“Une œuvre colossale et un album où la mélodie flirte avec la mélancolie sur un style Berlin School dans ce qui est le plus pur”
1 The Unknown Soldier 11:37
2 The Battle of the Somme 17:23
3 Acoustic Shadows 13:47
4 Assault 10:04
5 Desolate Fields 8:42
6 Dresden 9:24
(CD/DDL 70:56)
(Berlin & Netherlands Schools)
(Acoustic Shadows a été le premier album de Ron Boots que j'ai chroniqué. C'était en Juin 2006!)
Je devrais avoir honte. Tout ce temps que j'ai pris avant de vous parler de Ron Boots…Désolé. Ron Boots est l'un des personnages les plus importants et influents de la nouvelle génération de la Musique Électronique orientée par séquenceur. Ce que l'on nomme Berlin School! Ou le New Berlin School selon la teneur du son et des ses équipements, pour la plupart numérique. Mais ce n'est pas le cas de Ron Boots qui est très actif dans les sphères de la MÉ, notamment en Hollande sa patrie. Depuis la fin des années 80 il est très actif dans les Pays-Bas, autant comme artiste-compositeur que producteur et réalisateur. ACOUSTIC SHADOWS est son 29ième album, en comptant les cassettes et ses collaborations. Et ne vous fiez pas au titre, il n'y a rien d'acoustique ici! L'expression Acoustic Shadows est liée à la guerre. C'est un phénomène sonore assez particulier. C'est un tonnerre issu d'une lourde détonation que les personnes au loin peuvent entendre. Mais pas celles qui ont initiées cette déflagration où qui en sont proche. Plus près de notre époque, ACOUSTIC SHADOWS est une dernière offrande musicale qui dénonce les guerres et se veut un hommage à tous les guerriers, de toutes les périodes.
Et c'est avec une solide frappe que débute The Unknown Soldier. Grave, la première séquence est ensevelie par une couche de synthé qui s'harmonise au travers les vents qui parfois ressemblent à des jets d'artillerie. Subtilement, ce premier agencement se transforme en superbe mélodie guidée par de pompeux synthétiseur et un jeu franc des percussions. The Unknown Soldier est un titre fort mélodieux qui laisse ses traces dans l'oreille. Le genre de titre qui est riche et aux orientations inattendues que l'on veut ré entendre avant que ça finisse, car on a l'impression d'avoir loupé un truc quelque part tant il y a de choses. Entre chaque titre, une voix d'homme ou de femme se fait entendre pour nous conter des brefs moments d'histoire. The Battle of the Somme suit les cendres du soldat inconnu avec une intro mellotronnée. Une fine ligne basse se dessine à l'horizon, comme ce nuage flottant que laissent les explosions sur un dur chantier de désolation. On le voit et on le sent, témoignant de l'incroyable talent de compositeur et de producteur de Ron Boots. L'atmosphère est triste et se dissipe peu à peu sur cette ligne qui s'anime de plus en plus sur un rythme décousu. Les synthés sont enveloppants et courtisent ce rythme en perdition, donnant une dimension disproportionnée en égard de la ligne maîtresse. L'effet est étrange et envoûtant. Un long titre aux ambiances un peu tristes. La pièce-titre enchaîne sur le même pas, mais pas pour longtemps. Les percussions s'animent avec les clés de claviers. Les coups sont plus pesants avec des effets prolongés. Le rythme s'anime et se cherche parmi des coups de peaux et un beau synthé fort textural et enveloppant. De longues complaintes s'échappent avec grâce et richesse, donnant une direction bouclée qui cherche à se délover sur des percussions qui prennent de plus en plus la commande. Du travail de précision, de la Musique Électronique hautement élaborée et travaillée. De la MÉ progressive!
Après l'explication théorique sur les ombres acoustiques, Assault démarre avec force. Une séquence nerveuse et fébrile tournicote parmi des percussions hautement dosées. Les deux éléments s'entrecroisent et tergiversent en attendant une ligne de basse s'énerver. Tel un vol planifié, les éléments de rythmes virevoltent et s'entremêlent avec harmonie sur des couches de synthé de plus en plus épaisses. Et, afin de bien nourrir le décor, une autre ligne de synthé plus saillante tournoie en boucle avec puissance, donnant à Assault une profondeur et une richesse sonore des plus mélodieuse. Un autre grand titre! Desolate Fields est à l'image de son titre. Après une narration assez pathétique, pour ne pas dire horrible, sur les effets de la guerre et de ses blessés, un synthé libère une ligne flottante sur une déjà sombre et saisissante. Encore une fois, Ron Boots nous fait voir par sa musique. Nous voyons les blessés, les scènes narrées auparavant. Tout cela sur une musique qui sent la désolation et transpire un respect profond des combattants. Avec l'arrivée des alliés, la guerre prend fin ainsi que ACOUSTIC SHADOWS avec Dresden. Un titre nerveux et nourri avec des effets de grosses riffs sur des accords nerveux qui voltigent sur le clavier avec aisance. Les percussions sont féroces et font la lutte à des bons solos de synthé qui se mélangent aux arômes d'une six-cordes.
Finement fignolé et bien encadré, ACOUSTIC SHADOWS est une œuvre colossal. Un album où la mélodie flirte avec la mélancolie sur une étiquette de Berlin School dans ce qu'il y a de plus pure. Une Berlin School plus actuelle avec une essence de la Netherlands School de par sa lourdeur et ses rythmes dirigés par des percussions électroniques. Avec sa créativité et son travail de studio, Ron Boots réussi à nous faire voir et sentir sa musique. Il nous amène là où il voulait nous amener. Seul un talent raffiné et maturé peut arriver à ce stade. C'est du grand Boots! Il nous touche et nous émoi sur un sujet toujours difficile et hélas trop souvent d'actualité.
Sylvain Lupari (28/06/06) *****
Disponible chez Groove NL
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