“Solomode met un terme à cette trilogie de ce mélange entre le vintage et le moderne New Berlin School entrepris avec le superbe Solodreams”
1 Ultramode 12:55
2 Solomode 19:44
3 Polymode 17:49
4 Melomode 9:34
5 Computermode 18:17
(DDL/CD-r 77:52)
(Retro and New Berlin School)
SOLOMODE est la face cachée de Solodreams. Composée à la même époque, la musique restait cachée dans des enregistrements sur bandes que le temps a égaré dans les boites musicales de Frank Klare. Avec la renaissance de Solodreams, SynGate a eu la bonne idée de dépoussiéré ces bandes, confiant la remastering et le mixage à Pete Farn. Le résultat est une trilogie de CD issue de la même époque qui nous présente une œuvre absolument géniale dont les restants sont aussi fascinants que le plat principal.
Ultramode nous mets les oreilles à l'affut avec une lourde ligne bourdonnante qui sert de long ruisseau résonnant à des brises de synthé aux souffles musicaux qui nous sont très familiers. Un chapelet de séquences s'échappe et dessine un rythme pulsatoire finement saccadé qui hoquète sous l'égide des solos de synthé aussi rêveurs et spectraux que la belle période analogue de Klaus Schulze. Le rythme de Ultramode suit sa courbe minimaliste avec une subtile gradation dans le mouvement dont l'intensité est plus nuancée par ces solos railleurs qui tentent d'endormir les mille et un spasmes d’un rythme hypnotique qui épuisera ses 13 minutes sous les inlassables attaques des solos torsadés. La pièce titre s'envole délicatement avec un magma de couches aux tonalités et aux fragiles harmonies hybrides. On entend des lignes plus musicales élaborées des solos torsadées qui se contorsionnent dans les vapeurs chtoniennes des lentes couches de vieil orgue alors que tout délicatement, pulse un sobre mouvement linéal. Ce rythme absent est comme un métronome ambulant qui se dandine dans les mailles d'une bête aux mille câbles soniques. Un très beau mouvement de séquences vient égayer la frugalité de Solomode et de ses ambiances flottantes, mettant en relief un rythme circulaire qui trempe le bout de sa musicalité dans une mare sonique aux couleurs du soufre. Ces harmonies gambadent, fuient et reviennent galoper en une série de petits cercles autant rythmiques qu'harmoniques, un peu comme effrayées par cette ambiance tétanisante qui jalonne une structure plus ambiante et passive qu'animée.
Polymode offre une structure de rythme plus enlevante avec une série de séquences qui tambourinement avec fureur dans les tambourinements des percussions. C'est un rythme contagieux, aussi violent qu'hypnotique, qui embrasse un peu la hargne de Monomode, où la vélocité des séquences et des percussions maintient le cap sur une infernale danse verticale teintée bien plus de nuances harmoniques que rythmiques. Il y a de quoi là-dedans pour démembrer le cou. Comme toujours, Frank Klare prend un soin jaloux de tapisser ses longues structures minimalistes avec des bizarreries ectoplasmiques qui rôdent comme des chauves-souris érudites, de même que des solos vampiriques échappés des orgies de spectres que l'on entend dans les Body Love de KS. C'est très bon, même si très endiablé. Et la ressemblance avec Stardancer, dans la conception et non dans le produit fini, prend toute sa signification avec sa finale infernale. Toujours arqué sur des mouvements de séquences qui pétillent sur de lourdes pulsations métronomiques, Frank Klare réussit toujours à élaborer des structures de rythmes dont les nuances font les charmes. Prenons Melomode et sa très belle mélodie ectoplasmique qui flotte sur un rythme lourd où séquences, pulsations et percussions tissent les pans d'un rock électronique teutonique, minimaliste et hypnotique. Je dois admettre par contre que la mauvaise qualité de l'enregistrement d'origine affecte un peu la tolérance à l'écoute. Et plus on avance dans ce SOLOMODE et plus on entend les réminiscences de Monomode, ainsi que les influences de l'ère digital de Klaus Schulze. C'est le cas avec le monumental Computermode qui, hormis son intro truffée de gargouillis d'extra-terrestres, embrasse les rythmes teutoniques de Dziekuje Poland. Si le rythme est martelé de bonnes percussions mathématiques, les ambiances sont issues d'une cacophonie expérimentale où tout se tient par magie. Frank Klare saute du coq à l'âne avec du New Berlin School, du bon rock cosmique (est-ce que j'entends une guitare mordre ses riffs?) et du rock électronique. C'est un festin sonique pour oreilles hasardeuses. Encore là, c'est dommage que le tout provienne de vieux enregistrements sur cassette car le son se dégrade par endroits. Mais n'en demeure pas moins que l'on peut admirer à satiété le grand talent de Frank Schulze. Oups…Klaus Klare. M'enfin…vous avez compris.
Solodreams, SOLOMODE et Monomode sont 3 œuvres indissociables dont les grandes lignes musicales tournent autour des grandes œuvres de Klaus Schulze, tout en y ajoutant des thématiques rythmiques plus près des visions de Frank Klare. C'est un superbe croisement entre le Berlin School rétro et le New Berlin School où je ne m'expliquer comment cette musique a pu échappée à la timide invasion des marchés internationaux amorcé par Software et le label Innovative Communication dans le milieu des années 80. Quoique SOLOMODE ne soit pas Solodreams ni Monomode, il y a de la très grande MÉ qui vaut amplement son achat. Et n'oubliez pas, lorsque vous achetez Solodreams et SOLOMODE, Monomode vous est offert gratuitement. C'est toute une façon d'aborder l'univers de Frank Klare qui sera toujours fidèle à ses racines et ses influences.
Sylvain Lupari (24/10/13) ***½**
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