“L'art de se réinventer sans rien perdre de ce qui faisait nos charmes!”
1 Leaving the Solar System 12:50
2 Interstellar Travel 10:49
3 Borderland 8:48
4 Habitable Zone 6:57
5 Terra Nova 9:26
6 Alien Shores 10:50
7 Alien Sunset 9:04
8 We Will Stay 10:17
(CD/DDL 79:04)
(Cosmic Rock, Berlin School)
Par le titre, on comprend que nous quittons le système solaire. Pourtant, Leaving the Solar System exploite les ambigüités d'une introduction jouant sur les deux tableaux, un côté cosmique exploratoire et l'autre un peu plus prismatique. Un peu comme si le Cosmos pouvait avoir ses mythes et histoires de tueurs psychopathes sur ses grandes routes intersidérales. Des battements discrets effleurent les peaux de tambours lorsque depuis quelques secondes, des effets de murmurations enveloppent les ambiances. Un piano, aussi distant que les battements, égare des accords un peu avant la 5ième minute. Ses notes mijotent sur le dos de ces coups assourdis alors qu'une série de riffs élabore une stratégie rythmique qui fait face à des vents hurlants. Subitement, Gert Emmens investit l'univers Tronestam avec des modulations dans les vents de brume, le son des synthés et une tonalité de guitare dans les accords de clavier-synthé. La mélodie qu'ils tracent est évasive et alors qu'un effet d'accentuation se prépare, des effets cosmique-organiques percent les haut-parleurs. Les percussions se libèrent et supportent une texture ambiante avec des ondes de synthé apocalyptique qui balaient les horizons d'un prélude à une autre histoire musicale des contes cosmiques de Johan Tronestam. Avec des ouvertures plombées dans la tourmente de nouvelles expéditions afin de découvrir d'autres planètes et systèmes du Cosmos, COSMIC STEPS suit la courbe des 3 dernières histoires d'expéditions cosmiques du musicien des Îles Åland. Comme sur Cosmic Drama et Next Steps, cette nouvelle aventure est conçue autour de 8 titres aux nébuleuses introductions remplies de vents cosmiques, des voix astrales et d'effets sonores qui enveloppent souvent le tiers du titre, et parfois même un peu plus. Nous sommes donc littéralement plongés dans les visions de Johan qui profite des autres minutes de ses titres pour faire avancer ses expéditions dans un univers de sono diversité nettement plus riche et passionné depuis son magnifique Midgard en 2018.
On parle beaucoup des séquences et des solos dans l'univers Tronestam, mais on oublie trop facilement ces bancs de brume qui se déplacent avec des fluides de voix artificielles murmurées, lorsque non chantées, entre la passion de l'éthérisme ou de l'ésotérisme, ou encore avec des orchestrations soporifiques qui profitent des modulations dans les mouvements flottant vers une dérive poétique. Mais il y a toujours un mais! Interstellar Travel débute sans préambule avec une phase de rythme construite autour de deux suites du séquenceur; 1-2 et 1-2-3-4. Un dense nuage de brume dévoile ses violons qui font de lents staccatos s'évaporant avant de se compléter. Les empreintes de Emmens réapparaissent lors de la première transition du rythme qui devient plus fluide et plus soutenu avec un séquenceur en mode Berlin School. Il y a du dynamisme comme de la passion dans ce rythme propice à accueillir de doux solos cosmiques. Le mouvement insère une nuance ici et là, donnant cet élan dont les oreilles ont besoin pour éviter l'ennui de la redondance. Borderland suit avec une belle ballade lunaire d’une ligne d'arpèges roulant sur les deux côtés du clavier. Les percussions qui viennent donnent un aspect plus techno que rock. Une autre texture de rythme s'insère pour structurer ce très bon titre qui accroche à la première écoute. Il y a beaucoup de bons rocks cosmiques dans COSMIC STEPS. Des rocks assaisonnés de divins solos de synthé comme celui de Habitable Zone qui est plus fluide et un brin plus rapide avec un fascinant entrain au niveau des percussions. L'effet d'écho dans les riffs de clavier compacte la vélocité de la structure alors que des nappes de voix et des fredonnements astraux un peu sombres injectent un petit côté chtonien à cet environnement cosmique.
Terra Nova débute avec un 2 minutes d'ambiances et des poussières dans une zone d'explosions assourdies par le mouvement dérivant d'une navette voulant se déposer. Les harmonies flûtées ajoutent tendresse avant qu'un rythme galopant se dessine pour propulser la musique dans la zone des rock ambiants nourrie par des orchestrations de brume et de bons solos avec une touche de lamentation qui les rend assez poignants. Ici aussi des nappes de voix dissidentes fredonnent pour une amnistie spatiale, même avec ces gros bourdons attaquant en cercle stroboscopique. Le titre fait bon usage de ses 9 minutes en prenant des cheminements variés mais toujours interconnectés afin de nous donner le plus possible des variations rythmiques du répertoire de Johan Tronestam. Il y a plusieurs pièges pour les oreilles dans ce titre très fort de l'album dont une superbe approche harmonieuse qui nous ensorcèle avant la finale! Alien Shores propose une ouverture d'ambiances surnaturelles et cosmiques lorsque les vagues rétrécissent constamment la marge de sable de son rivage pour un peu plus de 3 minutes. C'est 15 secondes après ce point que le séquenceur libère sa ligne de rythme trottinant d'un pas à l'autre. D'une oreille à l'autre, sous une brume musicale qui dissipe peu à peu son emprise. Des percussions se prononcent quelques 2 minutes plus tard, solidifiant cette base de rythme qui serait ambiante. Aussi ambiante que les harmonies d'un synthé toujours complice de ses solos. Il y a un petit zest de rock progressif dans ce titre qui allume une troisième vision rythmique après avoir entendu ce chœur norvégien louanger les dieux d'Asgard. Alien Sunset mange plus de la moitié de son temps avant de voguer de son rythme doux dans les sphères des rock cosmiques ambiants ornés de beaux solos lyriques. Beaucoup à l'image de ses phases de rythmes évolutives, JT sait comment faire progresser ses paysages d'ambiances en y insérant divers éléments qui alimentent notre soif d'écoute et qui brisent l'effet de lassitude de ces mêmes oreilles. Une autre ligne d'arpèges séquencés déroulent sa spirale d'oscillations harmonique qui sied bien avec cette mélodie fantôme dont on cherche toujours l'origine. We Will Stay débute avec une onde de réverbérations pulsatrices dans une zone industrielle. Des arches de sons dérivent tout autour, nous amenant vers une phase où le rythme tambourine sans passion, laissant plutôt le synthé exprimer ses pensées avec ses harmonies flottantes qui deviennent des beaux chants gracieux lorsque le rythme secoue ces ambiances autour de la 6ième minute. Bouclant ainsi la boucle d'un très bel album riche de sa sono diversité et ce depuis les premiers souffles de COSMIC STEPS.
L'art de se réinventer sans perdre une parcelle de ce qui faisait son charme! On peut dire que Johan Tronestam exploite cette maxime avec grâce et savoir dans ce nouvel album fraichement sorti de Groove nl qui, encore ce printemps, trouve les recettes pour rafraichir notre désir d'entendre de la nouvelle MÉ attisée par le Berlin School. Oui les ouvertures peuvent êtres longues comparées aux minutes restantes pour exploiter les différents paliers rythmiques de COSMIC STEPS. Sauf qu'ici, l'attente vaut la peine avec des rythmes qui valent l'attente. Et lorsque ces attentes sont structurées dans la luxuriante créativité de son auteur, cette attente vaut les rythmes…Un excellent album de Johan!
Sylvain Lupari (29/06/04) ****¼*
Disponible chez Groove nl
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