“Si vous aimez les longues processions séquencées et les structures minimalistes à la Berlin School, Long Distances est fait pour vous”
1 Long Distances 26:33
2 Metropolis 41:11
3 September Moods 7:10
(CD/DDL 74:54)
(New Berlin School)
Une des beautés de la MÉ est sa capacité à exploiter les structures minimalistes tout en y ajoutant d'autres structures parallèles, ambiantes, rythmiques ou/et mélodieuses. Étalé dans le temps, LONG DISTANCES est le fruit de longues sessions d'enregistrements nocturnes, excepté pour Metropolis où Keller & Schönwälder plonge dans de savoureuses processions séquentielles. Des séquences brillantes qui se dédoublent, se décroisent et s'enchevêtrent dans un fin désordre rythmique ou dans une délicate obsession hypnotique. Des séquences qui sont nappées d'une intéressante faune synthétisée où les solos hybrides côtoient des souffles de brume et des effets sonores cosmiques. Bienvenue dans le très beau carrefour des longues structures minimalistes aux lentes évolutions et aux latentes éclosions. Bienvenue dans LONG DISTANCES, le romantique et ensorcelant univers musical de Detlev Keller et Mario Schonwalder. Un univers unique à ce duo nostalgique qui continue de charmer dans l'ensorcelant et envoûtant monde de la Berlin School.
Un longiligne souffle ténébreux introduit les 26 minutes de la pièce-titre. Un long souffle caverneux, traversé par des ondes spectrales et irisées, sillonne un long corridor sinueux et converge tranquillement vers les premiers balbutiements du séquenceur où une fine séquence émerge des sonorités cosmiques pour sautiller faiblement dans une faune sonore aux tonalités composites. Des stries, des strates et des effets sonores cosmiques. Des couches morphiques et des accords limpides gambadant dans les empreintes du séquenceur recouvrent cette lente procession. Mystérieux et claustrophobe, Long Distances poursuit sa lente et longue ascension minimaliste en se recouvrant de ses mélodies et des ambiances parallèles sur un mouvement dont les subtiles variations sont noyées par de fins grésillements, des chœurs errants, des nappes et des brumes irisées de mellotron ainsi que de brefs solos de synthé. Des solos fantomatiques, aux arômes de Tangerine Dream, qui nous ramènent indéniablement vers les envoûtantes et mystérieuses structures minimalistes de Klaus Schulze et de la Berlin School de la fin des années 70. Ses solos vont et viennent sur cette lente procession hypnotique, aussi bien que celle de Metropolis, dont les dernières minutes sont nourries par des souffles et des effets sonores métallisés, amenant un crescendo dramatique qui se déverse dans les premières modulations de Metropolis.
Enregistré en concert, ce long titre de 41 minutes est inspiré du film culte du réalisateur Allemand Fritz Lang. Suivant la brume tétanisée de Long Distances, des notes de piano émergent des brumes abyssales et dessinent une douce mélodie qui dépose délicatement ses notes au-dessus d'une onde irisée et torsadée. Peu à peu cette ténébreuse intro dégage un filet plus chaleureux avec ce piano qui trace des mélodies hésitantes dans une lourde bruine iridescente et dans de chaleureuses nappes ouatées, alors que des cerceaux métalliques s'entrechoquent et papillonnent nerveusement. Nous sommes à la 10ième minute et Metropolis s'éveille au son de lourdes pulsations industrielles pour structurer une rythmique qui sera en constante rébellion entre son tempo hypnotique et son reflet anarchique. De menaçantes stries ondulantes recouvrent les réverbérations de ces pulsations, plongeant ce long titre vers des séquences nerveuses qui sautillent fébrilement sous de mystérieuses vocalises nocturnes. Les séquences s'entrecroisent et trépignent dans le sillon de leurs échos avant d'embrasser une phase névrotique et pulser frénétiquement dans un étonnant désordre rythmique. Ces brusques éveils séquencés sont la pierre angulaire de ce long titre qui présente un envoûtant mouvement séquentiel dont la structure première est secondée par des séquences pulsatoires arythmiques. Des séquences tantôt fluides et tantôt désordonnées tissent des cadences polyrythmiques sous les ailes de bons solos aussi calculés qu'improvisés, dans la veine de ces longues kermesses hypnotiques du Berlin School. Ces solos suaves et spectraux échappent des sonorités cosmiques à mesure que l'amplitude du mouvement tergiverse alors que des percussions électroniques se greffent aux séquences, amplifiant encore plus le rythme et son désordre qui coule sous de superbes solos fantomatiques, des lamentations ocrées et des voix de zombies métallisées. September Moods met un terme à cette étonnante procession séquencée et clôture LONG DISTANCES avec un fin mouvement du séquenceur qui se dandine sous les notes d'une belle ligne de basse et de suaves solos aux sonorités de saxophone solitaire, avant d'embrasser les souffles morphiques d'une brume mellotronnée qui pousse des étoiles cristallines hors de portée d'oreilles. Mais ce mouvement revient peu à peu, histoire de raviver cette flamme rythmique qui est la prémisse envoûtante de ce bel album de Keller &Schonwalder. Vous aimez les longues processions séquentielles nourries de fines approches harmonieuses?
Vous aimez les structures minimalistes habillées d'une belle et tranquille musicalité? Vous vous ennuyez des longues structures hypnotiques propres à la Berlin School? Alors LONG DISTANCES de Keller & Schönwälder vous est tout désigné. C'est un album étonnamment envoûtant où les séquences et percussions modulent des rythmes aussi hypnotiques que sauvages sous des brumes irisées et des solos de synthé aux tonalités hybrides. Un album qui plaira assurément aux fans du duo Allemand, ainsi qu'aux amateurs de longs titres aux parfums de la Berlin School.
Sylvain Lupari (02/11/11) *****
Disponible au Manikin Bandcamp
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