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Writer's pictureSylvain Lupari

SENSORY++: Exoversum (2020) (FR)

La musique de Sensory ++ tourne autour de ces batailles éternelles entre ambiances cosmiques et séquenceurs rapides

1 Creating the Portal 12:00

2 Beauty of Chaos 4:38

3 Becoming Energy, Nothing Matters 10:35

4 These Laws of Physics Don't Apply Here Anymore 15:08

5 The Way Back Home 7:35

6 We'll Never Be the Same Again 8:55

7 The Vast Universe is not so Vast Anymore 12:25

(CD/DDL 71:22)

(Cosmic Rock, ambient & Berlin School)

Ondes menaçantes légèrement réverbérantes, gouttes soniques tombant du Cosmos et échantillonnage d'une discussion lors de la mission Apollo 9; les ambiances introductives de Creating the Portal sont cernées dans une texture sonore cinématographique qui avale notre curiosité. Des accords gras se mettent à résonner autour des 90 secondes, laissant passer entre leurs rayons une autre ondée de ces gouttes qui seront un élément ornemental de EXOVERSUM, mais sortant surtout des limbes un fascinant battement hydraulique qui ouvre le rythme de Creating the Portal. Un mouvement circulaire du séquenceur, fléchissant comme un hélicoptère faisant du slalom avec les vents, se promène d'une oreille à l'autre. Ce mouvement est franc et soutenu. Allié aux battements, devenus frottements, hydraulique, Joost Egelie ajoute un 3ième élément à son tricot rythmique. Cette fois-ci c'est un mouvement vif d'une ligne du séquenceur qui fait dribler ses ions autant dans la symbiose rythmique déjà en œuvre ainsi qu'une vision nettement plus harmonique. Une mélodie spasmodique sur un tapis de basses-séquences roulant plus vite que la lumière, Sensory ++ a déjà gagné ma ferveur. Nous sommes en pleine période glorieuse de Software ici avec des effets organiques et percussifs qui veillent en arrière-plan alors que le synthé dégage un banc de brume céleste. C'est ainsi pour ces 10 prochaines minutes, avec un peu de variance dans l'intensité des brumes orchestrales, où Creating the Portal est un pur New Berlin School que l'on manque déjà dès le début de Beauty of Chaos. WoW! Quel entrée en la matière mes amis!

J'adore la musique de Sensory ++. Et le musicien Belge se surpasse sur cet album en équilibrant harmonieusement les moments mélancoliques et le fil des ambiances à des rythmes brassés par un séquenceur en mode Berlin School avec les tonalités contemporaines. Et comme le dépeint si bien Joost, la musique de Sensory ++ tourne autour de ces éternels combats entre les ambiances cosmiques et les séquenceurs rapides. Entrepris un an après le merveilleux Art of Sadness, EXOVERSUM, qui signifie transcender notre propre univers pour en revenir avec rien de plus et de partager ce nouveau savoir, a été pensé pour célébrer le dixième anniversaire du premier album de Joost Egelie; Boundaries of Infinity. Musicien méticuleux qui ne laisse rien au hasard, ça lui aura pris près de 2 ans pour finaliser un album auquel il a greffé différents échantillonnages de cosmonautes dans un univers musical riche en effets sonores, dont de très bons effets organiques, et où le Cosmos est toujours à portée d'oreilles. De Software à Vangelis, sans oublier Redshift ni Tangerine Dream, cet album est une pure merveille tissée entre l'analogue et le digital qui devrait plaire aux amateurs de MÉ.

Les gouttes soniques immergent Beauty of Chaos dans une ambiance cosmique psychédélique. L'enveloppe est saisissante avec un doux piano qui promène ses notes pensivement dans une texture remplie des cliquetis de ces gouttes qui semblent s'émietter comme des os de cristal dans une belle ambiance interstellaire. Il y a de la vie, il y a une âme au piano! Et c'est très beau. Becoming Energy, Nothing Matters est un titre qui naît de la matière organique d'un autre système solaire avec une lente introduction munie d'une chorale astrale et des nappes de violons cosmiques qui avancent en enveloppant les éléments de cet autre univers avec une infinie tendresse. Des soupirs de synthé, gras comme ceux d'un gentil géant, tombent ici et là, créant un lit de réverbérations où s'appuient des orchestrations cosmiques. Une ligne de séquence se greffe à cette lente valse cosmique. Son mouvement timide et saccadé modifie l'axe des ambiances pour devenir un genre de chorégraphie lunaire dont le rythme fuyant par secousses est aspiré par les orchestrations cosmiques. Intense et enveloppant. Nous arrivons au cœur de l'album avec le très ambiant These Laws of Physics Don't Apply Here Anymore. Nous sommes en plein blizzard cosmique avec des wooshh et des wiishh hurlant et sifflant entre nos oreilles dans un décor en deux dimensions qui les remplit à ras bord. Nous retrouvons le chemin du rythme avec The Way Back Home qui jouit d'une incroyable richesse sonore. Tant que l'on perd ce rythme, qui n'a rien à envier à Creating the Portal, d'oreille une fois de temps en temps. C'est un gros rock cosmique inspiré par les petits bijoux de Jean-Michel Jarre, mais dans une texture nettement plus alambiquée.

We'll Never Be the Same Again nous ramène aux échantillonnages de Apollo 9 dans une vision plus distordue. Ici aussi nous avons droit à un 90 secondes d'ambiances avant que le rythme naisse par une vision de rock électronique dessiné dans les frontières de bruits blancs et de radioactivité cosmique. Les effets percussifs et organiques sont juste bien dosés avec ce petit goût d'y revenir encore. Du bon rock électronique cosmique créatif et bien ajusté dans une vision psychédélique progressive. Je ne sais pas si vous allez découvrir, comme moi, ce petit air de Stratosfear circulant dans une masse sonore tellement dense qu'on se demande comment fait le séquenceur pour stimuler ce rythme soutenu. The Vast Universe is not so Vast Anymore nous introduit à une finale riche rempli des parfums de Vangelis, quel nappes de synthé ici mes amis, qui tentent de charmer le discours harmonique des bruyants arpèges. Ce combat ambiances et harmonies cache une structure de rythme qui bat en sourdine, tissant ces ruades de rodéo derrière ce velum d'intrigues et d'harmonies fragmentées pour nous amener dans une finale embellie par un clavier et sa mélodie évasive qui expire dans le néant. Et de ce néant vient une autre écoute de EXOVERSUM qui est un album splendide et ce à tous les niveaux. Même la longue phase ambiante regorge de beautés qui semblent effectivement venir d'un autre univers.

Un album qu’il faut posséder sans fautes et qui transcende le oh combien magnifique Art of Sadness.

Sylvain Lupari (17/09/20) *****

Disponible au Sensory ++ Bandcamp

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