“J'ai eu ma dose de frissons en découvrant les multiples charmes de cet album”
1 Dinoflagellates 6:34
2 Anglerfish 5:08
3 Fireflies 7:34
4 Waitomo Caves 7:30
5 Moon Jellies 6:48
6 Milky Seas 7:54
7 Photophore 6:14
8 Strange Creatures 6:20
9 The Beauty in Things 7:06
10 Fungi 7:26
(CD Digipack/DDL 68:34)
(Ambient Soundscapes)
J'avais hâte d'entendre du nouveau matériel de Divine Matrix. Son dernier album, Sequencer Drift, m'avait laissé un peu sur mon appétit. Faut dire que tenter de faire mieux que son excellent Journeys n'était pas une mince affaire. Et est-ce que BIOLUMINESCENCE répond à mes attentes? Steve Barnes offre ici un album atmosphérique inspiré des créatures et organismes vivant dans les océans qui émettent des énergies lumineuses. Donc, c'est près de 69 minutes de musique d'ambiances, océanique comme organique, imbibées d'une texture nocturne où la faune océane brille de ses milles feux. La découverte de BIOLUMINESCENCE se fait par écoute. Toujours très mélodieux dans sa façon de faire, Steve Barnes fait chanter ses synthés avec des airs tantôt tendres, plein de nostalgie comme aussi très sombres. Ses arrangements sont poignants et le compositeur possède l'art de donner à sa musique la vision de ses titres. C'est pourquoi qu'on accroche à certains titres dès la première. Le seconde nous fait découvrir d'autres petits bijoux et la troisième écoute confirme que nous écoutons un très bel album où les essences de Steve Roach et Michael Stearns remplissent nos oreilles avec cette signature mélodieuse unique à Divine Matrix.
C'est comme une flûte d'un bateau. Nous sommes sur l'eau à explorer les fonds marins avec un regard microscopique. Les clapotis d'eau s’entrechoquent dans une danse passive où des sifflements et des pépiements se perdent dans cette rosée sonore qu'est cette nappe légèrement bourdonnante qui ondoie paresseusement dans l'ouverture de Dinoflagellates. Vient ensuite un chant du synthé. Le timbre est solennel et pourtant très émouvant. L'émotion nous visse à nos écouteurs avec cette mélodie sibylline qui augmente sa flamme passionnelle en surfant entre les ondoiements astraux. Il y a de l'agitation silencieuse ici, comme ces mouvements brusques et imprévisibles des Dinoflagellés. On les entend se déplacer entre les airs du synthé, les clapotis des eaux et cette ombre ondoyante qui sert d'assise à ce très beau Dinoflagellates. On croirait entendre du Michael Stearns de l'époque M'Ocean. Anglerfish propose aussi un chant du synthétiseur qui flotte en roulant sur lui-même dans une texture de musique ambiante ténébreuse, qui reflète un peu l'habitat de ces poissons-pêcheurs. Le chant est du genre envahissant avec deux tonalités, une limpide et l'autre plus sombre, qui ondulent dans un décor où les miroitements sous-marin font étinceler autant de raies bleuâtres que blanchâtres. Une basse étend quelques soupirs ici et là, ajoutant encore plus de nuances sombres au titre. Une ombre montante bourdonne aussi pour introduire Fireflies. Nous restons dans les mêmes teintes musicales avec un séquenceur ici qui sculpte une procession astrale qui s'élève au-dessus de somptueux arrangements orchestraux et des nappes de voix séraphiques et/ou de chants de sirènes océaniques. Le mouvement est délicieusement hypnotique avec juste assez de nuances pour percevoir une légère fluctuation dans la ritournelle sphérique. Des arpèges se mettent à carillonner, sculptant une mélodie évasive qui épousera la marche du séquenceur pour se fondre dans les harmonies du synthé. La flore, le décor tonal du titre est rempli d'arpèges et d'effets qui miroitent tout au long de la procession de Fireflies, y compris de beaux effets organiques qui ressemblent à une forme de communication entre les lucioles. Ces 3 premiers titres sont une très belle invitation à découvrir cette nouvelle odyssée musicale de Divine Matrix. Waitomo Caves coule avec quiétude, comme une lente avancée à travers les passages de cette grotte aux vers luisants sise en Nouvelle-Zélande. Le panorama est inondé par le passage d'éléments filants, comme des woosshh et des waasshh, qui sifflent dans les arrangements orchestraux et au-dessus de nappes de voix séraphiques. Des arpèges (ou des accords de guitare) éclosent ici et là, tissant une vague mélodie qui s'appuie sur une basse plutôt discrète. Ça me fait penser à du Darshan Ambient très mélancolique. Tout est en suspension dans ce titre. La musique reflète ce tranquille voyage à la barque où la luminosité des larves illumine des cieux souterrains de couleur émeraude, comme de bleu cobalt.
Moon Jellies est un titre crépusculaire qui évolue comme les lentes propulsions de ces méduses de nuits. Le timbre est sombre, quasiment guttural avec de lentes orchestrations, de lents frottements d'archet sur un violoncelle, qui s'extirpent d'une ouverture pourtant plus épurée. Des éléments de percussions et des arpèges tintent ici et là, reflétant cette luminosité changeante de ces animaux gélatineux. Une ombre de basse rampe dans le décor et le synthé tisse une mélodie vampirique qui étend son voile d'ensorcèlement avec une tonalité sibylline. Un remous sonore change la dynamique du titre vers sa 4ième minute, initiant une impulsion plus agressive avec des éléments percussifs et des arpèges dont les chatoiements se noient dans des nappes de voix sous-marines. Une mélodie asiatique en émerge, jouée par la sensibilité d'un synthé qui se métamorphose en un violon chinois. Steve aime jouer sur le degré d'émotions qu’il peut soutirer de ses compositions. Comme ces fascinants clairons d'un autre univers dans Milky Seas qui tissent les nappes orchestrales glissant vers les abysses. Dans un titre atmosphérique sans ressources rythmiques, mis à part ces quelques riffs de guitare à la recherche de structure et qui laissent planer une mélodie à finir, la musique dépeint la noirceur des profondeurs abyssales tout en irradiant cette couleur blanchâtre qui donne cette texture translucide à ces mers laiteuses. Si la mer a ses fantômes, ils sont ici! Photophore est le titre le plus agité de BIOLUMINESCENCE. Des battements caoutchouteux font résonner une structure de rythme ambiant que le séquenceur surclasse avec un frénétique mouvement papillonnant. Les séquences ont un timbre lumineux, donnant de vifs reflets à ce rythme stationnaire. Des nappes de synthé aux timbres ectoplasmiques, des nappes de voix, des éléments organiques et divers effets électroniques complètent le décor. Un titre qui ressemble beaucoup à du Steve Roach! L'univers de Strange Creatures se découvre avec des effets sonores qui sont aspirés par des pulsations de ventouses. Des accords tentent de créer une procession aquatique dans un décor rempli d'effets sonores qui se fondent à des ondes de synthé sombres qui chevrotent dans leurs lentes ondulations. Hormis ces ondes, le synthé tisse des chants de trompettes presque apocalyptique. The Beauty in Things est de la même dimension que le très beau Dinoflagellates. Les arrangements sont hyper poignants, et une mélodie cadencée surgit de ses abysses autour de la 4ième minute. Un pur délice! Et pour l'âme, et pour les oreilles. Construit autour de multilignes de synthé aux couleurs océaniques contrastantes, Fungi est un titre atmosphérique qui avance par impulsions. Par des élans de remous qui structurent son rythme lent où éclot une délicate mélodie scintillante. Des nappes de voix de sirènes et d'orchestrations complètent son décor. Le titre évolue par phases changeantes, se dirigeant même vers un bon Berlin School avant d'être engloutit par une masse sonore bourdonnante.
Et alors, est-ce que BIOLUMINESCENCE répond à mes attentes? Absolument! Bien que Divine Matrix s'éloigne de son style de rock électronique mélodieux, il conserve ce cachet émotionnel qui donne tant de profondeur à sa musique. Quelle soit rythmée ou ambiante. J'ai eu ma dose de frissons en découvrant les multiples charmes de cet album qui possède ces petites perles qui nous incite constamment à y revenir.
Sylvain Lupari (21/11/23) ****¼*
Disponible chez AD Music
(NB : Les textes en bleu sont des liens sur lesquels vous pouvez cliquer)
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