“Intense et très bon, FIVE déjoue les pronostics avec un album que l'on espérait plus”
1 Circular Sequences 20:32
2 Deep Sequences 23:36
3 Reflective Sequences 21:36
(CD/DDL 65:46)
(New Berlin School)
2019 a été une grosse année pour Laurent Schieber. Le musicien-synthésiste de France a réalisé pas moins de 4 albums tout en se produisant dans différents festivals. FIVE est ce 4ièmealbum, les autres étant The Lunar Trilogy, Codex on the Flight of Birds et Over There, et propose aussi 3 longs titres construits sur le modèle de MÉ minimaliste qui fait toujours les délices de ses fans. FIVE, c'est aussi pour souligner les 5 ans de Sequentia Legenda dont le premier album, Blue Dream, arrivait dans les bacs en Janvier 2015. Cinq ans plus tard et 5 albums plus loin, Laurent Schieber sent le besoin de souligner son événement avec un album toujours de style Berlin School où les mouvements circulaires des arpèges et des séquences illuminent toujours nos oreilles dans son style encore très conservateur. Mais cette fois, il y a quelque chose de différent dans l'univers de Sequentia Legenda. Le son est plus dense et plus compact, dévoilant une muraille musicale propice aux tonalités des séquences qui scintillent comme des colliers de perles dans une rivière circulaire encadrée de mille miroirs. Les voies de l'intensité sont aussi plus complexes et des éléments organiques jaillissent ici et là, ajoutant une douce touche de psybient à une musique qui reste toujours très attirante.
Des petits battements vifs et feutrés font jaillir des gerbes de sons en ouverture de Circular Sequences. Ces petits pas suivent une chorégraphie enfantine avec une sensation de trépignement dans une structure qui dessine son arc de rythme giratoire. Une autre ligne émerge et se sauve comme ce canard voulant échapper à un prédateur par un soir de brunante. Ces petits pas disparaissent dans une ombre de réverbérations et une nappe de brume grandissante qui étend son voile anesthésiant avec ces ombres de voix séraphiques qui peu à peu éveillent un ruisselet de séquences circulaire dont les tonalités ardentes scintillent comme un cercle de feu. Il n'y a pas 4 minutes au compteur que Circular Sequences a déjà changé de peau. Si le rythme reste ambiant et calme, les tonalités du séquenceur perce nos tympans avec ce carrousel allégorique qui fait monter et descendre une ligne de rythme minimaliste qui injectera quelques nuances, majoritairement émotives, dans le flux perçant des tonalités du séquenceur. Nos tympans carillonnent de vertige après les 20 minutes de Circular Sequences. Toujours en privilégiant une tonalité qui pince l'ouïe, Deep Sequences déploie une vision plus lunaire avec une masse de brouillard astral où s'ébattent les éclatantes tonalités des arpèges séquencés. Des bandes de voix fredonnant une mélodie absente sont attachées à cet amas de brume flottant. Réminiscence de Klaus Schulze, tout comme ce choix des tonalités des arpèges ici qui sont moins perçants que dans Circular Sequences. Les deux titres s'apparentent beaucoup, tant et si bien qu'on peut les confondre après les 120 secondes de l'ouverture. C'est à cet instant qu'on nous avons l'impression qu'ils se chevauchent puisque les textures sont très liées. C'est ainsi que l'on devine la suite des choses avec les sobres percussions qui s'invitent après les 7 minutes. Par la suite, Deep Sequences s'endormira avec ses nouveaux invités et laissera la structure minimaliste se coiffer de nouvelles parures qui ne changent pas l'apparence du rythme mais la profondeur de ses ambiances qui ajoute sa couche d'intensité tranquillement, tranquillement.
Accroissant son intensité à mesure que les voiles de sa texture s'enrichissent de passion, Reflective Sequences est un superbe titre et de loin mon favori sur ce FIVE. Des vagues astrales qui roulent sur les berges du cosmos, des effets électroniques des années 70, une nappe de synthé dont la réverbération d'une nappe d'orgue berce les carillons du vide. Et des percussions hésitantes! Couche de musique et d'ambiances par-dessus couche, son introduction fascine avec ces courants musicaux des années vintages où se sculpte une ligne de mélodie d'un clavier dont l'obsession prend forme avant sa complète éclosion. Et de ce bruissement sonore émerge un étonnant caquètement d'un palmipède non-répertorié, alors que la mélodie du piano s'enfonce dans nos oreilles avec le nom; ver-d'oreille. Obsédante, cette mélodie pianotée sur un clavier électronique reste enracinée dans notre dévotion, même si des percussions aussi sobres mais plus percutantes que dans Deep Sequences tentent de la replacer dans sa zone d'éclosion. C'est un grand titre dans le répertoire de Laurent Schieber qui profite du tremplin musical de Codex on the Flight of Birds afin de tracer les lignes de son futur.
Intense et très bon, Sequentia Legenda déjoue les pronostics avec un album que l'on espérait plus, tant le musicien semblait se plaire dans sa zone de confort. Et il fallait qu'il en sorte s'il voulait faire progresser sa musique. C'est chose faite et il ne manque que les solos de synthé… Laurent m'a chuchoté que ça s'en vient. En attendant, ce FIVE est un incontournable qui demandera un ajustement de notre part.
Sylvain Lupari(07/03/20) ****¼*
Disponible au Sequentia Legenda Bandcamp
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