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Writer's pictureSylvain Lupari

Klaus Schulze: Body Love 2 (FR)

“Je vous recommande fortement cet album parce que je crois que Schulze a composé en Nowhere-Now Here sa plus belle pièce de musique des années 70”

1 Nowhere - Now Here 29:02

2 Stardancer 2 14:15

3 Moogetique 13:15

4 Buddy Laugh (A Rock'n'Roll Bolero) 23:16

Revisited Records SPV 78852 CD

(CD 79:33) (Berlin School)

Ce qu’il y a d’intéressant à propos des rééditions c’est l’histoire et aussi la possibilité de retoucher certaines chroniques que l’on a écrites un peu à la hâte. Ainsi, dans le livret de celle-ci on y apprend que nous devons cet album à l’insistance des dirigeants d’Island Records qui, après Mirage (LP Island 9461), voulaient un album dans la veine de Moondawn et Body Love. Pas trop rébarbatif aux demandes de Chris Blackwell, Klaus Schulze décida d’offrir un album qui aurait les mêmes couleurs rythmiques que Moondawn et Body Love. Il intitula en toute simplicité ce nouvel opus; BODY LOVE 2. Donc, revoici une chronique toute neuve pour une réédition toute neuve qui vaut absolument le détour.

Et pourtant ce 9ième album de Schulze partait drôlement comme un space music à la Mirage avec un synthé qui libère de superbes ondes cosmiques. Aux premiers souffles de Nowhere - Now Here nous sommes en terrain connu. Sans avoir les mêmes structures atmosphériques et rythmiques que dans Body Love, Nowhere - Now Here offre une intro flottante truffée de sonorités galactiques uniques à la créativité de Schulze. Un synthé chante en arrière-plan. Il chante d’un délicat filet pour siffler une superbe mélodie spatiale dont les mouvances spectrales se détachent graduellement pour embrasser une séquence aux pulsations d’une ligne de basse qui ondule et sautille légèrement auprès des cymbales de Grosskopf. Les percussions tombent. Factieuses elles forment une parfaite symbiose avec la sensualité d’un suave tempo cosmique alors que les solos de synthé hurlent et pullulent tout autour d’une structure embrassée de chœurs astraux que l’on remarque à peine. Vers la 14ième minute le rythme casse et permute sur une structure débridée, où le mouvement séquentiel ondule frénétiquement appuyé des percussions sauvages d’Harald Grosskopf et entouré des furieux solos de synthé qui s’enchevêtrent dans un cosmos dominé par des impulsions mellotronnées et synthétisées. Une superbe tempête cosmique ponctuée de sublimes solos d’un Moog incontrôlable, défiant les mesures séquentielles de Nowhere - Now Here qui est tout simplement magnifique et qui étonne constamment par ses permutations aussi subtiles qu’imprévues. Comme cette délicieuse séquence qui éclot un peu après la 17ième minute pour danser sur un rythme venant de permuter et prendre une tangente plus dégagée où les solos du Moog hurlent et chantent sur une structure que l’on souhaiterait intemporelle. Stardancer 2 est une version remixée de Stardancer qui niche sur Body Love. La vaporeuse intro y est plus courte avant que le rythme n’explose sur de bonnes percussions et de furieux solos de synthé qui nous plonge de facto dans l’ambiance débridée de Nowhere-Now Here. Moogetique ramène tout le monde à la case ambiante. Un titre atmosphérique et ambiant aux lentes striations métalliques qui flottent et crissent autour d’un synthé aux souffles sombres, froids et vides. Nous sommes dans un immense néant musical qu’un mellotron creuse encore plus de ses souffles noirs et obscurs pour caresser des lignes de synthé finement hachurés, plongeant l’auditeur dans une folie ambiante qui aurait facilement trouvé sa place dans 2001 : A Space Odyssey, tant l’atmosphère s’y prête.

Cette version revisitée par le label Revisited Records offre en prime un long titre de 23 minutes, intitulé Buddy Laugh (A Rock'n'Roll Bolero). Voilà un étrange titre, car nous sommes loin d’être dans un boléro, encore moins un rock, mais plutôt dans un fascinant mouvement qui regroupe différents segments des titres que l’on retrouve sur les 2 Body Love. L’intro nous plonge dans une noirceur musicale abyssale avec des chœurs et souffles sombres et noirs d’un Mellotron caustique qui cogitent autour des effets sonores Schulzien, avant de se perdent dans une intense brume mellotronnée. Les cymbales annoncent une évolution dans le mouvement qui devient subitement plus sensuel, effleurant un peu Nowhere - Now Here, avant que la batterie ne moule une rythmique incohérente, près du free-jazz ou du prog improvisé, sous de lourdes et sinueuses réverbérations. On dirait un exercice de style par Schulze à la batterie qui décortique un bref solo se perdant dans une cacophonie pour retrouver aussi le chemin des connaissances avec un mouvement plus près des racines de Stardancer. Je ne sais pas vraiment quoi penser de Buddy Laugh (A Rock'n'Roll Bolero). Par moments j’y trouve des passages intéressants et en d’autres moments je le trouve long et ennuyeux, enlevant toute pertinence à se procurer cette réédition seulement parce que ce titre est absent de notre collection de Schulze. Si vous faites parti des chanceux qui possédez une version de BODY LOVE 2, soit de Brain ou Island en 1977, ou Metronome Musik (1992), ou encore Universal International (2003), je ne crois pas que cette réédition soit essentielle, surtout que certains de mes amis me soufflent que les versions de Brain et Island sont supérieures à la sonorité des rééditions de SPV Records. Par contre, si vous n’avez pas encore BODY LOVE 2, je vous le suggère fortement, car comme le faisait si bien remarqué Force Majeure, Schulze nous livre en Nowhere-Now Here son plus beau morceau des années 70 et je pousse encore plus loin en disant que c’est sans doute l’une des pièces charnières de la MÉ analogue des années 70. J’ai rarement entendu un titre qui se fond autant dans le progressif que dans le free-jazz et l’électronique. Un petit bijou qui vaut amplement sa place dans toute discothèque personnelle. Je lui mets un 6 boules, même si Buddy Laugh (A Rock'n'Roll Bolero) est moyen car il ne fait pas parti de l’œuvre originale et de plus avec les années il est toujours aussi beau!

Sylvain Lupari (07/09/06) *****

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