“En fin de compte, Live Miles est un solide album, peu importe la controverse”
1 Livemiles I 29:52
(The Albuquerque Concert)
a Green Trail Part
b Section II
c Section III
d San Buena Ventura
2 Livemiles II 27:13
(The West-Berlin Concert)
a Caspian Sea
b Velvet Autumn
c Dolphin Dance
Jive/BMG CHIP 62 (1988)
Reactive EREACD 1024 (2012)
(CD 57:05) (V.F.)
(New Berlin School)
LIVE MILES est le dernier album de la courte association Tangerine Dream et Jive. Ce qu'on appelle la période Blue Years. C'est aussi le dernier album où figure Chris Franke, qui a quitté le groupe le 1ier Août 1987. En fait, et pas parce que c'est mauvais bien au contraire, LIVE MILES est aussi en quelque sorte le chant du cygne de Tangerine Dream et le premier d'une suite illogique de tromperies et d'arnaques qui serviront à remplir les grosses poches de laine du management ou des dinosaures financiers qui rôdent derrière les fantômes de TD. Un pan obscur dans l'histoire du groupe qui j'espère sortira un jour. Parce que les fans ont le droit de savoir ce qui c'est réellement passé à cette époque, et par la suite. Tout comme pour LIVE MILES, ils ont droit de savoir, à tout le moins comprendre, d'où origine cette idée de fabriquer en studio des faux albums en concert comme celui-ci, Soundmill Navigator ou encore The Perth Tapes du fameux I-Box. Situons-nous dans le contexte. À l'époque il n'y avait pas d'internet, ni de réseaux sociaux et les concerts du Dream passaient quasiment inaperçus dans les journaux locaux. Donc le fan qui s'est acheté LIVE MILES à cette époque ne savait pas qu'il s'agissait d'un canular pur et simple. Que c'était un faux album en concert où Edgar Froese y a Tangentizé les structures tout en y apportant des bouts de rythmes jamais joués en concert. Le résultat n'est pas mauvais, bien au contraire. Je pense que c'est un très bel album. C'est juste que ce n'est pas un vrai album en concert. Mais peu importe! LIVE MILES est sensé reproduire deux longs extraits de concert que Tangerine Dream a performé à Albuquerque le 8 Juin 86 et à Berlin au West Berlin Platz der Republik le 1er Aout 1987. Maintenant que nous savons que ce n'est pas tout à fait vrai, sautons dedans!
Livemiles I (The Albuquerque Concert) est composé de 4 segments; Green Trail Part, Section 2, Section 3 et San Buena Ventura. Trois jours plus tard, Tangerine Dream donnait un concert à Denver avec un setlist tout à fait différent et surtout, une musique toute aussi différente. Alors que les concerts de la tournée nord américaine débutaient par Pilots of Purple Twilight et Stratosfear, en fait le setlist tournait autour des albums Le Parc et Underwater Sunlight, Livemiles I nous plonge plutôt dans les ambiances de Tyger et de la pièce London ainsi que les hymnes rock électronique à la Optical Race, 2 albums qui sortiront en 1987 et 1988. Un oblong voile mellotronné à la Watcher of the Skies (Genesis) descend lentement pour s'évaporer dans des accords d'un rythme lourd et hésitant. Les notes tombent avec lourdeur, accompagnés d'une flûte hésitante sur un tempo qui a maille à se mettre en branle. On y entend des parfums de Optical Race, mais bien plus de Tyger avec une étrange version remixée de London. Un London que l'on reconnait vaguement avec un rythme incertain, furtif qui tourne en rond sur des percussions d'un style tablas. C'est un maillage de percussions et séquences trépidantes qui picossent l'incertitude d'un rythme qui s'abreuve de superbes passages flûtés. Le rythme s'envole vers la 6ième minute avec des séquences soutenues par des percussions électroniques, plongeant Green Trail Part dans un bon rock électronique avec un synthé aux charmes vocables. Edgar fait un travail remarquable car on peine à reconnaître les lignes de Tyger qui se perdent dans des sessions perdues de Optical Race. Il joue avec les rythmes et ambiances, traçant de superbes passages mélodieux qui accrochent l'oreille. Des passages dramatiques où il triture sa guitare électrique comme dans Underwater Sunlight mais aussi dans une version lente de London Part II (Rotten Row Patriot). C'est assez poignant. Et je réajuste le tir; il y a beaucoup d'âme et de passion derrière Livemiles I et notamment avec Section 2. Section 3 nous plonge dans un furieux rock électronique avec de bonnes séquences. Le rythme est lourd. Arqué sur une structure ascendante, il est plombé de ces nappes de synthé aux contours lumineux qui sont devenues la marque de commerce d'un Tangerine Dream plus métallique. San Buena Ventura clôture ce mini-concert en studio avec une version revampée de Song of the Whale Part 2…à moins que cela soit un restant de Legend? Les paris sont ouverts. Mais ça demeure très bon!
Si l'on devine du bout des oreilles et du fond de notre connaissance le setlist de Livemiles I, l'exercice sera autant ardu sur Livemiles II, le concert au West Berlin Platz der Republik. Là, nous avons le vrai setlist de ce concert mémorable et ça ne ressemble en rien à ce qui va se jouer sur LIVE MILES. L'introduction (Caspian Sea) est de soie et est fidèle aux 8 premières minutes du concert, avec un beau mixage et des bons réenregistrements. C'est un très beau titre inédit. Une belle ballade morphique qui tournoie comme une berceuse onirique dans un synthé brumeux qui chante d'une discrète voix synthétisée. La guitare vient y pleurer de belles lamentations qui ornent un genre de crescendo bourré d'adrénaline dramatique. J'aime bien. Alors que nous sommes sensé entendre Dolphin Smile, nous avons droit à un titre inédit. Et le tout s'enchaîne très bien, comme un vrai concert. Velvet Autumn offre une structure marathonienne. Un genre de course rythmique où séquences et percussions structurent un rythme soutenu qui sert la cause à de fines harmonies flûtées et des riffs de claviers. Je sais pas… J'entends des trucs qui me font penser à Marakesh de Optical Race. On a vite fait le tour. C'est un titre un peu long qui est dans le temps de Underwater Sunlight. Livemiles II se termine avec une version très anémique de Dolphin Dance. Là Edgar a trop Tangentizé le produit. Le rendant insipide!
Bien voilà! Il y a juste les fous qui ne changent pas d'idées. Après avoir entendu attentivement, et fouillé sur le net, je dois admettre que ce LIVE MILES est un bel album mixte, même Voices in the Net le qualifie d'album mixte, où les arrangements en studio de Edgar Froese et les extraits des deux concerts ciblés nous font passer de bons moments. Il y a des longueurs, comme il y a de bons passages. Mais je reste toujours un peu choqué par l'attitude d’Edgar qui a tendance à prendre la dévotion de ses fans comme une façon de remplir ses poches. Mais ça c'est un autre débat! Et au final, j'aime mieux la section Albuquerque qui, faut l'admettre est un très bon remix de London. Est-ce que cette version d'Esoteric est meilleure? Paraît que oui, mais je n'y entends pas trop de différence, si ce n'est que le son est plus puissant. Voilà, c'est un bel album, peu importe sa controverse.
Sylvain Lupari (13/03/07) ***½**
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