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Writer's pictureSylvain Lupari

Krakenkraft Sonic Hymnary (2023) (FR)

Un album qui explore les multiples facettes sous-jacentes à l'univers de la MÉ inspirée d'une approche plus expérimentale

1 Deriative 6:23

2 Mysterious Sines 5:06

3 Curvilinear Space 6:01

4 And he Built a Crooked House 4:48

5 Seclusion 6:41

6 Defconcentration 5:15

7 Lurking Corridor 5:09

8 Squeaking Chair 4:07

9 Deriative (vocal mix) 6:26

(DDL/CD-(R) 49:57)

(Experimental ambient, Drone)

SONIC HYMNARY pour un album qui explore de multiples facettes sous-jacentes à l'univers de la musique électronique inspirée par une approche plus expérimentale. Krakenkraft est un projet de musique électronique de Andreas Winterer, un musicien, peintre et auteur de Munich en Allemagne. Depuis la fin des années 90, il fait de la musique électronique avec une forte proportion d'échantillonnages de la nature, autant sauvage que civilisée. Bien qu'il cherche à développer une signature sonore et musicale qui lui est propre, les styles proposés dans son premier album sur Cyclical Dreams flirtent avec les ambiances et les rythmes de Ian Boddy, de Bakis Sirros et de Stephen Parsick. Mais, majoritairement, son approche est plutôt unique sur des structures dont l'aspect minimaliste est déjoué par de subtiles variations dans les évolutions. À tout le moins dans ce SONIC HYMNARY, un premier album sur le label Argentin qui oscille entre la musique d'ambiances expérimentales et/ou cinématographiques avec des panoramas sonores puisés dans une utilisation massive de bourdonnements, ce qu'on nomme les drones. Ce premier album-téléchargement de Krakenkraft rejoint cette liste d'albums difficiles à apprivoiser sur ce label. Mais ce n'est pas le plus difficile, puisque certains titres sont accessibles à la première écoute. L'utilisation d'écouteurs est plus que fortement recommandée puisque les échantillonnages sonores sont partis intégrantes du succès qu'on collera à cet album après 2 ou 3 écoutes.

Deriative donne le ton à cet album avec une de ces structures de rythme secret qui inspirent les nombreux panoramas d'une étincelante flore musicale et sonore. Une ombre de murmures et des battements sans envie de rythme délivrent une ouverture sombre d'où émergent une variété de tintements et effets de tintements plutôt diversifiés. Les battements se mettent à accélérer la cadence après la 2ième minute. Le rythme reste aussi ambiant que discret, même si nos doigts tapotent le bras de notre fauteuil d'écoute, dans mon cas un moelleux La-Z-Boy. Ces pulsations assourdies résonnent en symbiose avec l'effet vibrionnant des ombres et des souffles de drones bourdonnants, donnant ainsi un relief saccadé à cette ossature de rythme ténébreux qui peu à peu devient addictif. De leur côté, les tintements se développent en filaments lumineux et leurs airs rayonnent dans les lugubres ambiances dont les échantillonnages de murmures et de pas résonnant sur une chaussée ensevelie sous la terre rappellent vaguement le sordide univers de ['ramp]. Un autre élément de séduction qui n'est pas à négliger dans cet album est l'étroite relation entre le sens d'un titre et sa musique. Ainsi Mysterious Sines propose une structure atmosphérique aussi mystérieuse que sa vision géométrique avec une suite de ronflements dont les vibrations concoctent des cercles imparfaits qui s'étirent en un ambiant rythme rampant. Ils deviennent des ondulations aussi inachevées, créant une structure de rythme soufflé par un tubiste qui hésite sur la portée, la longueur de ses souffles. Le synthé élabore une texture mélodieuse fantomatique tout aussi spectrale et mystérieuse. Il faut travailler des neurones pour apprécier ce titre qui est tout de même assez créatif! Curvilinear Space est un titre d'ambiances ténébreuses avec des filaments soniques qui crissent dans une masse de bourdonnements radioactifs. On peu y entendre de sourdes explosions, rappelant ces chutes et/ou ces explosions de glaciers dans l'univers Doombient de Stephen Parsick. And he Built a Crooked House propose un rythme ambiant avec des oscillations rampantes qui ont une fine texture organique et/ou vampirique. Le mouvement est lent et s'articule autour d'amples boucles ondulatoires aux contours irradiés par une texture de glitch granuleuse qui montent et descendent dans une vision d'invasion par des créatures invertébrées.

Seclusion porte à merveille le sens de son titre avec un long passage d'ambiances ténébreuses où ses souffles bourdonnants et lugubres laissent filtrer des échantillonnages d'une nature souterraine. Un peu comme si nous étions prisonniers dans une grotte construite comme un labyrinthe. Defconcentration est l'exemple parfait d'un titre qu'on va apprécier de plus en plus au fur et à mesure qu'on l'écoute. Ce plus long titre de SONIC HYMNARYpropose une structure secrète. Son rythme est aussi incertain que la démarche d'un renard flairant le piège. Mais il est aussi très beau à cause de cette fascinante texture de caoutchouc dont les effets de gargouillements organiques nous entraînent dans un univers de féérie. Le rythme délie d'amples boucles de basses pulsations élastiques qui avancent méthodiquement. Des craquements de bois cadencés (oui-oui) et une ombre plus cristalline se détachent. L'écho de ses tintements est en symbiose avec le rythme et irradie sa démarche qui devient de plus en plus déterminée. Les basses pulsations sont mieux définies et structurent un rythme lent qui est serpenté par un collier d'arpèges moirés qui en dicte le chemin harmonique. Les craquements de bois initient une ouverture au titre à une abondance d'échantillonnages d'une nature étrange. Un élément qui n’est pas dénudé de charme, sauf que le principal attrait de Defconcentration est sa relation avec le magique univers de Ian Boddy qui resplendit de ses mille feux sur ce titre. Excellent! Lurking Corridor prend possession de notre casque d'écoute avec des ronflements espacés, créant un rythme ambiant minimaliste auquel se greffe des cliquetis métronomiques. La texture sombre me fait penser aux ambiances glauques et mélancoliques de The Cure. Le clavier sculpte une vision mélodieuse distante, un peu comme un poème perdant ses vers dans le brouillard. La tonalité de ses arpèges change de couleur, modifiant son axe harmonieux qui s'illumine un peu plus lorsque des ombres chatoyantes se mettent à flotter en symbiose avec leurs tintements. On entend vraiment une chaise craquer dans l'ouverture de Squeaking Chair. Les ombres de synthé qui bouillonnent dans son panorama injectent une texture de film de peur avec des éléments plus luminescents et légèrement suraigus qui s'échappent, un peu comme des figures spectrales qui prennent forme à partir d'un brouillard émanant d'un sinistre marais. La couleur des timbres variée aussi légèrement, créant une sinistre atmosphère cinématographiques qui raconte les histoires maudites des anciens propriétaires d'une chaise berçante en bois. Deriative (vocal mix) clôture ce nouvel album-téléchargement à sortir de l'univers Cyclical Dreams avec des échantillonnages de voix, et non des chants, qui lui procurent une ambiance qui flirte avec la paranoïa.

J'ai pris le temps qu'il fallait avant de vous parler à propos de ce SONIC HYMNARY de Krakenkraft. C'est un album qui devient plus intéressant lorsqu'on l'écoute plus attentivement, remarquant ainsi ses subtils évolutions, ses influences et sa vaste portée sonore constituée par des échantillonnages qui nous amène à flirter avec des horizons qui surpassent la dimension de nos attentes.

Sylvain Lupari (21/02/23) ***¾**

Disponible au Cyclical Dreams Bandcamp

(NB: Les textes en bleu sont des liens sur lesquels vous pouvez cliquer)

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