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Writer's pictureSylvain Lupari

PERGE: Dyad (2012) (FR)

C'est un super album qui semble étonnamment sortir d'un studio de Tangerine Dream caché dans un univers parallèle

1 Temple of Trajan 6:47

2 Drusenfluh 2:41

3 Schesaplana 7:45

4 Zimbaspitze 9:21

5 Vorder Grauspitz 8:00

6 Naafkopf 10:49

7 Sulzfluh 1:38

8 Falknis 5:23

9 Dyad 12:18

10 Sassauna 12:31

(DDL 77:18) (Berlin School)

Il fut un temps où la légende en parlait. Avec les années cette légende, comme les souvenirs, s'effaçait pour tomber dans l'oubli jusqu'à ce que finalement les premières notes soient portées à nos oreilles avec l'introduction de Temple of Trajan. La légende en question est ce fameux concert que Tangerine Dream aurait donné dans la nuit du 31 Janvier 1981, lors de l'éclipse des astres solaire et lunaire de la planète DYAD, sous le grand chapiteau du stade Dröing. Un concert dans un autre espace-temps où chaque note semble décalée et où chaque mélodie marche aux côtés de celle composée pour notre système. Délicat, Temple of Trajan marche dans les sillons de l'ouverture de Quichotte Part I, mieux connu sous le titre de Palace of Dreams. On sent un Johannes Schmoelling plus mélancolique qui apporte des nuances dans ses accords, reflétant à merveille la fragilité des univers parallèles que Tangerine Dream chevauchait sans scrupules. Mais au fait, vous y croyez à cette histoire?

Perge est la nouvelle coqueluche des médias sociaux qui flirtent avec la MÉ, plus spécialement la musique de Tangerine Dream. Sauf qu'il ne faut pas se laisser emporter par cette vague de fanatisme et penser que Perge n'est qu’une copie carbone de Tangerine Dream. C'est bien au-delà d'une simple imitation avec une vision sarcastique et tout le talent de Paul Lawler avec son Arcane. Composé de Matthew Stringer, au synthé, piano et guitares, et de Graham Getty, aux séquenceurs, Perge ne fait que rendre hommage au mythique trio Berlinois dans sa peau la plus électronique et mélodique qui soit, soit celle des années Franke, Froese et Schmoelling. Et DYAD est un concert imaginé et joué en direct (en studio) dans le respect des concerts électriques de Tangerine Dream lors des années 80-81. Et tout au long de ce concert imaginaire, l'auditeur et le fan est carrément plongé dans l'univers de ce Tangerine Dream avec 10 compositions qui sont les miroirs des titres aussi électriques qu'Undulation, Force Majeure ou encore Silver Scale. Miroir parce que les compositions de DYAD sont moulées dans des territoires connus et surtout inconnus du mythique trio Allemand, un peu comme si le duo Stringer & Getty s'était abreuvé en secret d'une corne d'abondance oubliée lors de ce fameux concert au Palais de Trajan pour atterrir de l'autre côté du miroir de notre espace-temps dans un superbe bootleg qui n'a rien à envier à ceux que l'on connait tous déjà.

Après un pont flottant forgé dans un synthé très musical en Drusenfluh, les séquences houleuses de Schesaplana nous entraînent dans un tourbillon rythmique ondulatoire avec des séquences dont le débit sec trace un rythme convulsif qui galope avec une frénésie contagieuse au côté de percussions aux cliquetis minimalistes. Ce rythme qui chevauche les plaines métallisées du Dream sur Force Majeure est soigneusement nappé d'un synthé aux arômes autant orchestraux que mélodieux, apportant le meilleur des deux mondes connus de Tangerine Dream à cette époque. Respectueux des structures des rythmes et ambiances qui meublaient ces concerts légendaires, Perge alternent les rythmes durs et les mélodies avec Zimbaspitze qui démarre avec une intro atmosphérique avant d'embrasser un rythme mélodique et de conclure avec un rythme lourd noyé de somptueux solos de synthés. Moulé dans les cendres de Calymba Caly, Vorder Grauspitz coule avec plus de fluidité, sans pour autant renier son origine. Après une intro charmée des souffles flûtés de Tangram, Naafkopf s'enfonce dans une rythmique lourde qui tournoie tout autour de l'ossature mélodique de Tangram avec des séquences tonitruantes et des synthés intensément lyriques et poignants. On pourrait croire à une première ébauche de ce titre phare d'une nouvelle orientation musicale de Tangerine Dream. Sulzfluh et Falknis nous offrent du matériel inédit avec une lente évolution rythmique qui part des souffles torsadés et réverbérants de Sulzfluh pour aboutir dans les lourds rythmes ondulatoires de Falknis. Des rythmes sis sur des séquences aux palpitations arythmiques ceinturées de percussions qui claquent dans les brises harmonieuses et métallisées de synthés argentés. Dyad est un condensé de tous les approches rythmiques et harmoniques du Dream des années 80-81 avec d'agiles séquences papillonnées et de lourds synthés aux membranes irisées dont les souffles apocalyptiques meurent dans une finale aux arômes de Tangram/Quichotte. Ce titre qui fusionne harmonies roucoulant sur des billes de plomb couronne un concert féerique que la magie d'aujourd’hui nous restitue avec un sulfureux rappel tiré des armoiries de Silver Scale en Sassauna où Matthew Stringer gratifie l'audience absente d'un solo de guitare aux riffs mordants.

Non Perge n'est pas Tangerine Dream! Même si on y croit fermement tant la fiction rattrape la réalité. Et que les puristes ainsi que les fans purs et durs soient en accord ou en désaccord, Tangerine Dream continuera de vivre à travers le culte que lui voue ses plus ardents admirateurs. Que ce soit à travers des œuvres aux absentes subtilités ou d'autres carrément plus directes, la magie du Dream servira toujours de rempart à des artistes qui jugent que ses phases étaient abandonnées sans que tout ait été exploité au maximum. DYAD regorge d'une musique qui manque cruellement aux fans d'une période la plus prolifique du trio Berlinois que l'on aurait voulu éternelle. C'est un très bel album inspiré avec le plus grand des respects d'un trio culte qui nous a tellement donné en si peu de temps qu'il est juste normal de croire qu'il y ait des restes quelque part dans une autre galaxie.

Sylvain Lupari (21 Juillet 2012) ****½*

Disponible au Perge Bandcamp

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