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Writer's pictureSylvain Lupari

RENÉ SPLINTER: Almery (2010) (FR)

Un nouveau venu inspiré par l'ère Schmoelling de Tangerine Dream? Pourquoi pas quand c'est bien fait. Et celui-ci est très bien fait!

1 Tunnel Vision 7:49 2 Encom 8:05 3 The Flight of the Pterodactyl 4:08 4 Almery 8:11 5 The Laughing Magician 28:00

(CD/DDL 56:06) (E-Rock)

J'ai découvert la musique de René Splinter grâce aux compilations de Groove NL; E-Day 2011 et Dutch Masters Vol. 1. On ne pouvait nier, encore moins taire, la nette influence de Tangerine Dream sur les orientations musicales du synthésistes Hollandais. C'est en 1977 que ce musicien Hollandais natif de The Hague rencontrait la MÉ sur son chemin de croissance personnelle avec l'album Oxygene de Jean-Michel Jarre. Peu à peu, le genre envahissait sa vision artistique. Il a commencé à pianoter dur un Sequential Circuits Pro One à la fin des années 80. Il composait et enregistrait sa musique en faisant des réenregistrements sur un enregistreur à cassette. Et à la fin des années 90, il avait composé un premier album, ALMERY qui était disponible qu'en format cassette. Quelques 20 ans plus tard ce premier album est finalement disponible sur MellowJet Records. Et si l'influence de TD transpirait dans les pistes offertes sur les album-compilations de Groove, ce n'est rien comparé à cet album qui est une véritable immersion dans les univers du Dream. De Exit à White Eagle, sans oublier Hyperborea et Poland, René Splinter exploite avec voracité ces séquences qui sonnent comme des flèches tirées d'une arbalète, ces riffs de synthé irisés ainsi que ces harmonies qui ont un net penchant pour Le Parc. Somme toute, c'est un superbe album pour les nostalgiques où le synthésiste des Pays-Bas poursuit cette route qui semblait pourtant être un cul-de-sac musical è en croire les nombreux critiques.

Tunnel Vision démarre cette petite découverte avec des accords résonnant comme des cloches. La vision de Tangerine Dream s'installe avec une ligne de basse aux accords boomerang, comme dans Le Parc, et ces nappes de brume mélancolique. Un tapis de séquences roule avec des sonorités de crotales, initiant peu à peu un rythme latent. La musique décolle avec cet audacieux jeu de séquences qui est nappé d'un synthé aux courbes vaporeuses qui échappe aussi ses jets de brume métallique. Le rythme est minimaliste pulsatoire et est propulsé par de bonnes percussions électroniques. Il accentue son emprise hypnotique et fonce à vive allure accompagné d'un synthé à la mélodie entraînante et dont les souffles flûtés iridescents font figure d'un saxophone à bout de souffle se lamentant sur de furieuses et brillantes séquences. Tout un départ! Après une brève intro nébuleuse Encom épouse un bouillant rock électronique avec des percussions qui martèlent un rythme de plomb ceinturé d'un synthé aux couches symphoniques. Un croisement d'Exit et de White Eagle, Encom rencontre une délicieuse et explosive turbulence de séquences et de percussions avant de reprendre sa route rythmique sur un tempo lourd, hypnotique et entêté qui est toujours nappé de ces nappes de synthé aux signatures de TD. C'est toujours aussi bon! Court et mélodieux, The Flight of the Pterodactyl est plus centré sur les synthés que les mouvements de séquenceurs, quoique le rythme soit toujours lourd et hard. Plus on avance et plus le lien qui soude la musique de René Splinter à celle de Tangerine Dream est indissociable. Ainsi la pièce titre est une superbe ballade dont la douce ritournelle éthérée ressemble étrangement à celle de White Eagle.

The Laughing Magician est le gros titre sur ALMERY. C'est aussi un habile mélange, ou genre de remixe, de différents visions harmoniques de cette période fortement ancrée dans les influences de Splinter. Avec ces voix aux chuchotements glaciaux qui percent la chorégraphie des cymbales métalliques, nous sommes en plein dans la période Majove Plan, alors que les séquences et riffs de synthé nous plonge dans celle de Poland. À la fois méthodique et audacieux, René Splinter injecte ses nappes aux parfums de métal bleu dans les roulements de percussions, les lignes de riffs et les strates de synthé aux couleurs irisées. Un riche univers sonore se déploie sur ce tempo invitant où la venue des séquences spasmodiques forge une structure saccadée. Et l'illusion du Dream est plus que parfaite. Nous avons cette impression d'entendre un titre qui n'a pas trouvé sa place dans la méga-compilation The Dream Roots Collection. Sauf que Splinter ne fait pas seulement copier le style de Tangerine Dream. Non! Il trace ses mélodies et ses nappes éthérées sur des rythmes plus pointus et mieux définis et avec des strates de synthé qui rugissent comme la guitare à Froese. Envoûtant, ce rythme saccadé suit sa tangente hypnotique dans une incroyable richesse harmonieuse avant de plonger dans une mer de sonorités éclectiques. Il flotte parmi des coups d'enclumes, des jets de gaz électroniques ainsi que dans cette brume et ces souffles métallique qui remplacèrent l'enveloppe méphistophélique des années analogues. Le rythme évolue avec son jeu de séquences et de percussions électroniques qui démontrent l'originalité de Splinter envers son influence, plus particulièrement ici pour la finale échevelée d'Horizon du chef d'œuvre qu'est Poland. The Laughing Magician s'éteint donc dans une finale psychédéliquement endiablée où les tintamarres de métal et les souffles de synthé cristallisés s'arriment à des soubresauts rythmiques épisodiques qui couvrent délibérément le magique concert de Poland, mais avec une vision plus personnelle à René Splinter.

En visant la glorieuse ère du trio Franke, Froese et Schmoelling tout en insistant sur Poland, le synthésiste Hollandais frappe en plein milieu de ma période magique de Tangerine Dream. J'ai adoré ALMERY. J'y vois plus qu'une imitation de mon groupe culte. J'y entends une musique qui m'a ravi et qui m'a définitivement accroché au superbe univers de la MÉ où les sons et les séquences tissent des structures évolutives que les artisans habillent habilement de belles couches et de solos de synthé. Et c'est ce que nous offre René Splinter sur cet ALMERY qui au final est un superbe album et un pur délice pour les oreilles et pour cette nostalgie qui fait de nous des obsédés d'une période musicale dont les nombreux enchantements dépassent toute cette démesure, cette dévotion qui nous lie aux Beatles de la MÉ.

Sylvain Lupari (28/10/11) *****

Disponible chez Mellow-Jet Records

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