“Le plus grand mérite de Perge est bel et bien de continuer une exploration musicale où TD ne voulait plus aller”
Attalus 1
1 Manerium Resonat 17:16
2 Monolux 18:43
Attalus 2
3 Tempestas Fronte 11:09
4 Taking Le Parc 13:02
5 Letters from Volos 3:30
6 Delphinus 14:50
(DDL 78:30)
(TD's Berlin School style)
Hors d'Orion se déracinent des vents creux qui étendent les auras psychédélicosmique bleus des années métalliques du Dream. Des chœurs chthoniens psalmodient sur les courbes des sinueuses lignes de synthés aux contours irisés, entraînant l'intro de Manerium Resonat dans un ballet morphique. Des séquences tintent au loin. Fonçant sur leurs échos, elles tracent une structure harmonique zigzaguant qu'une ligne de basses séquences embarque sur les ruades de ses pulsations. La symbiose des rythmes est magique. Et la magie s'ancre encore plus avec les harmonies d'un synthé à la fois nasillard et philharmonique qui recouvre un rythme dont l'évolution nous amène aux confins d'une structure qui aurait bien pu sortir du majestueux Silver Scale. Stringer & Getty avaient pris le monde de la MÉ de court avec le brillant Dyad; un album qui respirait les réminiscences de Tangerine Dream des années Schmoelling. Alors pourquoi changer une recette gagnante? Cette deuxième mouture du duo Anglais, ATTALUS va encore plus loin dans la découverte des labyrinthes musicaux de Tangerine Dream perdus entre deux univers parallèles. Inspiré des années 71 à 87 du mythique groupe Allemand, Manerium Resonat en est le parfait exemple en fusionnant les époques Baumann et Schmoelling dans un étonnant titre évolutif. D'ailleurs l'ouverture de Monolux transpire celle de Pergamon avec le doux piano de Matthew Stringer qui martèle ses notes dans l'écho de sa solitude. La dernière note reste en suspension et se perd dans les réverbérations d'une ligne de synthé qui flotte dans l'entrecroisement d'autres lignes rêveuses. S'ensuit une brève phase morphique où les lignes de synthé aux multiples harmonies errantes se dissipent pour laisser place à une superbe ligne de séquences qui ondule et tournoie dans une fascinante volute. Une spirale hypnotique où se terrent des accords cachotiers qui décalent la mesure d'une phase rythmique qui tournoie comme un carrousel de verre. Des cliquetis de cymbales et des percussions d'un genre militaire harponnent le rythme qui s'alourdit d'une ligne de basse, plongeant Monolux dans une tornade mélodieuse qui serpente entre nos oreilles avec le charme d'un truc inespéré et inattendu alors que la phase deux de Attalus 1 s'orne des paillettes sonores du Dream et de très beaux solos d'un synthé très musical. C'est un peu comme un montage de centaines de bouts de musique de TD qui sont remodelés dans une autre mosaïque de rythmes et ambiances. Voilà bien 36 minutes bien tassées dans mes oreilles.
Scindé en 4 parties, Attalus 2 infiltre nos oreilles avec d'ondoyantes lignes de synthé qui chantent parmi des murmures obscurs et des tonalités électroniques qui conduisent à cet étrange langage qui lançait Network 23 de l'album Exit. Sauf que le rythme de Tempestas Fronte est plus explosif. Arqué sur une ligne de séquence qui bourdonne de ses accords papillonnants et des percussions qui martèlent un rythme lourd, la structure est nouée de fibres cadencées qui palpitent sous les lignes d'un synthé lyrique. Un synthé dont les harmonies cristallines s'effacent pour laisser libre cours à un solo de séquences aux mouvements entrecroisées qui virevoltent sur de denses percussions. Ce passage est tout simplement génial et la fusion des entités de rythmes fini par se recouvrir de poussières de synthé alors que Tempestas Fronte rebrousse chemin dans ces harmonies qui en ornaient sa genèse. L'ouverture de Taking Le Parc est tissée sur un échantillonnage des rythmes et ambiances de l'album du même nom de Tangerine Dream. Le rythme devient lourd. Dressé qu'il est sur cet alliage de séquences et percussions qui déboulent en une frénésie rythmique galopante, dont les chevauchements et entrelacements font le charme des rythmes évolutifs de ATTALUS, il roule comme un train forcené sous de belles nappes d'un synthé lumineux qui dessine aussi de beaux solos harmonieux et torsadés. Les séquences s'isolent un peu plus en deuxième partie du titre, désossant une structure de ses harmonies principales. Seuls restent ces nappes de synthé brumeuses et ces ions sauteurs forgeurs de rythme névrosé qui se bousculent dans une cadence anémique. Une cadence qui égrène peu à peu ses éléments comme une autopsie rythmique où on peut admirer tout ce qui a grouillé en dessous des 10 dernières minutes de Taking Le Parc. Après la délicate Letters from Volos et son doux piano mélancolique, Delphinus reprend là où Tempestas Fronte avait laissé, mais avec un rythme plus fluide et de très beaux solos de synthé ainsi que de belles mélodies qui mordent l'ouïe et qui courent sur un lit de séquences pulsatiles uniques au mode de gestion des rythmes de Chris Franke.
ATTALUS est un superbe album construit sur des séquences qui se bousculent dans leurs hâtes de forger ces rythmes qui évoluent sans cesse avec une fine propension aux dérapages. Les deux parties qui nourrissent ses 78 minutes sont aussi magiques que le jeu des séquences et les rythmes débordants qui explosent sous des synthés dont les harmonies et les solos nous amène dans les territoires abandonnés du Dream, toutes périodes confondues. C'est un album où chaque recoin nous fait sourciller et nous fait tomber sous le charme de Perge dont le plus grand mérite n'est pas de copier la source de leur inspiration, mais bel et bien de continuer une exploration des rythmes et ambiances là où le mythique groupe ne voulait plus aller. Excellent!
Sylvain Lupari (25 Mai 2013) ****½*
Disponible au Perge Bandcamp
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