“Peut-être le meilleur opus de PW, Morphogenic est un splendide album où les traces de Redshift, Arc et Ramp flottent dans une faune riche et obscure aux rythmes ambiophoniques”
1 Oblivion 9:34 2 Above the Snow 6:06 3 Disorder 6:19 4 Inwards 6.50 5 Denormal 8:34 6 Corruption 6:33 7 Heterodyne 9:41 8 Submerge 6:12
(CD/DDL 60:07)
(Dark ambient beats)
L'univers de Parallel Worlds est aussi dérangeant et intrigant qu'enchanteur. Maintenant, imaginé lorsque joint à un quart de Node! C'est avec Dave Bessell (Node) que Bakis Sirros a decidé de pousser le 8ième chapitre de Parallel Worlds vers des territoires encore plus sombres et expérimentaux d'une MÉ abstraite aux couleurs d'une noirceur ensorcelante. Navigant entre Arc, Ramp et Redshift, MORPHOGENIC est un splendide album d'une MÉ empirique où les rythmes latents explosent et implosent dans d'étonnantes structures aux riches sonorités bigarrées. Les riffs y sont lourds et pesants, les ambiances suffocantes et les rythmes sont de feu, moulant de belles mélodies diaboliques qui dansent sous d'intenses voiles orchestrales de synthés aux visions musicales atteintes de bipolarité.
Les premiers riffs de Oblivion tombent avec lourdeur et fracas. Ils tranchent dans une ambiance glauque et surréaliste où des tintements de bouteilles formant d'étonnants cerceaux sonores moulaient les formes de chants aux sordides vents fantomatiques. Le rythme est pesant et stationnaire, nourri qu'il est des lourdes réverbérations de riffs qui résonnent et ébranlent les murs d'un univers parallèle où les piétinements métalliques chuchotent et s'échappent pour former un intrigant galop dont la démarche noire et abstraite s'évanouit peu à peu dans des limbes aux bruissements d'outre-tombe. Et comme l'univers de Parallel Worlds n'est jamais à bout de ressources, une envoûtante comptine pour diablotins aux sabots de verre émerge de ce nid de tonalités bigarrées pour sculpter un irrésistible ver d'oreille qui siérait à merveille au plus sombre des cauchemars méphistophéliques. Moulé dans le même pattern d'irréalité harmonique, Above the Snow étend ses souffles de gros paquebot menaçant sur une rivière de brume verte. L'enveloppe musicale est aussi sordide que mélodique avec des effets de ralentis musicaux aux contours érodés qui moulent des effets musicaux réverbérants sur un tapis de cliquetis pulsatoires. Au départ lent et suintant de sonorités infernales, le rythme s'active avec hésitation sur les courbes d'une ligne de basse dont les lentes oscillations nasillardes accompagnent les lourds et pesants martèlements de percussions. Des frappes qui percent l'opacité d'un dense mouvement imbibé de radioactivités métalliques qui dansent sous les épais voiles morphiques d'un synthé apocalyptique. Ces voiles morphiques qui donnent un cachet poétique à cette autre œuvre sombre de Parallel Worlds font les charmes du sordide Disorder qui est caressé par les brèves intrusions d'un piano qui cherche sa route d'harmonies dans un sombre univers d'activités musicales paranormales. Et si vous pensez que j'exagère, il faut entendre Inwards pour savoir de quoi est fait MORPHOGENIC. Ce titre d'ambience fantomatique est à déconseiller si on nage en pleine nuit noire où les chuchotements nourrissent les murs d'une effroyable couleur de chair.
Après une intro empruntée aux ambiances glauques de Above the Snow, Denormal se démène entre un rythme immuable et ses ambiances métaphysiques. Des pulsations occultes moulent un rythme féodal qui résonne sous les lignes d'un synthé aux voix obscures. Une étrange harmonie se dessine derrière ce canevas cabalistique où les pulsations déréglées cogitent avec de chevrotantes de frappes de percussions anorexiques qui se perdent sous les brûlantes complaintes et les violents riffs d'une guitare à la Robert Fripp, poussant le dialogue musical de Denormal dans les plus sombres recoins de son incompréhensibilité; là où le rythme et les ambiances troquent leurs peaux pour devenir plus noirs et incisifs. Les ambiances de Corruption se nourrissent de la philosophie de Denormal mais avec une approche nettement plus expérimentale où Redshift et Ramp s'entredéchirent dans des laves implosives. On ne peut être plus près du noir et de l'anti-musique qu'avec Corruption, et ce même si des résidus d'harmonies y flottent. L'introduction de Heterodyne nous amène dans les abysses d'un univers monastériel où les lourdes et chambranlantes réverbérations se confondent en de glauques lamentations de possédés. Le rythme s'éveil par approches fragmentaires. Érigé sur des palpitations qui piétinent d'une nervosité virginale, il vit et s'éteint sous diverses formes. Se laissant cajoler par des synthés aux lignes subdivisées dans leurs approches caverneuses et mielleuses il bat d'une mesure incertaine et prie pour un passage ambiant avant de courir à nouveau sur cette instable étendue musicale qu'est Heterodyne. Submerge clôt la tourmente avec un puissant titre immersif où le rythme est lent et moulé dans de denses orchestrations d'un synthé qui entrelacent ses harmonies divinatoires et ses ambiances spectrales dans un envoûtant cocktail d'émotions troubles. C'est très beau, intensément mélancolique et ça conclut à merveille cette séduisante odyssée dans le mystérieux univers de fantasmagorie surnaturelle de Bakis Sirros.
Pas de doutes! MORPHOGENIC est la meilleure œuvre de Parallel Worlds. C'est un album intense où les émotions noires festoient dans des émois parallèles. C'est tout à fait le diapason de Bakis Sirros mais avec une approche beaucoup plus théâtrale, voire cinématographique. On s'invente un nouveau film d'horreur à chaque nouvelle écoute. Noir! Très noir avec un élégant prisme de beauté. En fait, on ne peut lever l'oreille sur un album qui allie les sibyllins rythmes de Redshift et Arc, la témérité de Ramp et l'insoutenable monde d'expérimentations sonores de Parallel Worlds. À ne pas écouter si on a peur du noir…
Sylvain Lupari (17/10/12) ****½*
Disponible au DiN Bandcamp
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