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Writer's pictureSylvain Lupari

TANGERINE DREAM: Machu Picchu (2012) (FR)

Même si les mélodies semblent froides et calculées, c'est un bon album qui a ses nombreux clins d'œil aux grandes années de TD

1 Caminos del Inca 10:00

2 Machu Picchu 5:32

3 Adios a Cusco 8:09

4 Tayta Inti 7:26

5 Rio Urubamba 5:57

6 La Piedra Intihuatana 8:14

Eastgate 056 CupDisc

(CD 45:16)

(E-Rock, Berlin School)

Si l'on se fie au guide de presse, MACHU PICCHU est une œuvre très personnelle que Edgar Froese caresse depuis 2002. L'œuvre a connu son paroxysme créatif suite à la mort de John Peel, célèbre disc-jockey de la radio britannique BBC, qui fut l'un des premiers journalistes à croire au potentiel de la musique progressive et électronique dans les années 60, dont Tangerine Dream. C'est au Pérou, près du site sacré Inca de Machu Picchu que John Peel rendait ses derniers souffles, expliquant ainsi un titre et un album qui porte un peu à la confusion. Confusion car rien ne laisse transpirer un quelconque hommage à John Peel. La musique étant très loin des années embryonnaires du Dream et l'ambiance qui entoure MACHU PICCHU n'a rien à voir avec les influences d'un monde Inca. Mais est-ce bon? Hum…je crois bien que oui…et voici pourquoi! MACHU PICCHU, c'est le rêve devenu réalité! C'est la réincarnation de Edgar dans les temples musicaux de Tangerine Dream. Vraiment que je vous entends siffler? Oui! Mais il y a un mais…il y a toujours un mais avec Edgar! Appuyé sur un canevas séquencé, qui tisse des rythmes galopants et oscillants des années Stuntman et Pinnacles, et brodé dans des mélodies sobres et calculées dans la froideur de ses synthés angéliques, MACHU PICCHU est un surprenant voyage à travers les méandres et antipodes labyrinthiques du mythique groupe Allemand. Surprenant, Edgar a tissé un superbe canevas de séquences aux rythmes variables que des synthés aux mélodies éculées, dans une imagination tarie par un trop grand nombre de productions, recouvrent d'une froideur mélodique qui rappelle les années Miramar et TDI.

Comme un doigt qui touche la surface de l'eau pour y dessiner des ondes miroitantes, une note tombe et éveille les lamentations d'un synthé dont les souffles cristallisent de faibles accords épars. On se croirait dans un lac musical de Tangerine Dream où la douceur intemporelle de Legend caresse nos oreilles. Une ligne de basse échappe ses accords qui flottent en suspension, éveillant des souvenirs de Flashpoint, alors que d'ondoyantes vapeurs de synthé en cajolent l'hésitation. Ces accords s'alignent et forment un fluide mouvement séquencé qui ondule sous une mélodie pensive, conduisant Caminos del Inca vers sa première rebuffade du séquenceur. Un bref moment de révolte avant que le doux rythme reprenne ses droits qui seront bafoués ici et là par de brèves intermèdes que Edgar arrose d'une poétique approche éthérée qui se transpose jusqu'à la pièce-titre. De loin le titre le plus faible sur ce dernier CupDisc, Machu Picchu siège sur de sobres percussions claquantes et des accords mélodiques aux timbres des années Eastgate qu'un synthé siffleur enveloppe d'une fade mélodie septentrionale. Même si la durée est relativement courte, son écoute s'avère longue et ennuyeuse. C'est la seule tache à MACHU PICCHU qui reprend du poil de la créativité avec Adios a Cusco, titre dédié à John Peel, et son lit de séquences dont les oscillantes notes cristallines dansent un duo frénétique et bercent un tempo progressif, portant à bout de rythme une mélodie douce et éthérée imprégnée de souffles de soie et ses dérives électroniques. Tayta Inti est plus lourd et plus ténébreux. Ses percussions secouent des séquences nerveuses aux débits interrompus alors que les synthés et ses spectres irisés psalmodient une envoûtante mélodie nocturne. Comme tous les titres sur ce mini-disc, le rythme est brisé par des intermèdes, soit ambiants ou flottants, avant que le rythme ne rejaillisse avec un peu plus d'entrain. Si les synthés semblent manqués d'air (ou de mélodie), les séquences sont toujours bouillonnantes. Un brin intrigant, Rio Urubamba présente une belle approche harmonieuse avec un synthé tellement romantique et nostalgique et qui souffle sa perdition sur un lit de séquences dansant dans un désordre spiralé. C'est vraiment un très beau titre! La Piedra Intihuatana conclut ce dernier Cup-Disc avec un rythme galopant qui se promène avec une démarche éperonnée sur une belle approche mélodieuse tissée à l'ombre d'un synthé toujours aussi mélancolique mais nourri d'un filet d'espoir. La cadence est minimaliste et soutenue avant de frapper un tranquille dérèglement atmosphérique où l'hésitation des arpèges flottants propose un bon moment ambiant, comme il en coule un peu partout sur cette longue romance de 45 minutes.

Toujours selon les légendes que Eastgate tente de forger autour de notre cher Edgar, MACHU PICCHU était censé rester dans les voûtes du vieux renard. C'est sa femme Bianca qui aurait incité notre controversé personnage éclectique à mettre cet album à la portée de ses fans tant elle le trouvait bon. Et je me dois d'admettre que le conseil était sage. MACHU PICCHU est un bel album. Il y a plein de clins d'œil aux grandes années du Dream. Si les mélodies semblent froides et calculées, le jeu des séquences pardonne cette petite lacune avec de superbes lignes aux cent formes et rythmes. En fait, c'est un album qui allie les rythmes et mélodies des années empiriques du Dream à celles plus légères et froides des années Miramar et TDI.

Sylvain Lupari (15/06/12) ***¾**

Disponible chez Groove nl

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