“Le berceau de la grande Space Music qui va générer les meilleurs albums du domaine”
1 In the Beginning... 8:00
2 Toto, I've a Feeling We're Not in Kansas Anymore! 6:20
3 Wherever Two or More Are Gathered 9:19
4 Life in the Gravity Well 6:55
5 As the Earth Kissed the Moon 9:55
6 Something's Moving 5:19
(CD/DDL 47:37)
(Space Music)
Initialement produit en 1981 sur l'étiquette Continuum Montage, Sonic Atmospheres en 1984-85 et le site Bandcamp Earth Turtle Music en 2015, c'est avec étonnement que j'ai découvert PLANETARY UNFOLDING! Débutons cette chronique en soulignant la belle initiative du label Projekt Music qui lance une série de rééditions en CD manufacturés et en téléchargements numériques les œuvres parmi les plus influentes de Michael Stearns. Le label américain proposera ainsi 13 titres du catalogue du sculpteur d'ambiances natif de Tucson en Arizona. Ces titres sont pour la plupart discontinués et introuvables en CD alors que certains sont disponibles sur le site Bandcamp de Michael Stearns et dans une qualité sonore qui rencontre les exigences des différentes plateformes d'écoute en ligne. C'est donc une excellente initiative dans des nouveaux remasters qui rendent justice à la musique de cet artiste influent dans les sphères de musique cosmique contemporaine. J'écrivais étonnement, puisque c'est la première fois que j'écoute PLANETARY UNFOLDING découvrant ainsi les essences et les couleurs qui se sont diluées dans ce que j'ai toujours considéré comme des classiques de musique électronique (MÉ) étatsuniens, soit ses albums M'Ocean et Chronos qui sont pourtant apparus 3 ans plus loin. Et si vous avez aimé ces deux albums, on y retrouve les grandes lignes, autant en ambiances, qu'en mélodie et en rythmes du 5ième album du magicien des synthés des USA.
Un vent bourdonnant accapare nos oreilles dès les premières secondes de In the Beginning.... Montant avec intensité, cette onde synthétisée accroche de multiples parcelles sonores cosmiques à son gracieux mouvement qui ondule tel la lente procession d'un reptile rampant. La musicalité de cette texture ambiante s'entend dans ses boucles ondoyantes dans une accentuation dramatique qui laisse filtrer des prismes d’harmonies qu'on entendra d'une façon plus élaborée dans Chronos. Sauf que PLANETARY UNFOLDING n'a pas l'identité de Chronos, il en est son berceau. Et un titre comme Toto, I've a Feeling We're Not in Kansas Anymore! en fait la preuve par 10. Les vents sifflant naissent de la finale de In the Beginning.... Et même pas 10 secondes plus loin, on entend un léger battement mécanique s'amplifier à mesure que les ambiances empruntent un volet plus austère, plus dramatique. Les voix sont plus graves que celle du titre précédent et combinées à ces vents bourdonnants qui sonnent à nos oreilles comme les lents déplacements d'une navette spatiale à la dérive, elles ajoutent une dimension de musique ambiante ténébreuse (Dark Ambient Music) à cette fascinante procession des vents cosmiques. Les cliquetis métalliques mutent aussi en feutrements aussi discrets que deux atomes se caressant dans une gelée cosmique comme ils se transforment en éléments percussifs dotés de personnalités changeantes. Les premiers bruits des jeux vidéo d'explorations intergalactiques ont sans doute pris naissance dans ce fascinant décor tonale que Michael Stearns offre à nos oreilles. Les vents de Toto, I've a Feeling We're Not in Kansas Anymore! migrent vers Wherever Two or More Are Gathered. Là où le Serge affiche une dimension sonore d'une extrême intensité et là où bat une première vie rythmique dans PLANETARY UNFOLDING. Les vents mélodieux de Chronos sont puisés ici et ils scintillent sur une nappe de basse qui fait ramper ses sortilèges sous un lit de prismes affichant ses contrastes sur un ruisseau aux couleurs des arc-en-ciel.
Ce court moment de rythme bruyant disparait dans le noirceur d'une finale qui coule vers les sourdes vibrations de Life in the Gravity Well. Les sirènes cosmiques et leurs chants ensorcelants nichent à cette adresse, juste après la chute d'un OVNI dans ce puit. Nous sommes près des mélodieuses ambiances océaniques de M'Ocean ici et une sourde pulsation bat dans ce décor séraphique qui rappelle les turbulences de Angels, Bells and Pastorale dans l'album qui a servi de référence sonore pour le film de Ron Fricke. Les pulsations sont plus secrètes dans As the Earth Kissed the Moon et ces lignes de synthé qui se dissocient pour se regrouper aussitôt dans une mélodieuse ambiance où les vagues chantent autant que les oiseaux pépient sur un titre qui soude les deux pôles mélodieux de M'Ocean et Chronos. Cette ouverture séraphique chemine vers une seconde partie où l'intensité nous fait lever les poils sur les bras, comme sur l'âme, dans une magnifique procession pastorale qui progresse vers l'explosion rythmique de PLANETARY UNFOLDING. Cette première phase de rythme est sise sur des battements frénétiques qui sont assourdis par une nuée de couches de synthé dont les couleurs bleutées oscillent comme un drapeau agité par des vents violents. Ces couchent ondoient comme un troupeau de vagues cherchant à fuir les océans dans un tumulte atmosphérique d'une intensité aussi féroce qu'éphémère. Si le rythme n'a pas explosé, son empreinte vibrionne dans nos oreilles, tandis que la finale de As the Earth Kissed the Moon exploite son bipolarité musicale pour déverser sa fureur retenue dans une danse de sabots électroniques dont les claquements empruntent la vertigineuse voie intergalactique de Something's Moving. Le rythme est sans appel avec un essaim de claquements divers dans une danse aléatoire alors que les nappes de synthé épousent cette envolée d'une navette spatiale dans l'inconnu du Cosmos que Stearns semble avoir défriché avec la justesse et la noblesse de son art. On ne peut éviter les parallèles avec Chronos, même si c'est sa genèse.
Michael Stearns est sans doute le pionnier de la Pacific School. Ses premiers albums, Ancient Leaves et Sustaining Cylinders, sont nettement inspirés des albums initiaux de Tangerine Dream, période pré-Virgin, de même que les œuvres sombres et ambiantes de Klaus Schulze, genre Irrlicht et Cyborg. PLANETARY UNFOLDING suit la courbe entreprise par l'influent Morning Jewel à qui l'étiquette New Age fut maladroitement, et injustement, collée. C'est un album magnifique et le début d'une impressionnante collection d'œuvres uniques tant dans leurs styles que leurs visions. Ça semble être le début d'une trilogie cosmique qui se terminerait par Encounter, album que je n'ai toujours pas entendu, qui, selon les critiques spécialisées, est une référence en la matière. Une très belle initiative de Sam Rosenthal et de son précieux label Projekt Music.
Sylvain Lupari (29/03/22) *****
Disponible chez Projekt Records Bandcamp
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