“Excellent, c'est un des très bons albums de Robert Fox qu'il fait bon entendre ces temps-ci”
1 House of Chimes 9:52
2 Murmuration 7:14
3 The Devil's Puzzle 6:34
4 Prayers of Light and Darkness 7:26
5 Lockdown 10:30
6 Dark Mirror 10:44
7 Glimmer of Light 7:48
8 Rainbow's End 4:24
(CD/DDL 64:32)
(Orchestral Cinematic EM)
C'est avec un souffle bourdonnant que les premières cloches tintent dans ce nouvel univers de Robert Fox. Assez tôt, nos oreilles sont saisies par cette fascinante ritournelle du piano dont les cercles imparfaits recueillent une non moins fascinante voix de cette chanteuse qui se cache dans les secrets d'un synthé orchestral. C'est difficile de lever les oreilles devant cet immense titre d'ouverture dont les senteurs cinématographiques sont tisseuses de frissons. Ainsi, notre écoute s'accroche dans cette ligne de piano qui fait tinter ses notes dans un vide qui se recouvre d'orchestrations sentimentales et de cette voix synthétisée. Le mouvement est délicieusement lent. Il avance avec le poids de son émotion traduit par des violons étendant de lentes caresses qui s'accrochent maintenant aux tssitt-tssitt des cymbales électroniques. Nous sentons un renouveau dans ce mouvement qui semble s'envoler avec une faiblesse dans un côté, traînassant et tournant en rond au-dessus d'explosions feutrées et dispersées pour nous amener à l'intérieur d'une horlogerie et de ses tintements bigarrés. House of Chimes, le titre, donne le coup d'envoi à un album à la fois sombre et très poétique où la multitude de tintements dérègle le temps. Robert Fox a trouvé une nouvelle formule pour interroger notre désir d'aller plus loin dans son univers musical, en liant à son éternel piano des notes qui tintent comme les résonnances des différentes clochettes et des carillons dont les miroitements à la lumière s'insèrent en tons dans cet univers pourtant bordant les limites des ténèbres. Il y a aussi cette magnifique chanteuse cyborg qui s'est se faire discrète comme très sensuel dans les corridors de HOUSE OF CHIMES dont on ne sait jamais sur quoi nous allons tomber une fois passé ses limites. Bref, un album lyrique où les frissons sont aussi nombreux que nos enchantements.
Ce sont d'immenses vagues de sons et d'eau, sous forme de sons, que Murmuration secoue un peu les ambiances avec un rythme initié et soutenu par des cliquetis de cymbales qui volètent doucement sur les coups répétés des percussions électroniques. Le rythme est dans du bon rock tribal dans une course contre le temps et emprunte une voie mélodieuse avec un piano et des arrangements conçus dans la poésie. Une voix fredonne avec une étrange sensualité dans les ahhh et les humm en ahhh, imitant des chants d'oiselets magiques qui vont et viennent dans de gracieuses pirouettes sur un rythme devenu ambiant et ornementer de très beaux effets percussifs aux tonalités de bois mou. Un très bon titre qui a besoin de ces murmurations éthérés avant de conclure. La première impression qui nous vient en écoutant l'ouverture de The Devil's Puzzle est d’entendre du Mike Oldfield, période The Songs of the Distant Earth. Et puis arrive ce piano qui déroule son clavier dans une texture qui nous rappelle que Robert a déjà joué avec Code Indigo. Son ouverture est couverte d'une fuite d'eau. Le rythme s’installe avec la fragilité d'un métronome de bois avant de mordre dans un intense passage dominé des séries harmonique d'un piano et de lâcher prise dans une vision de rythme caraïbéen. Le xylophone nous fait danser sur les ailes d'une nuée de violons aux envolées lentos dans une deuxième partie qui est plus intense et plus animée. L'ouverture de Prayers of Light and Darkness me plonge dans mes souvenirs de Mind Over Matter avec cette voix féminine dont le timbre feutré résonne entre les lignes de synthé qui ondoient devant mes yeux. De lentes nappes de Mellotron implantent ce pouvoir obscur d'une orgue dans une ambiance ésotérique où le penchant astral des ambiances confrontent les visions sibyllines d'une musique qui prend subitement une tangente très près de Tangerine Dream dans Legend. Le rythme inexistant demeure secoué par ces explosions sans conséquences qui animent les mouvements ambiants de HOUSE OF CHIMES où les carillons tardent toujours à sortir de leur tanière. Les roulements de grosses caisse à la Vangelis font rouler nos frissons et calment l'intensité des ambiances, permettant à Robert Fox de nous charmer avec son piano qui sert de lit à cette voix si suave et pourtant sans âme. Entre les tambours résonnants et les murmures, la finale nous attire dans l'antre du temps et de ses carillons annonçant la seconde partie de cet album toujours aussi insaisissable.
Une onde bourdonnante fait frémir quelques petites clochettes et des lignes d'un synthé onirique en ouverture de Lockdown. Tiraillé par ses instants de rythmes contenus dans l'essentiel et ses phases ambiantes plutôt éthérées, la musique et ses éléments d'ambiances reprennent les grandes lignes des 31 premières minutes de l'album dans un long moment de tendresse atmosphérique. Le moment crucial arrive un peu avant la 4ième minute avec des cris qui se fondent à des lamentations orgasmiques contraintes de rester dans l'anonymat. Une lourde explosion s'abat au même moment, mettant Lockdown sur l'arrêt avant que tous ces éléments ne forment la détonation d'une violente explosion tribale annoncée par un Gong un peu après la 5ième minute. Ce rythme ethnique est entraînant et propulsé par des percussions en mode tam-tam de guerre. Nos oreilles ont droit à un fascinant duel des capacités vocales du logiciel de synthé qui semble pouvoir exploiter une chorale avec autant d'intonations qu'il en faut. Cette danse tribale excède les 2 minutes, restituant ce splendide titre que l'on veut réentendre dès que possible dans une finale qui remue les cendres de son ouverture. Depuis l'ouverture de House of Chimes jusqu'à celle de Lockdown, Robert Fox nous a habitué à des textures refoulées qui deviennent compactes et toujours sur le point d'exploser. Mais jamais comme ici et sur le rythme soutenu par les tic-tac du temps de Dark Mirror qui coule comme un excellent mariage des genres de David Wright et Code Indigo dans une belle ballade électronique bien musicale et entraînante qui a raison de 3 phases ambiantes. Un autre très bon titre dans la tradition la plus pure du label AD Music. Glimmer of Light propose un beau down-tempo suggestif avec cette intonation de saxophoniste en peine d'amour sur un rythme structuré sur des battements réguliers. Un rythme qui traverse ses phases d'ambiances mélancoliques pour revenir avec tout son aplomb, défiant ces rayonnements des voix célestes qui tirent Glimmer of Light vers une apparence plus astrale. Rainbow's End nous amène de l'autre côté de l'inconnu avec ces explosions assourdies et ces fascinantes déclarations de soumission des carillons d'où émerge une fascinante berceuse, à peine audible dans ce tintamarre ambiant, portée par les ailes des nappes orchestrales. Dès que la voix surréelle surgit, ce drame cinématographique devient plus convaincant en tissant une finale digne de l'univers de HOUSE OF CHIMES.
Un album très intense et plus porté par des rythmes en constantes évolutions avec des dénouements inattendus, je suis d'accord avec le guide de presse de AD Music à l'effet que ce dernier album de Robert Fox demande une bonne dose d'amour et de patience pour ses nouveaux fans. Par contre, je n'ai pas vraiment peur pour sa base de fans des premiers instants puisque la musique de HOUSE OF CHIMES est à bien des égards assez comparable aux œuvres antérieures du musicien Anglais. Pour ma part, j'ai été très touché par moments dans cette œuvre aux dimensions titanesques qui a toujours cette touche de Moyen-Âge Anglais. Excellent, c'est un des très bons albums de Robert Fox qui fait bon entendre ces temps-ci.
Sylvain Lupari (14/11/20) ****½*
Disponible chez AD Music
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