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Writer's pictureSylvain Lupari

PERCEPTUAL DEFENCE: Illumina Tenebras (2013) (FR)

De la MÉ expérimentale pour la danse moderne, le défi d'Illumina Tenebras est très audacieux et procure de très bons moments de Berlin School

1 Illumina Tenebras 45:19

2 Tur Vinum 24:55

(CD-R/DDL 70:14)

(Ambient, experimental theatrical EM)

L'univers de musique contemporaine et expérimentale de Perceptual Defence sert la cause à des soirées de danses actuelles. Des spectacles en sons et mouvements où le synthésiste Italien dessine sa musique sur les pas des danseurs contemporains. Enregistré lors des spectacles de danses rituelles Butô, donnés en Italie lors de l'été 2013, ILLUMINA TENEBRAS sonne comme une communion entre l'art et la musique. Gabriele Quirici harmonise sa musique avec les gracieux mouvements des danseurs dont les impulsions aussi élégantes que sournoises projettent des ombrages ténébreux qui flottent dans de lourdes phases ambiantes, comme exultent et émoussent des rythmes trépidants dont les tornades finissent toujours pas embrasser les douceurs contemplatives de mouvements devenus plus séraphiques. Donc, de phases ambiantes à des rythmes endiablés, la musique de ILLUMINA TENEBRAS traverse les pénombres pour illuminer les ambiances de chants aussi colorés que les tintements de carillons.

Enregistré le 22 Juin 2013, dans la vile de Scarzuola, lors d'un spectacle de danse dépeignant la vie de St-François d'Assise, Illumina Tenebras est bien ancré dans son ténébreux cocon. Là où hurlent des vents souterrains. Une symphonie de vents creux, dont la vélocité soulève un essaim de prismes soniques caverneux, débouchent ses premières minutes. De fines subtilités dans la vitesse des vents, qui épousent les couloirs des sous-sols chthoniens, ainsi que dans leurs formes et leurs couleurs, amènent la longue saga sonique de la pièce titre vers d'ensorcelants changements de phases où les brises sépulcrales deviennent de longs soupirs d'une chorale fantomatique. Le mouvement est lent, arythmique avec des vents qui deviennent des brises et enfin des murmures de masse dont les chants patibulaires chuchotent la solitude. Ces chants se créent un monde musical en soulevant des particules prismiques qui peu à peu s'essoufflent et changent de peaux soniques pour devenir de doux gazouillis d'oiseaux dont les battements d'ailes cherchent à sortir des interstices des ténèbres. Les souffles se taisent et une fissure dans les ténèbres se fait. Maintenant, des voix séraphiques accompagnent le magnétique chant des oiseaux. Des ténèbres à la lumière, le sombre mouvement de Illumina Tenebras sort des ombres pour embrasser les doux rayons de la vie avec une chorale passive et ses chants papaux qui nous plongent dans un tranquille état méditatif. Des remous, causé par des lames de synthé qui s'entortillent comme un amoncellement de nuages gris, assombrissent la latente phase morphique et créent le premier mouvement de rythmes de Illumina Tenebras. C'est un rythme sphéroïdal, où l'on tournoie plus que l'on bouge, avec des couches de synthé qui tourbillonnent comme des vents statiques, échappant des filaments soniques qui illuminent une tornade passive où le noir et la blanc, les ténèbres et la lumière se chamaillent les dernières minutes d'une spirale qui finalement chasse toute ambiguïté et conduit Illumina Tenebras vers une très belle finale séraphique. Jusqu'aux portes de la sérénité, là où les babillements des enfants vont de pair avec Jean François D'Assise. C'est très théâtral et, quoique moins violent, ça me rappelle la musique de Jean-Pierre Thanès.

La musique, et les ambiances, de Tur Vinum tournent autour d'un ancien rituel Etruscan. Enregistré à Tuscane le Juillet 2013, la musique est nettement plus animée que sur Illumina Tenebras. Moins sombre aussi avec des gazouillis d'oiseaux et leurs sérénades paradisiaques qui volètent dans de lourdes lignes de synthé aux tonalités de carillons bigarrées. Un maillage de séquences et de percussions électroniques tambourinent un étrange dance païenne. Leurs roulements résonnent dans des lignes de synthé aux étranges chants angéliques. Techniquement, c'est une tornade qui prend forme avec des tam-tams et des carillons qui tintent et résonnent dans des chants flûtés. Le mouvement devient anarchique, violent. Il tournoie avec vigueur avec des gargouillements qui s'invitent à la danse. Une danse infernale où les éléments qui tournent perdent tout sens rythmique mais restent délicieusement cohérents, alors que la mélodie, tissée dans des harmonies célestes et enfantines, devient peu à peu un vers d'oreille qui hantera encore une fois la tempête des percussions et séquences, dont le déboulement s'amplifie subtilement, atteindra son nirvana de tranquillité. Un très bon moment dans ILLUMINA TENEBRAS. Et là, les ambiances éthérées, méditatives reposeront les pieds des danseurs que l'on imagine flotter entre les ombres et leurs réflexions. La finale épouse un peu les doux moments séraphiques de Illumina Tenebras avec des carillons et des lignes de synthé qui chantent en harmonie avec la sérénité.

Entre les pénombres et les lumières, entre la pieusité et ses démons, entre les ambiances morphiques des songes ombragés par les ténèbres et les rythmes de danses païenne à réduire les ossements des pieds en poussière, la musique de ILLUMINA TENEBRAS flirte avec tous les paradoxes de la danse contemporaine et de ses voltiges qui dépassent l'imaginaire des chorégraphes des plus exigeants. Le défi de Perceptual Defence est très osé, car mettre dans nos oreilles une musique qui trouve sa force dans les mouvements de ses antagonistes est loin d'être évident. Même en fermant les yeux et en s'abandonnant, on n'y parvient même pas. Mais on pense un très bon moment, surtout avec l'explosif Tur Vinum. Pour amateurs de MÉ expérimentale et contemporaine.

Sylvain Lupari (15/03/14) ***½**

Disponible au SynGate Bandcamp

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