“Un bel album de style Berlin School minimaliste et hypnotique des années 70”
1 Wonderwall 9:57
2 Distant Dreaming 8:30
3 Flashback 9:29
4 Shifting Colours 10:39
5 Beginnings 8:37
(DDL 47:15)
(Berlin School)
Leonardo Wijma a retrouvé le chemin de son inspiration pour nous offrir un premier opus en plus de 24 mois. SADHANA, un terme sanskrit utilisé pour désigner une pratique spirituelle quotidienne, s'éloigne un peu des rythmes séquencés du dernier Son of Ohm. Si Reflections plongeait directement dans le style Berlin School, c'est un peu différent avec cet album qui démarre avec ces rythmes analogues conçus à partir de riffs de guitare découpés par saccades et qui roulent par boucles. La musique propose ces structures donc des rythmes répétitives qui s'inspirent toujours de l'univers Manuel Göttsching, avec ou sans @shra. De titre en titre, la cadence augmente pour atteindre un pinacle à Shifting Colours. Un album qui demande quelques écoutes et surtout d'être découvert avec des écouteurs afin d'en être absorber par ses dimensions autant atmosphériques que rythmiques. Sinon, on rate ces subtilités qui font la richesse de SADHANA.
Wonderwall infiltre nos oreilles avec des tonalités extra-terrestres, des vents intersidéraux et des battements de type frappes de dactylo, ou de claquettes dansant sur une roue. C'est lorsque la guitare trace des riffs qui coulent en boucles rythmiques que la symbiose des 4 éléments sculpte un rythme mou. Un rythme circulaire qui nous fait plier du genou en se trémoussant. Un peu plus, et on recule de 50 ans. Dans les années hippies. Les années 70. Une basse avance et recule constamment, dansant un cha-cha à 2 pas. Elle accentue la fluidité du rythme qui parcoure ses presque 10 minutes en mode minimaliste et présente une modulation soutenue qui rend la structure de plus en plus spasmodique. Et un peu comme avec Göttsching, c'est la guitare avec ses effets de boucles, de réverbérations et ses riffs roulant en vagues bouclées qui institue les rythmes sur SADHANA. Distant Dreaming propose donc une structure similaire à Wonderwall, mais avec plus de tonus dans le débit, et de vitesse dans le déploiement des boucles qui s'échappent en créant des secousses. Une belle tonalité organique, un genre de guimbarde, s'ajoute au sprint rythmique qui atténue sa course très tôt, autour de la 6ième minute, pour présenter l’ossature sans viande d'un rythme qui s'émiette par gambades et ruades.
Les brises creuses et les effets cosmiques qui se cachaient discrètement dans le firmament de Wonderwall sont plus présentes en ouverture de Flashback qui immédiatement s'attaque à un rythme créé par ces riffs de guitare roulant en boucles. C'est la naissance d'un bon rock cosmique qui est assez entrainant. Deux arpèges tintent innocemment sur cette structure que des effets réverbérants et de drones noircissent à moitié. Les effets cosmiques réapparaissent, alors que la guitare répète ses actions de façon plus incisive. Des éléments de rythme, comme des double-coups de basse-pulsations, et une texture de percussions injectent plus de dynamisme alors que le synthé déroule des lignes de mélodies fantomatiques. Une ligne plus nasillarde se met à souffler en parallèle, donnant un petit côté psychédélique et rappelant surtout l'émergence de la MÉ des années 70. Je pense à Tangerine Dream et à Neu! entre autres. C'est un très bon titre qui insuffle plus de tonus autour de la 6ième minute avec un bel élan fantôme. Shifting Colours suit la tangente de Flashback en proposant un bon Berlin School sur une structure légèrement plus vive où la ligne de basse effectue un travail colossal avec des bonds qui ont une tendance organique. Les filaments mélodieux ont toujours cette nuance de spectres qui sifflotent alors que le mellotron, plus présent ici, dessine des ailes musicales et des bancs de brume mythique qui survolent et encerclent un rythme envoûtant et hypnotique. Les sifflotements, les ululations spectrales du synthé se transposent sur le superbe Beginnings et son rythme de slow cosmique qui ensorcèle autant les sens que ravive la mémoire. On dirait un bluegrass cosmique avec la guitare qui étend ses harmonies répétitives sur un rythme qui tourne au ralenti, comme un carrousel qui se fige peu à peu dans le romantisme. C'est super simpliste mais d'une efficacité à nous faire rêver, les yeux remplis de larmes. Un superbe titre qui termine un album qu'on aime de plus en plus à chaque nouvelle écoute, même si on a toujours cette impression d'entendre les mêmes mouvements. La sublimité de la MÉ minimaliste!
Sylvain Lupari (09/08/23) ***½**
Disponible Son of Ohm Bandcamp
(NB: Les textes en bleu sont des liens sur lesquels vous pouvez cliquer)
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