“Les rythmes Ostinato, les ambiances de tension font partie des prérogatives de Aeon 2”
1 Cycles 5 (16:03)
2 Cycles 6 (11:05)
3 Cycles 7 (15:14)
4 Cycles 8 (14:31)
5 Cycles 9 (14:16)
(CD/DDL 71:09)
(Dark ambient Orchestral bursts)
En écrivant ma chronique sur Aeon 1, je savais de quoi était fait ce AEON 2! Et je saluais l'idée de Nothing but Noise de scinder cette nouvelle quête créative en 2 parties, puisque AEON 2 est très différent. Des rythmes condamnés à se transformer en de répétitifs mouvements orchestraux secs et saccadés, des ambiances conçues dans la créativité audacieuse du duo Belge et des visions de tension et/ou d'horreur sont l'apanage de ce second volet de AEON qui nous amène au plus profond de nos perceptions. Et pourtant, la beauté niche sur ce nid du diable! On la trouve dans la fluidité de certaines orchestrations comme dans les filets mélodieux que l'on trouve lors d'un passage à un autre. Ou encore dans ces judicieux patterns du séquenceur qui allie rythme et harmonie sous la même coupe, question d'agrémenter une première écoute avec ces pointes plus belles que son contraire. Bienvenu dans ce psybient orchestral ténébreux de NBN!
C'est avec des accords sautillant et tintant avec légèreté que débute Cycles 5. L'écho est résonnant et attire une ligne de basse-pulsations dont l'écho se stigmatise dans des staccatos feutrés qui sont plus fluide qu'autoritaires. Les choses évoluent vite dans l'univers de AEON 2. Ces staccatos deviennent plus formels alors que réfléchissant, le rythme est poussé par l'adrénaline des orchestrations créant un savoureux mélange rythmique où des boucles en formations scintillent sur le long tubulaire des orchestrations. Il y a déjà un pont de brume au point des 5 minutes. Un passage où des staccatos inachevés sautillent dans une brume grondante. Des accords sous forme de bulle tonale éclate dans une ambiance qui tourne plus ou moins vers un secteur prismatique grâce à des chants de synthé aussi éphémères que ceux d'une baleine astrale. Ce mouvement est gracieux et enveloppant. Il nous soulève 2 minutes plus loin vers un tunnel garni de voix chthoniennes avec des séries de battements sourds sur des staccatos qui s'évaporent en brillances suspendues dans les ombres de ce passage qui disparait soudainement au point des 8:22. À ce niveau, une basse-pulsation s'écrase en faisant irradier sa présence en une série d'oblongs cercles ayant l’espace nécessaire pour faire danser ses ombres devenues des pas de séquenceur qui tissent par-dessus cette structure une ligne de vives oscillations que des synthés suivent avec leurs boucles harmoniques. L'idée d'un orchestre à cordes tentant de suivre les directions imprécises et inattendues des séquenceurs flotte dans ma tête, surtout lorsque les violons tentent de renverser la vapeur électronique. Au final et dans l'ensemble, Cycles 5 s'apparente à un fouillis sonore qui amasse les éléments nécessaires afin de créer rythmes, ambiances et harmonies qui s'harmonisent au fil de leurs rencontres. Si vous appréciez l'idée d'une musique incohérente qui trouve sa cohésion dans d'audacieux carrefours où Daniel Bressanutti et Dirk Bergen trient et séparent l'audace de la symétrie cartésienne afin de forger d'hallucinants concepts arrosés du fluide de leur créativité, vous êtes à la bonne place avec ce AEON 2. Prenons Cycles 6 qui nait par les radiations de carillons pour suivre une ligne d'ambiances jusqu'aux prés psychédéliques de l'univers de Nothing but Noise. Des voix acides sortent de ces ambiances, suivies par des tonalités métalliques irradiantes, créant un mouvement linéaire assez mélodieux dans un contexte d'ambiances créées à partir de fusion sonore. Des orchestrations séquencées et des ions sauteurs bondissent dans cette symbiose à demi consumée, alors qu'un autre amas de débris tonals se fond en une fine ligne d'oscillations vives. De ce bouillon nageant en pleine arythmie, se forme un fabuleux mouvement ostinato qui pétille vivement avec une vision harmonique dans son débit sec. De là pousse un splendide mouvement du séquenceur avec des oscillations vives et fluides, créant une dépendance auditive pour ce trop beau mouvement minimaliste et hypnotique qu'est devenu Cycles 6.
Des séquences gambadant comme des chevaux dans un nuage de moustiques ouvrent le bouillant Cycles 7. Seul titre à avoir des valeurs de Berlin School dans AEON 2, c'est aussi le titre le plus difficile à suivre en raison de ses nombreuses orientations stériles. Son rythme multiplie les ruades du séquenceur que des orchestrations enveloppent jusqu'à voler son apparence. Séquencé en un rythme minimaliste pour orchestre de chambre violon/violoncelle, Cycles 7 poursuit sa quête musicale en affrontant des gros spasmes orchestraux, des explosions d'archets triturant une direction rythmique qui avance tête baissée jusqu'à la deuxième métamorphose, un peu après la 6ième minute. Il y a un bon 2 minutes que la vision Berlin School s'est évaporée! Nos oreilles vivent dans une phase d'incertitudes et de revirements jetées par des orchestrations qui se cherchent dans les vapeurs des débris électroniques dissipés depuis longtemps. Une phase plus électronique survient vers la 11ième minute. Les séquences et leurs ombres tintant dans ces ruades circulaires installent une courte phase électronique sans suite. Dissonante avec des incantations pour tuer la musique, Cycles 8 est le titre le plus inaccessible de l'ensemble AEON. Il y a une volonté de pilonner nos tympans ici par des séries d'acharnements musicaux digne des films de haute-tension ou encore des films où l'horreur atteint son zénith et le seuil de notre tolérance. Séparé par séries afin d'éviter toute panique, ses 14 minutes sont présentées en phases ostinato qui sont vives et parfois très intenses et pour la plupart guidées par des orchestrations. La finale est tout de même assez explosive avec une réelle virée cosmique très entrainante. Après un tel titre on a besoin de quelque chose de plus musical. L'univers de psybient qui irradie de l'introduction de Cycles 9 peut faire un peu peur avec ses battements assourdis dans une flore tonale prismatique ou schizophrénique. Cette introduction s'étire au-delà des 4 minutes pour se dissiper et amener le titre vers un débit statique d'un séquenceur en mode rythme mélodique. Le synthé éparpille des jets de couleurs pastelles et des effets de radiations quelque 5 minutes plus loin. C'est une phase ambiante, un Berlin School méditatif où le séquenceur dissèque ses ions sauteurs afin de conserver les plus musicaux dans cette longue route d'un rythme pacifique qui fond dans les woosshh de l'éternité.
Il n'y a pas à redire; Nothing but Noise aime amener son public dans ses passages de créativité où la raison questionne le bon sens! AEON 2 est très différent de Aeon 1, au point de se demander si les deux albums sont effectivement en corrélation sur le même thème. Et pourtant on y retrouve des liens. Mais au-delà ces faits, il faut rendre à NBN ce qui lui revient. Soit un duo faisant de la MÉ très créative où la part de l'abstrait attire toujours le consentement de la mélodie et du rythme afin de créer des routes et des panoramas musicaux qui finissent toujours par trouver ce lien qui nous ramène à l'origine de son histoire. Et ici, l'histoire est AEON.
Sylvain Lupari (13/05/21) *****
Disponible au db2fluctuation Bandcamp
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