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Writer's pictureSylvain Lupari

DERELICT THOUGHTS: Autumn Moon (2014) (FR)

Comme d'habitude, tout ce que Ron touche reste unique, comme ces superbes murmures de pensées que l'on retrouve sur cet album

1 Songs for an Autumn Moon 37:18

2 A Gentle Night 5:10

3 Lingering On 4:29

4 Half Moon Rising 10:55

(CD 57:53) (V.F.)

(Ambient, spiritual and clanic EM)

Un des grands artisans, sinon le plus influent, de la Netherlands School, Ron Boots troque ses habits d'architecte des rythmes séquencés lourds et entraînants pour des structures un peu plus ambiantes, un peu plus méditatives. Si on prête une oreille attentive aux œuvres de Ron Boots on constate que le synthésiste d'Eindhoven affectionne les passages ambiants qui contrebalancent ses impétueux mouvements de séquences sur la plupart de ses albums. Et pour ne pas confondre ses fans, un geste extrêmement honorable selon moi, Ron Boots offre un tout premier album ambiant sous le très poétique pseudonyme de Derelict Thoughts (Pensées abandonnées). Présenté dans une mince et très belle pochette de carton, AUTUMN MOON est construit autour des 2 performances, gonflées d'improvisations, de musique ambiante que le magicien derrière Groove nl a présenté à Amsterdam et La Haye. Et comme tout ce que touche Ron Boots, c'est loin d'être ordinaire.

Songs for an Autumn Moon part ce bal pour ambiances méditatives avec une pléthore de lignes de synthés qui s'empilent et s'entrelacent dans un intense canevas ambiosonique dont l'épaisseur occis toutes possibilité de lueurs, même nitescences. Le mouvement est lent et sculpté dans des vents creux avec des reflets irisés qui se transforment étrangement en discrètes, voire absentes, psalmodies gothiques. Ces chants, dont évanescence fait travailler l'imagination, se transforment en longues complaintes de guerres hurlées à travers un gros cornet païen. Des poussières de carillons s'élèvent, maquillant un tintamarre abstrait dont la fascination réside dans sa capacité à leurrer l'oreille. On entend aussi des cognements très discrets. Des cognements qui peu à peu sculptent un rythme solitaire totalement cerné par cette surabondance de lignes de synthé aux couleurs de la solitude. Songs for an Autumn Moon dévoile ses petits moments intimes par sections interposées où les moments d'ambiances sombres et méditatives débouchent dans des phases plus festives. Des riffs de percussions redessinent un rythme errant dont les battements réguliers forgent une délicate transe clanique. On entend une première bribe d'harmonie rôder dans cette éclaircie alors que tranquillement Songs for an Autumn Moon franchit la barre des 20 minutes avec une exotique approche éthérée en caressant un doux moment de sérénité qui nous amène dans des lieux plus éclairés. Et le rythme se tait. Nous sommes à l'orée d'une rivière de prismes où l'eau étire ses petites vaguelettes en harmonies célestes, rappelant fort bien que l'une des grandes influences de Ron Boots est bel et bien Steve Roach. Et si on en doute, le très beau Half Moon Rising est là pour le prouver.

Avec ses larmes de synthé remplis de soupirs mélancoliques et ses éparses notes de piano perdues dans une brume sibylline, A Gentle Night fait l'effet d'une douloureuse méditation au clair de lune. Noir, intense et très saisissant! Toujours dans le même registre de la mélancolie mais avec une approche plus harmonieuse, moins planante, où des percussions tambourinent un rythme absent, Lingering On offre des accords de guitare très solitaires qui brillent dans des ambiances tissées de soie noire. Peu à peu, on se dirige vers le très surprenant Half Moon Rising et ses vents creux qui soufflent sur une plaine désertique. Très tôt, un rythme galopant soulève un nuage de poussières organiques. Respectant la signature des œuvres solos de son alter ego, où on entend toujours un passage ambiant, Derelict Thoughts rend la monnaie de la pièce à Ron Boots en présentant un titre assez agité. Et si ça c'est de l'ambiant; j'en écouterais tous les jours. Certes le rythme est statique. Haletant sous un intense canevas de percussions d'un genre plutôt clanique, il tressaille des milles morsures de ces percussions. Le ciel est marbré de discrets accords de guitare, de vents ululant et de réverbérations glauques où on jurerait entendre les gutturales lamentations des shamans du désert Ouest Californien. Oui! L'allusion avec Steve Roach est pleinement justifiée! Tout simplement superbe, ce titre aux fragrances tribales clôture un album d'ambiances surprenantes dont le crescendo de la nitescence sur les pénombres atteint son paroxysme avec Half Moon Rising.

Sylvain Lupari (19 Juin 2014) *****

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