“Du Berlin School improvisé à son meilleur et qui agit comme un aimant musical”
1 No Matter What! 15:14
2 Immortal 17:48
3 The Moonstone 17:29
4 Such as This 14:47
5 Orange Corner 6:51
(CD-(r)/DDL 72:11)
(Experimental ambient B.S.)
Des bips de télécommunication qui défilent en un débit aussi vertigineux que l'acoustique grincheux de cette parade semi corrosive portent l'introduction de No Matter What! à nos oreilles. C'est le début d'un long passage atmosphérique où des éléments charmants à entendre, le chant scintillant des carillons qui tintent après les bips, se perdent dans un tumulte sonore rempli de respirations bourdonnantes, de brises lunaires et d'orchestrations décousues qui donnent un effet d'apocalypse amplifié par les remous stagnants d'une nappe de basse. Cette tempête sonore s'étire jusqu'à la 9ième minute, dévoilant un aspect plus musical qui coule sous les tambourinements d'un séquenceur et de ses 2 lignes de rythmes en parallèle. Des nappes de synthé à la Vangelis balaient ces nouveaux horizons de No Matter What!, alors que le rythme varie son intensité et la puissance de son axe circulaire. Il détache une ombre plus crépitante, donnant un aspect organique à cette structure qui sautille vivement sous une pluie de météorites sonores et entre les vibrations de bourdons électroniques d'où sifflent aussi de fascinants effets spectraux venus de nulle part. On ne part pas à la découverte de THE MOONSTONE en criant ciseau! Non! Contrairement au sublime Tangerine Sands, ce second album de René van der Wouden sur Cyclical Dreams demande une patience et une ouverture d'esprit afin de passer à travers les 4 longues phases atmosphériques qui précèdent une série de rythmes tout aussi alambiqués dans un album conçu sur le mode improvisation d'un Berlin School plus expérimental qui est entrelacé et traversé par des phases de musique d'ambiances sombres. Le Dark Ambient! Les 4 premiers chapitres de THE MOONSTONE sont conçus dans le même genre et proposent des ouvertures d'ambiances électroniques remplies de ces effets du continent analogue et des structures de rythme en constante permutation de leurs tonalités, comme de leurs axes cadencés.
Celle de Immortal est moins corrosive avec sa procession de nappes gothiques et leurs lamentations enduites d'une fine couche de grésillements. Il y a une forme d'intensité dans cette ouverture, même si des effets industriels bourdonnent par moments. Cette ascension vers l'immortalité respecte un peu cette vision de déchirement entre le réel et son contraire dans une faune sonore remplie de pépiements et d'effets sonores des premiers albums de Klaus Schulze. Des pulsations se mettent à faire résonner ce lit de bourdonnements autour de la 9ième minute. Ce rythme ambiant est sis sur 3 accords de basses pulsations vibratoires dans une vision minimaliste et de sa démarche qui clopine dans une structure processionnelle et ascensionnelle, genre marche à semi-enjouée, avec une texture aussi crépitante que les filaments de distorsions qui en balaient sa dimension. Il y a beaucoup d'effets sonores qui nous lient aux expérimentations des années analogues de Schulze. La pièce titre suit aussi avec une lente ouverture atmosphérique. Des ondes zigzaguent, glissent et planent dans un environnement cerné de cuicuis électroniques. Il y a beaucoup d'émotion dans ce passage et le timbre est mélancolique, à la limite de la morosité. Un effet dramatique s’installe avec cette fusion des couleurs du cœur, de l'âme lorsque la brume dominante échappe une subtile ombre plus grondante aux abords de la 5ième minute. Une délicate, quasiment secrète, pulsation vibre momentanément entre nos oreilles dès ces instants. Les nappes de brume devenue cristalline valsent et dérivent vers de nouveaux horizons sonores. Dans les corridors de Dark Ambient où elles irradient d'une texture plus métallique et de fredonnements de voix chtoniennes. Le rythme éclot un peu avant la 10ième minute dans une spirale très enlevante. Le séquenceur émet une série de petits pas qui déambulent à bonne vitesse avec une série de basses séquences qui métamorphosent leurs tonalités avec un effet de radiation crépitante. Une brume astrale ondoyante et oscillante accompagne ce mouvement circulaire et zigzagant qui me rappelle vaguement cette hymne de rock électronique que P'cock offrait à notre curiosité auditive en 1991 avec le titre House in the Storm de l'album In'cognito. Il n'y a pas à dire, The Moonstone est un beau bijou de 17 minutes qu'il faut prendre le temps de découvrir! Ce qui nous amène à Such as This où les parfums et influences expérimentales de Klaus Schulze et Vangelis se disputent une ouverture, on croirait entendre les feux de la Ceinture d'Orion, qui met nos oreilles au défi sur une distance qui dépasse les 8 minutes. Le séquenceur délie une ligne d'ions sauteurs qui défilent en une rangée spasmodique sous une pluie de constellations irradiantes qui triturent une nappe de voix astrales. On nage dans l'univers de Spiral avec cette tonalité et le débit vif du séquenceur qui fait faire du slalom de haute voltige à ses arpèges doublés de pépiements électroniques dans un mouvement ondulatoire ascendant. Orange Corner est le titre qui s'apprivoise le plus facilement de THE MOONSTONE, même avec la tonalité un brin industrielle de son ouverture ténébreuse. Le rythme explose en un bon Berlin School agressif sous de belles nappes orchestrales qui valsent et flottent avec une grâce harmonique de vissée dans les mouvements.
Légèrement moins accessible, mais pas nécessairement moins bon, que Tangerine Sands, ce dernier album-téléchargement de René van der Wouden s'adresse avant tout aux oreilles aventureuses qui veulent renouer avec l'époque plus expérimentale de la musique électronique (MÉ) des années 70. C'est de l’improvisation à l'état pur qui agit comme un aimant à chaque nouvelle écoute où on se familiarise toujours un peu plus aux dimensions de THE MOONSTONE.
Sylvain Lupari (10/03/23) ***¾**
Disponible au Cyclical Dreams Bandcamp
(NB: Les textes en bleu sont des liens sur lesquels vous pouvez cliquer)
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