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Writer's pictureSylvain Lupari

David Wright Oracle (2023) (FR)

Il y a ici un subtil mélange des rythmes ambiants de Schulze aux textures plus accessibles de Wright

1 Prophecy 2:51

2 Castalian Fountain 6:22

3 Temple Mantis 5:27

4 Athenian Sunfall 6:54

5 Oracle, Pt. 1 5:29

6 Oracle, Pt. 2 5:17

7 Dreams of Orion 7:54

8 The Fall Perialla 7:43

9 The Lament of the Pythia, Pt. 1 9:54

10 The Lament of the Pythia, Pt. 2 8:43

11 The Hunter 9:13

12 Return to Orion 2:25

(CD/DDL 78:19)

(Melodious EM, ambient Berlin School)

Hum…Comment vous parler de ORACLE? Parce que vous savez, les vocalises et mes oreilles n'ont pas toujours ces atomes crochus. Ça dépend des jours et surtout du niveau de mes émotions. Et des vocalises… il y en a en masse sur ce dernier album que David Wright a fait avec la chanteuse Anglaise et sa muse des dernières années, Carys. Et je dirais que si vous avez aimé Prophecy, un album paru en 2017, il y a de fortes chances pour que apprécierez les presque 80 minutes de ce ORACLE. Mais laissons plutôt le choix des mots à David qui explique le pourquoi de cette seconde collaboration, je parle d'œuvre entière, entre sa musique et les fredonnements de la chanteuse de Suffolk. Et même sans ces explications, et dès que Castalian Fountain secoue le voile de nos tympans, on entend la corrélation entre ORACLE et la période Gerrard/Schulze du légendaire musicien-synthésiste Allemand. Ce second album de Wright/Carys s'inspire effectivement de ces 2 années, et les 5 albums, que Lisa Gerrard et Klaus Schulze ont composé et performé entre 2007 et 2009. Cependant, l'approche artistique est très différente! Contrairement aux envolées improvisées, débloquant sur des textures plus atmosphérique et du Berlin School parfois incendiaire de Schulze, David Wright est plus méthodique dans la peaufination de ses compositions. Il est aussi plus mélodieux avec des rythmes qui sont à cheval entre le rock électronique Anglais et le New Age progressif, parfois même avec du Berlin School ambiant. Et ORACLE propose rien de moins qu'un David Wright au sommet de son art avec une belle brochette de titres qui surfent entre ces rythmes mélodieux, renforcis par la voix de Carys, le Berlin School tranquille, la danse tribale et même le fougueux England School qui nourrit des passions avec le très solide The Hunter.

Dans un élan de musique cinématographique, Prophecy accapare notre attention dès qu'une tempête de wiisshh et de bourdonnements organiques inonde nos oreilles. De post-apocalyptique, l'ouverture se transforme en ode céleste aux fragrances du Moyen-Orient avec une chorale angélique qui fredonne un cantique lyrique. La voix de Cary s'élève alors d'entre les délicats tintements d'arpèges de Castalian Fountain. Ses vocalises, tantôt sobres et tantôt émotives, flottent sur un banc de drones qui assombri légèrement les ambiances du titre jusqu'à ce qu'une structure de rythme se met à sauter délicatement après la 3ième minute. Cette structure qui avance comme un loup surveille sa proie épouse celle des années Body Love de Klaus Schulze. Les murmures de la chorale font aussi très Schulze. Fusionnés aux vents orchestraux, ils donnent un élan dramatique à une finale qui fait renaître la voix de Carys entre des filaments torsadés de synthé, autre ornement musical récurrent dans l'album, qui ne cesse de rouler et roucouler sur l'évolution du titre. Temple Mantis continu sur le rythme tracé par Castalian Fountain, mais avec une légère accentuation dans le débit. Les percussions ajoutent plus de dynamisme après la 2ième minute, rappelant indéniablement ces structures de rythme évolutif des années 2000 de Schulze. Les filaments twistés du synthé virevoltent toujours aussi aléatoirement, alors que la voix surréelle de Cary et les orchestrations, tissées dans des voix et des violons de brume, enveloppent l'ascension du rythme d'un voile de tendresse. La dernière minute du titre est plus atmosphérique ténébreuse avec des drones, des mugissements organiques et des bourrasques de vents cosmiques qui précèdent une belle harmonie évasive du synthé. Athenian Sunfall propose une introduction cousue du fil de la tourmente. Une mélodie du synthé, découpée par boucles saccadées, en ouvre ses dimensions. Cette mélodie virevolte comme des flocons d’arpèges dans un vent tourbillonnant. Si vous pensez à Tomita dans Snowflakes Are Dancing, la pièce-titre, vous ne serez pas le seul. On y entend ces mugissements, comme des coups de gorgoton, dans cette ouverture malmenée légèrement par des explosions de percussions. Peu à peu, se tisse un beau tissu orchestral qui est secondé par une douce chorale angélique, donnant une texture de romance cinématographique à la musique. Le synthé larmoie comme un guitariste qui éparpille sa douleur dans une structure devenue méditative. Les vagues roulent, les percussions explosent ici et là et le synthé façonne une belle mélodie ambiante dans une phase de beauté musicale typique de Mannheim Steamroller dans le très beau Fresh Aire 6. Oracle, Pt. 1 s'extirpe de ces tintamarres pour continuer sur ce mouvement de rythme Berliner du séquenceur. L'ouverture est lente à débloquer avec les sautillements des séquences qui font du surplace dans une dense membrane de vents symphoniques. Les vocalises de Carys, certaines sont aériennes et d'autres très aiguës, survolent cette ouverture qui épouse peu à peu la progression de Temple Mantis. Des orchestrations arabiques encerclent le titre avec de lents mouvements qui font contrastes avec le rythme. David Wright est pensif et c'est de cette façon qu'il couche une belle mélodie qui se noie dans les fredonnements lubriques. Les arpèges tintent un peu en solitaire pour lier Oracle, Pt. 2 qui s'enracine dans une structure plus entraînante pour devenir un croisement entre le England et le Berlin School où se greffe une bonne ligne de basse ondulante. À ce point, je me demande si Carys n'est juste pas trop présente! Mais comme je disais plus haut, ça dépend de mes humeurs et de ma disposition mentale à l'entendre. Mais peu importe mes états d'âme, David Wright nous remplit les oreilles avec de la foutue bonne musique depuis l'ouverture de Prophecy. Surtout que la chanteuse sera invisible sur les 2 prochains titres, plutôt atmosphériques méditatifs, de ORACLE.

Dreams of Orion suit avec une tendance cosmique. Les vents, ou les vagues d'océans interstellaires, dominent les stridulations musicales du début jusqu'à ce qu'un carrousel d'arpèges miroitant fasse entendre une délicate berceuse endormitoire. Le débit et l'intonation de la berceuse varient légèrement, tout en gardant sa texture poétique qui est rehaussée par de lointaines voix angéliques. La musique et ses ambiances sont en constantes progression jusqu'à atteindre un niveau d'intensité dramatique autour de la 6ième minute. Un beau titre où le clair et l'obscur se fondent en une poésie musicale sans frontières. The Fall Perialla explique à lui seul les charmes d'un rythme ambiant à la Berlin School. Un rythme mélodique près des inspirations de Schulze qui est estampillé par des nappes de synthé s'empilant avec un degré émotionnel variable, surtout lorsque ce synthé illumine les ambiances avec des jets de poussières d'étoiles et de wiisshh. Ici, la chorale légèrement chtonienne épouse une belle onde de synthé discrètement lumineuse, donnant ce petit voile de mysticisme du Moyen-Orient à la musique. Des explosions feutrées dans le dernier tiers du titre ajoutent une dimension dramatique dans une finale qui se veut plus céleste avec une nappe de voix éthérées qui se perd dans les reflets d'arpèges dont les crissements et le miroitement circulaire nous guide vers l'ouverture de The Lament of the Pythia, Pt. 1. L'inspiration des dunes et autres décors du Moyen-Orient est plus palpable ici, surtout avec la texture de percussions tribales qui se greffe aux percussions électroniques et à une ligne de basse sculptée dans l'ordre de soutenir ce rythme qui peu à peu devient une sorte de fusion entre une musique de danse clanique et un léger rock électronique. Le rythme est soutenu et entraînant pour des neurones rêveuses. Surtout que la voix de Carys, qui a chassé la subdivision des odes flûtées et des solos harmoniques acuités du synthé, vient contrebalancer l'aspect électronique et New Age du titre, autour des 2:30 minutes. Sa voix fredonne avec inspiration sur ce rythme qui sautille maintenant d'une oreille à l'autre dans une symbiose harmonique entre la danse virevoltante du mouvement circulaire d'arpèges cristallins et les riffs de clavier. La basse et les percussions reviennent à la charge autour de la 3ième minute de The Lament of the Pythia, Pt. 2. Les ambiances y sont aussi plus ténébreuses avec une chorale d'hommes aux voix plus obscures. Les arrangements sont plus présents dans ce segment, de même que le synthé qui lance de beaux solos mélodieux. En plus d'être plus mélodieux, l'équilibre est parfait entre la voix de la chanteuse de Suffolk et les harmonies et arrangements des synthés. De titre en titre, ORACLE progresse, tant dans les rythmes que ses arrangements, pour atteindre son pinacle avec The Hunter qui est un lourd rock électronique de style England School. Le rythme combine lourdeur et lenteur spiralées avec une belle fusion des percussions, du séquenceur et de la basse. Ça donne un débit lourd et finement saccadé, comme dans un effet stroboscopique. Les arrangements et les orchestrations sont savoureux et enveloppent la structure d'un ralenti absolument séduisant. Une texture de guitare électrique, je présume car je ne vois aucune collaboration d'un guitariste dans l'album, est vorace et lance de furieux solos qui se fondent dans les tonalités du synthé et de ses solos. Les séquences guident autant le rythme que les harmonies électroniques alors que de subtils effets organiques complètent un riche décor qui met nos oreilles au défi. C'est difficile pour Carys d'harmoniser son aria atmosphérique sur une musique aussi endiablée, mais elle y parvient et l'impact se fait mieux sentir dans les courtes phases moins rythmées. Et tout ça nous mène à Return to Orion, une finale atmosphérique et cosmique qui met un terme à cette autre excellente odyssée musicale de David Wright, qui continue, depuis l'excellent Stanger Days en 2018, de nous offrir du matériel original de très haute qualité.

Bien que très belle et parfois indéniablement importante à la musique, la voix de Carys est par moments un peu très omniprésente! Mais ça n'enlève rien à l'ensemble de ORACLE qui est un splendide album avec un David Wright hautement inspiré dans cette ode qui se veut un hommage à la période Gerrard/Schulze d'un musicien que Wright a toujours eu en haute estime. C'est la bonne façon d'approcher ORACLE! La musique est incroyablement bonne et belle avec des passages qu'on réécoutent avec le bonheur qui nous sort des oreilles et des émotions. Ce n'est pas ça l'important?!

Sylvain Lupari (21/09/22) ****¾*

Disponible au AD Music

(NB: Les textes en bleu sont des liens sur lesquels vous pouvez cliquer)

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