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Writer's pictureSylvain Lupari

FILTER-KAFFEE: 104 (2019) (FR)

C'est un superbe Berlin School qui lie les 5 décennies de styles, de tons, de rythmes et d'ambiances de Tangerine Dream

1 Belgian Romance 23:26

2 Another Wasteland 16:19

3 Een Elektronisch Winterlandschap 17:05

4 Radiant Der Lyriden 17:12

(CD/DDL 74:12)

(Berlin School)

Un peu comme des producteurs de café peu satisfaits de la dernière récolte et de la transformation des grains, on se souvient que Filter-Kaffee 100 était un préquel aux 2 premières tasses de Frank Rothe et Mario Schönwälder, 104 est proposé avec une torréfaction sonore nettement rehaussée. En fait, ce dernier album du duo Allemand est de la taille des meilleurs albums de 2019 avec 4 longs titres aux évolutions minimalistes qui servent d'axes rythmiques à des séquenceurs géniaux supportés par de bonnes percussions, parfois orageuses, et d'audacieux effets percussifs. Brume, nappes de voix, lignes de flûtes, divers effets électroniques et de somptueux solos de synthé complètent cet album magnifiquement conçu par deux vétérans qui repoussent leurs limites nettement plus loin que Filter-Kaffee 102 qui était la meilleure tasse de café de Filter-Kaffee.

C'est dans un tintamarre introductif usuel à la signature du label Manikin, soit résonnement de gongs, effets percussifs métalliques, gargouillements et murmures d'orques ainsi que des pads de voix sibyllines, que s'installe Belgian Romance. Des violons viennent faire la paix avec les auditeurs qui assistent à cette performance du duo lors du Cosmic Nights Festival de 2017. Cette ouverture méphistophélique est imprégnée d'un décor digne d'un ambiant sombre psychédélique avec des nappes sulfureuses porteuses de soufre. Une ligne de rythme émerge autour des 5 minutes. Son approche ondule lentement tout en zigzagant avec une amplitude axée sur une gradation bien calculée. Une ligne plus limpide éclot quelques trois minutes plus loin et son dandinement porte ombrage à la première ligne de rythme. Les nappes de brumes sont toujours porteuses de bruissements métalliques hurlant, dont certains se transforment en solos aériens. Et tout à coup, le ciel de Belgian Romance s'obscurcit avec une épaisse membrane métallique d'où explose une orage électronique qui remplira nos oreilles d'un magnifique nectar sonique. Les prochaines minutes sont orageuses avec une structure totalement sauvage. Grondements, cognements impulsifs, explosions électrique, effets électroniques et solos criants recouvrent cette ligne de rythme soutenue par les alternances de deux lignes du séquenceur et d'une autre ligne aux tonalités plus organiques qui va et vient par intermittences. Et cette structure riche en diversité est tabassée par percussions orageuses et des effets d'écho de métal contre métal. Les solos de synthé dessinent des points lumineux bleu acier et des chants d'ectoplasmes dans ce tintamarre électronique soutenu jusqu'à l'orée des 22 minutes. La première tasse de café est infusée! Another Wasteland est un titre aussi incroyable que Belgian Romance. Ses 6 premières minutes ont beaucoup de similitudes, au niveau rythme et ambiances. C'est lorsque le séquenceur fait entendre une structure bondissante avec des reflets de radiations que l'on remarque son approche plus analogue. En outre, les nappes philharmoniques des années 76-77 ne laissent plus de doutes, nous sommes bel et bien dans les territoires de Tangerine Dream. Le rythme coule avec plus de vélocité et active nos neurones qui nous font taper du pied. Saccadé et linéaire avec de fines modulations dans son axe, il se met à subdiviser ses ions qui driblent maintenant avec la furie des années 83. On entend des influences de Poland, alors que les synthés roucoulent sur des harmonies des années Baumann pour se diriger vers une phase nettement plus audacieuse. Vif et étourdissant, Another Wasteland flirte avec ces 3 bonnes périodes de Tangerine Dream pour aboutir dans une finale explosive qui éveille en nous celle pharaonique de Horizon. Superbe!

Een Elektronisch Winterlandschap est un titre plus ambiant, quasiment dormitif. Il naît d'une ouverture toujours aussi bigarrée de tonalités orageuses. Les effets de réverbérations emplissent nos oreilles d'un nectar chthonien dont les parfums s'apparentent aux ouvertures des 2 premiers titres de 104. Une agréable mélodie dessinée sur des arpèges tintant dans une enveloppe de sérénité surgit de ce brouillard radioactif. Minimaliste, elle flotte avec une vision ensorceleuse sur une faune tonale animée par des solos de synthé qui ornent un panorama sombre et plein d'intrigues. D'autant plus que cette comptine angélique pourrait facilement se transformer en une plus horrifique (genre Halloween). Elle flotte sinueusement et serpente un décor où poussent des pulsations basses, flottent des effets électronique et volent des filaments de solos de synthé rôdant comme des spectres errants. On fait jouer cela entre les murs sombres des couloirs d'un château, et on aurait des frissons! Mais, je m'y suis aussi endormi dessus. Après un râlement industriel, des nappes de synthé entrecroisent leurs chants dans une ouverture d'ambiances chthoniennes qui tissent les premières minutes de Radiant Der Lyriden dans un bon ambiant ténébreux. Si certaines nappes sont chloroformiques, d'autres sifflent et certaines étendent des chants saccadés dans cette ouverture remplie de mélancolie pour les premiers albums de Tangerine Dream, comme en font foi ces immenses nappes de mellotron aux couleurs tonales aussi séduisantes qu'effrayantes. Un mouvement d'un séquenceur classique couche une première ligne de rythme aux couleurs d'antan.

C'est le début d'une structure rythmique qui commence par une cadence hypnotique pour évoluer vers une phase énergique où les deux extrêmes, analogue et numérique, convergent vers une même fureur, mais avec des résultats différents. Disons que c'est aussi fou que Another Wasteland mais dans une vision moins frigorifiée. En fait, tout se passe au niveau des séquenceurs et de leurs multiples liens rythmiques qui tissent une structure alambiquée aussi entraînante pour les neurones que celles des années 73-77. Ouf!!! C'est un superbe Berlin School qui termine cet impressionnant album de Frank Rothe et Mario Schönwälder. C'est dans mon Top 5 de 2019!

Sylvain Lupari (26/01/20) ****½*

SynthSequences.com

Disponible au Manikin Bandcamp

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