“On apprend à aimer ce Lift a Feather to the Flood seulement si on recherche seulement une forme musicale expérimentale et abstraite”
1 We Shed the Remnants of Last Winter 7:13 2 Twining Branches Make a Path 9:53 3 Glistening on wet Tarmac 5:45 4 Seedlings Push Through Cracks 8:19 5 These Storms Cast Shadows on the Ocean 7:41 6 We Once Forgot 10:24 7 That We Were Made of Stars 8:16 8 We Will Walk Away Unscathed 8:24 Soundscape | SP030
(CD/DDL 65:56) (Ambient, abstract music)
Une note de piano éclate et son rayonnement apporte une lueur mélancolique aux ondes de synthé ermites qui oscillent comme ces vents dessinant des arabesques sur les dunes. Pensif, Robert Rich étale ses notes qui tombent comme des dominos sonores en conformité avec les visions d'un titre comme We Shed the Remnants of Last Winter. Personnifié par ces ondes âpres de Markus Reuter à la Guitare Touch ou encore sur le Prophet-6, l'hiver semble avoir été plus amères que les restants. Lorsque Robert Rich et Markus Reuter avaient uni leurs destinés musicales pour la première fois, c'était en 2007 avec l'album Eleven Questions. Les visions des deux artistes avaient débloqué en un album d'ambiances et de rythmes tribaux avec une touche plus expérimentale pour l'époque. Dix ans plus tard, le duo remet ça avec un album nettement plus ambiant. Avec un Robert Rich pensif au piano et un Markus Reuter sculptant des ambiances spectrales. Composé en 2 jours, LIFT A FEATHER TO THE FLOOD est un album d'improvisations qui s'agrippent aux visions de deux musiciens qui adorent bousculer l'ordre des choses. À la fois intimiste et égocentrique, la musique flirte avec une agressivité latente qui atteint des sommets d'intensité dans les tons et non les rythmes qui sont tout à fait inexistants. Un album difficile à cerner et à apprivoiser qui s'adresse à ceux qui aiment qu'un piano effiloche sa mélancolie dans une douche d'effets sonores dissonants qui contre toute attente atteint le niveau d'émotivité du piano. Démontrant que l'union de Robert Rich & Markus Reuter est autre chose que du pur hasard.
Si la musique est d'ambiances, les éléments qui la compose peuvent contenir des éléments de rage comme dans Twining Branches Make a Path où le piano éclate avec force alors que des lames de synthé et/ou de guitare cisaillent ces ambiances comme des écorchures de fleurets faites avec grâce. Glistening on wet Tarmac nous ramène plus près des œuvres d'ambiances que Robert Rich a réalisé avec Steve Roach. Idem pour Seedlings Push Through Cracks où le piano est plus mélodieux dans son enveloppe de nostalgie. Sombre et ténébreuse, la tranquillité de These Storms Cast Shadows on the Ocean est balayé par des ondes de métal froissé. Le piano devient tout autant dissonant, comme bousculé de peur par ces vagues qui roulent comme des troupeaux de lames éraillées. We Once Forgot propose une approche plus psychédélique avec des battements circulaires conçues avec des ondes oscillatoires roulant comme ces cercles spirographes qui hypnotisent les sens. Toujours flegmatique derrière son piano qui semble être à des lieux des effets de Mark Reuter, Robert Rich déroule ses notes sans attache, ni visions harmoniques. That We Were Made of Stars est un peu dans le même moule, même que différentes lignes de piano sculptent des paysages décaphoniques et même si Markus Reuter est plus sage avec son art tonal abstrait. We Will Walk Away Unscathed fait bande à part. C'est un petit bijou de tendresse avec un piano très mélodieux qui coule sa nostalgie dans une symphonie de bourdonnements et de corrosions tonales.
Effectivement, Robert Rich & Markus Reuter s'entendent comme larrons en foire dans cet univers de discordances où certains éléments convergent alors que d'autres s'ignorent totalement. On apprend à aimer LIFT A FEATHER TO THE FLOOD que si nous sommes à la recherche d'une musique expérimentale. Abstraite aussi, avec un zest de mélancolie qui prend de brèves allures harmoniques, cette musique est confortablement enveloppée d'une mixture de nappes de synthé et de guitares aux couleurs d'un ciel témoin de feux infernaux. Comme quoi la perception des uns ne va pas de pair avec la vision des autres!
Sylvain Lupari (28/02/19) ***½**
Disponible au Robert Rich Bandcamp
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