“Un album audacieux conçu dans des visions qui nous éloignent de la base de la musique en tant que tel”
1 incipit 9:06
2 TEmporalis I 2:16
3 MORES 10:36
4 TeMporalis II 2:48
5 EFFUGIENDI 10:40
6 TemPoralis III 2:13
7 NON 10:02
8 TempOralis IV 3:59
9 AUXILIUM 8:39
10 TempoRalis V 2:54
11 FIET 8:42
12 TemporAlis VI 1:36
13 UNUM 9:33
14 TemporaLis VII 2:29
15 CUM 10:56
16 TemporalIs VIII 2:38
17 UNIVERSO 6:59
18 TemporaliS IX 3:48
19 exire 5:01
(CD(r)/DDL 115:06)
(Experimental EM)
Est-ce que je devais en parler? Écrire à propos de ce nouvel album à sortir sur l'étiquette Cyclical Dreams? Parce que cette aventure vers une autre galaxie sonore s'inscrit comme étant une des plus audacieuses, de ce que j'ai entendu à date, du label Argentin. Sommes-nous au royaume de l'anti-musique? De sources de bruits comme nouvelle mosaïque sonore? Le débat reste à faire. Commençons par le début! Qui est SONICrider? Jurgen Winkel est un artiste-producteur-musicien des Pays-Bas. Son leitmotiv créatif est de stimuler les sens en combinant des sources de musique électronique et des sons analogues afin de produire une musique très expérimentale qu'il juge dansable. Il vise à faire des spectacles intimistes où le public voyage à travers sa galaxie de sons. Peut-on réellement danser sur la musique de ELAPSUS? À moins de faire partie de la célèbre troupe de danse La La La Human Steps ou encore posséder ce corps élastique de Louise Lecavalier et/ou de ses élèves, les probabilités sont minces à travers les presque 2 heures de cette nouvelle offrande de Cyclical Dreams. ELAPSUS, pour s'enfuir, est un album-concept qui tente de décrire le comportement humain face aux défis de la planète. C’est la réflexion en sons de SONICrider sur le comportement d'évasion que les humains adoptent vis-à-vis la dégradation des phénomènes climatiques et des dangers planétaires qui guettent nos sociétés depuis l'apparition de la COVID-19. Fuir la réalité au lieu d'y faire face est de reporter cette responsabilité aux prochaines générations qui auront comme modèle notre vision de fuir les réalités. Pour sa part, Jurgen Winkel est convaincu que nous devons faire un avec l'univers. En faire partie, sans le gouverner ni le changer!
Mais comment ça se traduit en musique? Primo, l'album-téléchargement est divisé en 2 temps. Il y a la portion très expérimentale et majoritairement atmosphérique sans sources de vie rythmique, des 9 parties de Temporalis. Totalisant près de 25 minutes, ces courts interludes sonores sont à la fois des compléments qui précèdent, parfois suivent, les 10 autres titres de ELAPSUS. Mais souvent, ils sont totalement disconnectés afin d'injecter encore plus une vision expérimentale à l'album. Ils peuvent être aussi assez musicaux, comme TeMporalis II et TempoRalis V, ou ambiant avec une possibilité de méditation, je pense entre autres à TemPoralis III, TempOralis IV et TemporaliS IX. Pour les autres, la dissonance et les discours sont des sources qui intriguent autant qu'ils peuvent irriter la croissance des tympans. Ça dépend des goûts! J'ai bien aimé le très extraterrestre TemporaliS IX. Ce sont les titres entre ces intermèdes soniques qui sont les plus intéressant. Et encore, certains ont les diapasons des Temporalis.
Incipit est un titre lent. Les fluctuations des ondes du synthé prennent différentes teintes tonales qui se situent entre la musique et ses effets de distorsions. Elles structurent ainsi une lente procession, à laquelle se greffent des basses pulsations et de sobres percussions, qui avance vers une forme plus expérimentale de musique atmosphérique. Mais ça s'écoute bien. MORES est un titre qui se découvre aussi assez bien. Son débit lourd et lent martèle nos tympans avec une sourde résonnance, alors que son enveloppe musicale est divisée entre une vision organique et électronique. Il y a beaucoup d'effets sonores qui flirtent avec la dissonance et la distorsion. Un phénomène récurrent dans cet album. Sa finale peut agresser l'ouïe. Ça aussi, c'est un phénomène récurrent! Il faut faire preuve de patience avec EFFUGIENDI puisqu'après ses 2 minutes d'effets discordants, une superbe structure de rythme pulsatoire magnétise nos sens avec une saveur des années psychédélique vintage. On dirait une procession, une marche de guerre d'une tribu d'iconoclastes. Idem pour le percutant CUM. Ces 2 titres, ainsi que UNUM sont parmi les bons moments de ELAPSUS, puisque SONICrider teste, pour la grande partie de son album, la tolérance de notre désir d'aventures au royaume de la musique expérimentale à hautes voltiges sonores discordantes. NON étend ses boucles répétitives dans un tapage électronique assez particulier. AUXILIUM est un titre difficile qui plaira autant aux fans de Władysław Komendarek que de Conrad Schnitzler. FIET offre un festival de boucles minimalistes avec de fines modulations aptes à faire planer nos souvenirs dans le temps de La Messe pour le temps présent de Pierre Henry et Michel Colombier. Ça se laisse découvrir assez bien! Idem pour UNUM qui est au même diapason que EFFUGIENDI avec des battements successifs et répétitifs dans une masse de sons plus dissonants. CUM est encore plus fou, séduisant et vivant que ces deux titres, rehaussant l'intérêt pour redécouvrir l'ensemble de ELAPSUS de cet artiste Néerlandais qui propose avec UNIVERSO un titre d'ambiances cryogénique de même nature que les œuvres noires et froides de Stephen Parsick dans sa série Doombient. Exire boucle la boucle avec une structure qui s'apparente à celle qui ouvrait ELAPSUS, incipit.
Voilà le topo d'un album-téléchargement qui n'est pas pour toutes les oreilles. J'y ai frotté les miennes parce que j'aime écouter les propositions de Cyclical Dreams et parce que j'ai surtout appris à respecter ce label qui n'a jamais eu peur de nous sortir de notre zone de confort en nous proposant parfois des œuvres très audacieuses. ELAPSUS dépasse, et de loin, celles de Ariel Raguet dans The New Memories et de John Scott Shepherd dans Realms Beyond. Quoique ce dernier avait une belle texture extraterrestre. Deux albums aux antipodes d'une MÉ méditative et mélodieuse! Mais, il y a des passages qui valent la peine de découvrir dans cet audacieux album conçu dans des visions qui nous éloigne de la base de la musique comme tel de SONICrider.
Sylvain Lupari (19/10/22) ***¾**
Disponible au Cyclical Dreams Bandcamp
(NB : Les textes en bleu sont des liens sur lesquels vous pouvez cliquer)
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