des rythmes protéiformes, le musicien-synthésiste de Pennsylvanie nous en met plein les oreilles avec un solide presque 40 minutes de rythmes plus souvent endiablés que passifs. Une autre ligne du séquenceur ajoute un champs de profondeur qui donne l'illusion d'une vélocité, alors que la masse de séquence rend le rythme quasiment plus lourd que vif. Le DJ américain continu de jouer avec la vitesse de ses structures de rythmes qui roulent à tombeau ouvert en insérant une contre-mesure, donnant un nouveau souffle à la structure et à nos oreilles. Les solos arrivent autour des 15 minutes avec des chants vampiriques et des nappes chantant avec une tonalité surnaturelle. Une impasse atmosphérique impose un retrait des troupes du séquenceur qui fait onduler une seule ligne autour des 20 minutes, lorsque Spacetones Part 1 se ressource avec une nouvelle tonalité qui fait miroiter des arpèges aussi limpides que du feu congelé par le Cosmos. Des percussions teutoniques battent avec plus de ferveur dans cette phase devenue nettement plus cosmique avec un échantillonnage des tonalités des années cosmiques de la French School. Toujours très actif, le séquenceur sculpte des lignes de rythmes adjacentes avec des lignes d'ions qui oscillent innocemment dans le lourd courroux rythmique d'autres ions entassés et dont les sauts mathématiques tissent un noyau de lourdeur rythmique très opaque. Mais durant tout ce temps, nous arrivons au point des 25 minutes, nous avons l'impression que Spacetones Part 1 évolue en mode permutation active faisant de sorte qu'on ne voit et ni sentons les minutes passées. Le rythme ralenti sa cadence infernal dépassé ce point pour changer de peaux plus d'une fois sans oublier d'insérer des passages éthérés assortis de caresse flûtées. Spacetones Part 1 termine son intense rafale rythmique dans ces tonalités très colorées de son introduction qui est enveloppé cette fois-ci des nappes de Mellotron des années Peter Baumann. Solide, du début à la fin.

Après un bel intermède d'ambiances cosmiques en Spacetones Part 2, Spacetones Part 3 débouche nos oreilles apaisées avec un gros effet réverbérant qui continu de progresser comme le ronflement d'une machine qui refuse le silence en élaborant d'autres thématiques sonores qui ont besoin de ce fil de réverbération pour survivre. Une pulsation, et son écho de deux pom-pom, transite autour des 3 minutes, modifiant son axe sonore et sa course afin de sculpter la naissance rythmique protéiforme du 3ième volet de SPACETONES. Celui-ci est moins sauvage. Le rythme est pulsatoire, tout comme le paysage qui respire par ces cognements passifs dont la vélocité réside dans le flux du séquenceur qui réussit tout de même à faire faire des cabrioles très artistiques à ses lignes d'ions gambadant comme des lapins géants au pays des nains. Ça donne de beaux élans, moins foudroyants que dans Spacetones Part 1, et cela se traduit en figures rythmiques plus statiques qui oscillent à la dérive entre une pluie d'astéroïdes et de tonalités cosmiques appartenant à différentes tribus interstellaires. La plus longue phase de rythme soutenu se situe entre la 10ième et la 15ième minute dans un bon Berlin School qui combat une autre charge tonale pour s'arrimer aux douceurs d'un mellotron perdu dans l'espace.

Je ne sais pas si l'univers de Chuck van Zyl est comparable à celui de SPACETONES. Si oui, il y aura du rattrapage à faire puisque la musique ici, et spécialement les 40 premières minutes de ce concert, est du rock électronique progressif et sauvage qui flirte entre les frontières d'Airsculpture et de Tangerine Dream. Étonnant et renversant!

Sylvain Lupari (09/02/20) *****

Disponible chez Groove NL

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