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Writer's pictureSylvain Lupari

Cosmic Ground IV (2018) (FR)

“Un album de Berlin School vintage à écouter absolument et où Dirk Jan Müller trouve toujours le moyen de réinventer un genre à sa façon”

1 Possessed 7:38 2 Stained 11:30 3 Obscured 7:25 4 Greasy 12:29 5 Progeny 20:21 6 Plains 9:02 7 Deep End 9:57 8 Soil 38:17 (Bonus Track) Studio Fleisch ‎| SFCD10

(CD 78:22) (V.F.) (Vintage Berlin School)

Lourde et caverneuse, une brise ténébreuse armée de cliquetis et de tintamarres industriels étend son ombre d'inquiétude en ouverture de Possessed. Une basse de rythme embryonnaire tente d'émerger. Sauf qu’il est coincé sur place comme ces vieux vinyles et leurs éraflures qui faisaient constamment sautiller l'aiguille. Des pulsations gélatineuses beurrent les murs d'un corridor d'une centrale nucléaire dont les bruits environnants sont les témoins d'une horde de fantômes qui déambulent avec des sombres idées plein leurs auras ectoplasmiques. Malgré cette faune de bruits et de pulsations sédentaires, le rythme est totalement absent dans ce titre. Et son environnement tintamarresque atteint un niveau insurmontable, insupportable pour certains, vers les 5 minutes, afin de s'évanouir dans des ondes chthoniennes quelques secondes plus tard. Possessed a quelque peu déstabiliser les fans de Cosmic Ground avec une approche de psybient et d'ambiant industriel très ténébreux et qui jette ses ombres un peu partout dans COSMIC GROUND IV. Sauf que tout n'est pas sans vies rythmiques dans ce dernier opus de Dirk Jan Müller. À preuve le splendide Stained qui décrit son arc rythmique dès les premiers brouillards de voix spectrales apparus. Le mouvement est lent et construits autour de deux lignes qui communiquent avec de courtes oscillations. Ces bonds et leurs échos sautillent paisiblement dans des nappes de voix éraillées et d'autres effets percussifs qui sautillent comme un petit groupe des billes sur un convoyeur. Stained, et son empreinte Redshift déploie une nette vélocité dans son mouvement qui débouche vers un long pinacle, autant dans le rythme que les ambiances, avant de retraiter dans son état naturel. De l'excellent Berlin School des années vintage! Les thèmes ici gravitent autour d'un étrange conte d'horreur. Les ambiances sont lourdes et les rythmes répond à ces ambiances avec des structures lourdes, vampiriques et aussi noires que l'ébène des enfers. Obscured accroche nos oreilles avec cette incontournable désir d'écouter One of These Days de Pink Floyd. D'ailleurs il y a énormément d'influences de Rick Wright dans cet album, notamment au niveau des patch de brumes. Le rythme est entraînant pour les neurones avec des borborygmes de Gargouille qui s'accrochent aux hypnotiques oscillations d'un rythme fantôme. Magnétisante et envoûtante, la musique ne cesse d’atteindre des dimensions rythmiques aussi puissantes que dans les autres albums de Cosmic Ground, mais dans des structures de musique nettement plus courtes. Il y a 7 titres au lieu des légendaires 4 que Dirk Jan Müller offre depuis Cosmic Ground 2.

Greasy brise le silence avec une lourde nappe de Mellotron qui tombe avec un dense effet d'orgue des ténèbres. Seulement 3 minutes d'ambiances chthoniennes suffisent à engendrer un rythme fluide qui ondule paisiblement dans sa structure hypnotique. Une autre ligne de séquences plus limpides injecte une aura plus lumineuse et quelque peu mélodieuse avec des séries de spasmes oscillatoires auxquelles se greffent des riffs de synthé qui chevrotent encore plus que les spasmes. Dans ce parcourt minimaliste de 12 minutes, Greasy impose ses nuances un plus dans son enveloppe musicale que dans ses structures de rythmes entrecroisés. Ça fait assez Tangerine Dream, Phaedra mais avec plus de vivacité dans le rythme. Progeny est un autre excellent titre qui n'a besoin que de 4 minutes pour réchauffer les ambiances afin qu'une autre structure de rythme des années d'or de la Berlin School déploie un mouvement vif noué autour d'une ligne d'ions galopant toute bride abattue. Des filaments de synthé, des nappes morphiques et d’autres plus Méphistophéliques donnant un relief à la fois musical et ténébreux alors que des effets percussifs tentent d'ajouter une brèche psychédélique à une structure que les tapotements de nos doigts peinent à suivre. J'ai rarement entendu autant de bon Berlin School animé et plein de nuances dans ses ornements que dans cet album où les essences de Node, Arc, ['ramp], Redshift et le bon vieux Tangerine Dream imbibent les ambiances et les rythmes sans pour autant que Cosmic Ground ne perde son âme. Plains nous ramène dans la sobriété avec une structure d'ambiances nocturnes, mais pas autant tapageuses que dans Possessed. Tout le contraire de Deep End qui est un titre d’ambiances chthoniennes avec des ronronnements industriels qui se métamorphosent en un rythme ambiant noir et dont les oscillations fantômes grouillent dans une flore sonique bardée d'éléments synthétisés qui sont aux couleurs du sens de son titre. Prenez Phaedra et faites jouer au ralenti, c'est un peu Deep End mais avec plus d'effets et de mouvements anfractueux dans les multiples lamentations et essences ésotériques de ses ambiances. Lourd, sombre mais très intrusif!

Présenté en format CD manufacturé ainsi que dans un beau digipack aux couleurs aussi intrigantes et flamboyantes que les bassins de ses ambiances, COSMIC GROUND IV offre un long titre en prime qui vient soit avec l'achat du CD, un code est fourni, ou soit avec son téléchargement. Un long titre d'une 40taine de minutes sans vie rythmique mais avec la panoplie d'effets d'un synthé et surtout d'un Mellotron qui sont en mode; musique pour faire peur la nuit. Si vous êtes un amateur d'ambiances, Soil va combler vos attentes. Sinon des titres comme Possessed et Deep End sont d'excellents choix afin de vous initier à un univers où l'imagination brode un film dont vous êtes le seul maître du scénario. Que l'on aime ou pas, ça n'enlève absolument rien à cet album qui est très bon et où Dirk Jan Müller trouve encore une façon de réinventer un genre à sa manière. Un incontournable et un grand album de Berlin School vintage qui figure dans mon Top 10 de 2018.

Sylvain Lupari (07/06/18) *****

Disponible au Cosmic Ground Bandcamp

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