“Peu importe quand il a été conçu, Green Desert peut survoler les meilleures décennies en MÉ, soit les années 70 et 80”
1 Green Desert 9:31
2 White Clouds 5:03
3 Astral Voyager 7:05
4 Indian Summer 6:50
Jive Electro | C TANG 1
(CD 38:29) (Berlin School)
Que d'histoires et d'anecdotes sur la sortie de GREEN DESERT en 1986! De quoi alimenter ces longs débats autour de l'histoire et les légendes de Tangerine Dream. Selon des nébuleux bouts d'histoires, GREEN DESERT était censé voir le jour à la place de Phaedra en 1973. D'ailleurs, les enregistrements se seraient réalisés en août 1973. Pour des raisons obscures, certains parlent des contextes musicaux alors que Virgin aurait souhaité une sonorité plus commerciale que le space rock d'Ohr Music, les enregistrements se sauraient perdus et c'est Phaedra qui est sorti plutôt que GREEN DESERT. Plus de 12 ans plus tard, les enregistrements refont surface sur Zomba Music. Même là, les fans et les historiens sont sceptiques quant aux origines de l'album. Les purs, les durs sont outrés, car Edgar Froese (ce cher Edgar) n'aurait pas pu s'empêcher de rajouter des lignes et de overdubs sur les pistes originales avec des équipements qui n'existaient même pas en 73, créant encore plus de confusion autour de Green Desert et de sa provenance. Oui, mais la musique! Ah oui… La musique? Elle tout simplement sublime et dans l'esprit des premiers albums de la Tangerine Dream.
À elle seule, la pièce-titre traverse tous les courants musicaux de cette magnifique époque; longue intro ambiante avec un synthé aux airs flottantes auquel se greffe une ligne de réverbération errante. Des éléments de Klaus Schulze, qui placent la musique dans son contexte, errent tout au long de cette intro. C'est spacieux et flottant. La musique évolue autour des effets sonores de cette époque. Une subtile ligne de basse palpite, annonçant la venue des percussions, jouées par Chris Franke. Et oui, il était très bon à la batterie. La guitare Space Blues d'Edgar arrive. Le rythme est évasif et couvre les limites du rock spatial flottant avec un soupçon de psychédélisme de cette époque. Des couches de synthé en laine et de bruits électroniques des années 70 recouvrent cette lente procession. Le Space-rock est parti! Au bout de 9 minutes, la batterie de Chris Franke devient intense et Edgar à la guitare reste toujours évasif. Mais le rythme commence à devenir plus intense et plus soutenu. Les lignes de réverbération, ainsi que les chœurs chthoniens et les couches de synthé bleues brumeuses ajoutent plus de profondeur à la musique. Chris Franke, en pleine forme, amène Green Desert dans les territoires de Body Love avec une structure rythmique échevelée et un Edgar Froese stoïque à la guitare. Green Desert est en effet un superbe titre qui correspond sans aucun doute aux origines de Tangerine Dream et de la MÉ en général. Je dirais Body Love de Klaus Schulze, à cause des percussions et des stridents pépiements électroniques, Ricochet et Sorcerer.
En parlant de Sorcerer, White Clouds a beaucoup de ses apparences. Les bruits analogues argentés des synthés et un superbe roulement de batterie couvrent une très belle mélodie sifflotée par le synthé. Beaucoup d'effets de réverbération aussi sur ce dynamique rock cosmique. Court et doux! Astral Voyager (le principal sujet du débat autour de GREEN DESERT) est un morceau de musique formidable construit sur un séquenceur ultra-nerveux qui roule à grande vitesse. Le genre de séquences que nous n'avions pas l'habitude d'entendre à cette époque et qui ressemblent à des morceaux de Trans-Harmonic Nights de Peter Baumann. D'après ce que j'ai entendu, c'est à cette époque que Franke et Froese se sont enfermés en studio pour produire une multitude de nouveaux sons qui seront plus tard le sceau musical de cette fièvre expérimentale. Donc, un rythme tout à fait juteux sur un motif de séquence solide parfumé par de jolies couches de synthétiseur avec cette essence de mellotron familiers aux œuvres solo de Froese (Pinnacles). Une excellente piste! Indian Summer est un passage ambiant où les notes tombent avec intensité dans une mer de sons bercée par un synthé doux et rêveur. Le genre de musique qui a fait le bonheur des amateurs de musique flottante des années 70 et dont vous pouvez sentir les empreintes sur Wavelength.
GREEN DESERT a-t-il vraiment été écrit et produit en 73? Puis-je avoir des doutes? Mais je cois bien que oui pour une grande partie. Comme la pièce-titre et Indian Summer! J'imagine que des morceaux de musique ont peut-être été enregistrés sans la présence de Peter Baumann, ce qui arrivait souvent ces années-là, d'où l'excellent motif du séquenceur dans White Clouds qui doit être assez long à construire. Je placerai ces enregistrements dans l'ère post-Stratosfear. Quoi qu'il en soit, l'important est que ce soit un bon album. Un excellent même à sortir dans les années 80 avec ses parfums des années 70. Un must, seulement pour comprendre l'enchantement qui a entouré cet étrange duo qu'était Franke et Froese. Boy… ils étaient bons!
Sylvain Lupari (04/07/05) *****
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