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Writer's pictureSylvain Lupari

Sophos Tales from Urania (2023) (FR)

Un solide album qui devrait plaire aux amateurs d'une MÉ cosmique ayant une vision plus progressive du Berlin School

1 Seasons in Gliese 9:10

2 A Dark Sphere 8:46

3 Thalassa 8:46

4 Other Sunlight 8:00

5 Mnemosyne 6:26

6 Cepheids 6:04

7 Tales form Urania 17:29

(DDL/CD-(r) 64:45)

(Progressive Berlin School)

Le projet Sophos de Ulises Labaronnie est un des nombreux artistes et musiciens-synthésistes qui font rejaillir tout le potentiel de la musique électronique (MÉ) faite en Amérique du Sud, principalement en Argentine. The South American School! Tiraillé entre ses influences de Tangerine Dream, Vangelis et Jean-Michel Jarre, Sophos repart à la conquête de nos oreilles avec un autre solide album qui prouve que MUEON n'était pas juste un album isolé dans la grande sphère de la MÉ moderne. Si TALES FROM URANIA a les prétentions d'être lyrique, de par la nature très poétique qu'Ulises utilise pour décrire chaque titre, la musique en est tout autrement avec cette fusion du séquenceur et des percussions électroniques qui tambourinent, pilonnent et martèlent des rythmes évolutifs. Ces rythmes transitent doucement pour atteindre des sommets avec une belle utilisation de la technique de cliquet du séquenceur et des charges à l'emporte-pièce des percussions électroniques dans un royaume où pétillent moult effets électroniques, dont certains ont une texture organique. Bref, un album construit sur des bases cosmiques qui se perdent dans des tourbillons de rythmes qui flirtent même avec une essence d'Électronica.

Seasons in Gliese démarre cet album avec élégance et rythme. Le titre évolutif accoste notre écoute avec des bips et des effets de dialogue intersidéral. Une nappe de brume bourdonnante encercle cette ouverture, suivie d'une pulsation de basse dont le lent débit donne l'opportunité au synthé de clamer sa mélancolie à travers des airs empreints de tristesse. Ces harmonies nostalgiques, les étoiles qui scintillent et les arrangements flirtent avec l'univers de Vangelis. Deux minutes plus loin, et le rythme s'installe. Un premier mouvement d'arpèges tournoyant en un cercle imparfait, ces harmonies plaintives et la basse bourdonnante en sont à l'origine. Le séquenceur s'active aussitôt avec deux lignes de rythme, dont une avec un splendide effet de cliquet, qui vont et viennent dans une forme ascendante. Une fascinante mélodie fractionnée nous plonge dans le monde de Tangerine Dream, album Exit, sur cette structure très électronique des années 80 que des percussions soutiennent avec des frappes sobres. Ces percussions redynamisent Seasons in Gliese qui entre dans une phase Électronica autour de la 4ième minute. Un solide titre avec de bons solos et de belles harmonies du synthé qui serait un bijou dans une compilation! A Dark Sphere suit avec une introduction qui va avec son titre. L'ambiance est nébuleuse avec de drôles de signaux électronique. Une basse pulsation arythmique qui rebondit comme du caoutchouc usé structure un rythme nerveux qu'un séquenceur appuie avec des ions sauteurs tout aussi agités. Les percussions et les éléments percussifs ornent cette structure, par moments on entend des petits pieds piaffer d'impatience, sont des éléments qui séduisent l'ouïe. Mais c'est la nappe de basse, rampante comme un vampire assoiffé, qui fait le charme de ce titre dont la structure s'apparente à du stop'n'go, sauf pour ses deux passage plus atmosphériques. Le titre profite de ses presque 9 minutes pour muter discrètement tout en maintenant une cadence assez rythmique. Le synthé est très bon, j'aime le son, et les élans gargantuesques de la basse apportent un élément de drame cinématographique au titre. Thalassa débute avec une douce mélodie dans le style de Noël avant de plonger dans une structure qui s'apparente au rythme nerveux de A Dark Sphere. Les percussions tambourinent des boom-boom semi technoïdes alors que le séquenceur alimente la structure avec des arpèges cadencés qui vont et viennent et qui complémentent ces éléments percussifs qui tintent et résonnent tout au long du titre. Il s'échappe seul autour de la 5ème minute, structurant une course zigzagante que des orchestrations et des lamentations de synthé enveloppent dans une texture cauchemardesque.

Après une ouverture éthérée qui flirte avec des éléments du Cosmos et terrestre, genre oiseaux, Other Sunlight fait entendre une belle mélodie électronique dans un style romanesque à la David Wright. Les arpèges moirés tournoient délicatement sous des lamentations du synthé et sur des percussions et séquences qui structurent une ballade électronique légèrement entrainante. Le mouvement est ascensionnel et se développe plus en rythme, alors que le clavier émiette des accords et que le synthé lancent des filaments cosmiques sur un maillage de percussions et de séquences au débit de plus en plus animé. Pulsations caoutchouteuses séquencées, séquences spasmodiques avec des effets de cliquet et percussions soutenues, Other Sunlight évolue vers un solide rock électronique très entrainant. Le synthé vit sur un autre timbre et lance des lamentations hallucinatoires qui nous guident vers une phase plus atmosphérique quelques 30 secondes après la 4ième minute. Le clavier fait entendre alors une mélodie sur une mitraille du séquenceur et de ses effets de cliquet. Les basses pulsations bondissantes font germer des boom-boom technoïdes et les percussions martèlent un pilonnage intensif sous de bons solos de synthé. Effets de friture, comme un vieux LP, Mnemosyne dansotte sur des percussions tibétaines. Le rythme est de nature méditative avec des arpèges qui s'ajoutent au carrousel des effets de percussions gamelans. Une ombre de basse ajoute une touche de mystère lorsqu'elle flotte et rampe sur le mur des ambiances. La texture sonore est riche de miroitements, de fritures de vieux vinyle et d'effets percussifs organiques, comme des queues de crotales agressives. Le rythme est en constante progression, tournoyant toujours dans cette texture kaléidoscopique ou des effets de percussions feutrées et assourdies interpellent constamment l'écoute. Le synthé disperse des lamentations qui s'ajoutent aux effets de réverbérations et de décalage, alors que le titre permute vers une phase légèrement plus rock électronique cosmique un peu avant la 4ième minute. La finale repose sur ces accords de clavier aux tonalités de rock progressif des années 70. Cepheids propose aussi cette structure de rythme évolutive et changeante. La structure oscille des courtes phases d'ambiances dramatiques, avec des accords graves qui tombent lourdement ainsi que des bons élans de basse résonnante, et surtout du rythme entrainant sis sur un maillage de séquences en mode course et de percussions bondissant comme si elles étaient enrobées de matière élastique. Le rythme embrasse des phases débridées, notamment à cause de la technique du cliquet du séquenceur, et le synthé élabore des lignes de mélodies ainsi que des solos qui répondent aux assauts de la basse.

La longue pièce-titre débute assez tranquillement avec des effets de percussions gamelans qui tintent dans les effets vibratoires de la nappe de basse. Les étoiles scintillent dans ce panorama de méditation transcendantale pour une 60taine de secondes. Dès lors, le séquenceur lance une ligne qui galope pour revenir aussitôt, comme une fronde élastique électronique. La basse bourdonne et des petits pas nerveux courent en tous sens, un peu comme les séquences. Indécis, le rythme qui bouscule la tranquillité de Tales form Urania embrasse les schémas déjà entendus dans l'album. Le séquenceur et les percussions entrecroisent leurs approches rythmiques pour un rock plus cosmique qui tournoie sur les amples mouvements sphéroïdaux du séquenceur. Le titre plonge dans une phase atmosphérique-psychédélique vers la 6ième. Le synthé y dessine de belles complaintes que le clavier épouse avec une approche empreinte de mélancolie. La basse bourdonne avec de lents élans tragiques. Le rythme se remet en marche un peu après la 7ième minute avec des séquences nerveuses qui sautillent et bondissent dans une arythmie chorégraphiée comme dans une danse moderne. Le synthé tisse un panorama céleste avec des arrangements d'une couleur unifiant le soufre et le bleu industriel, ainsi que des ombres patibulaires aux timbres de Tangerine Dream. Les percussions, et surtout leurs ornements percussifs, remplissent les oreilles de bonheur, en plus de guider la musique vers des phases qui sont plus dans un rock électronique flirtant avec l'Électronica. Il y a beaucoup d'éléments de Jean-Michel Jarre dans ce titre qui se termine dans une phase atmosphérique ténébreuse.

TALES FROM URANIA de Sophos est un solide album qui devrait plaire aux amateurs d'une MÉ cosmique ayant une vision plus progressive du Berlin School. Même si l'album flirte avec les 65 minutes et que certaines structures de rythmes se retrouvent sur d'autres titres, il y a pas de moments morts ni de minutes inutiles à cause de ses structures changeantes et d'une utilisation géniale du séquenceur et des percussions. Le synthé a une belle âme et d'aussi belles tonalités qui éveillent en nous une certaine nostalgie liée à l'éternel Vangelis. Un très bel album de Sophos!

Sylvain Lupari (01/12/23) *****

Disponible au Cyclical Dreams Bandcamp

(NB: Les textes en bleu sont des liens sur lesquels vous pouvez cliquer)

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