“Il y a tellement de potentiel derrière la majorité des titres sélectionnés que nous ne pouvons qu'être déçus par l'approche trop timide du Dream”
1 Cry Little Sister 5:40
2 Everybody Hurts 5:06
3 Precious 4:21
4 Space Oddity 5:35
5 The Model 5:30
6 Wicked Game 4:29
7 Hotel California 7:39
8 Suzanne 5:24
9 Heroes 4:35
10 Forever Young 5:41
11 Iris 4:09
12 Norwegian Wood 5:33
13 Hallelujah 6:19
14 Wish You Were Here 6:53
(CD/DDL 76:56)
(E-Rock, Synth-Pop)
Est-ce un autre élément pour engraisser toutes les légendes gravitant autour de Tangerine Dream ou tout simplement une explication aisée pour justifier l'intrusion de Froese et Co dans le très facile monde de la synth pop? Toujours est-il que UNDER COVER-CHAPTER ONE serait le résultat d'un pari entre les membres de Tangerine Dream et un des promoteurs du concert à Los Angeles à la fin de 2008. L'idée était de savoir si Tangerine Dream était capable de jouer du rock (On oublie Rockoon?). Mais pas n'importe quel; des reprises des plus grandes chansons pops des dernières années. L'enjeu du pari est une longue ballade L.A./Las Vegas pour chacun des membres du Dream si le groupe échouait et, en cas contraire, le mystérieux prometteur aurait une intéressante proposition sur la table pour le groupe vieux de plus de 40 ans. Bon… mythe ou réalité? Espérons que l'offre valait le coup car cet album est une périlleuse incursion dans un monde musical très mélodieux où la passion, les paroles et vocales ont une incidence directes sur la qualité du succès. Fefans de TD, je vous vois déjà froncer les sourcils. Mais n'ayez crainte, même si Edgar doit posséder l'un des studios le plus complet et sophistiqué (on se souvient que le but des rééditions et trames sonores était de se construire un studio à la fine pointe de la technologie), UNDER COVER-CHAPTER ONE est un album moyen qui a un fort potentiel commercial où, j'ose croire, que le prometteur respectera sa part du pari. Mais il y a quelque chose qui m'agace ….
L'album ouvre avec Cry Little Sister, un solide tube de 1987 tiré de la bande sonore du film The Lost Boys. C'est un bon rock doublé d'une belle ballade et le Dream l'approche comme tel. C'est comme un copie-collé avec de bons riffs mais des percussions un peu fades. Si le jeu des guitares et séquences est bien, la portion rythmique est froide et sans grande profondeur et c'est la grande faiblesse de cet album; si les séquences, claviers et guitares sont rendus avec justesse, les voix et la structure rythmique sont anémiques et très loin d'améliorer (n'est-ce pas l'idée derrière chaque interprétation d'un titre écrit par un autre?) la version originale. J'aime bien la version de Everybody Hurts. Le piano, les synthés violonés et la voix de Chris Hausl rendent une version plus intimiste que l'original. Je ne connais pas Precious de Depeche Mode, mais j'ai comme l'impression que cette interprétation manque de punch car l'ensemble sonne étrangement comme la version de Cry Little Sister et Forever Young. Je salivais à l'idée d'entendre ce que le Dream ferait avec Space Oddity et j'en suis quitte pour une amère déception, malgré les fulgurants solos de guitares. Je ne comprends pas pourquoi la gang à Froese veut donner une approche rock et techno-pop à ce titre si avant-gardiste. Je m'attendais à plus et avec raison, considérant l'énorme potentiel des musiciens ci-présents. Idem pour Hotel California qui, à part les solos de guitares, est une version qui manque d'imagination et d'émotions, tout comme Iris qui est une très belle chanson rendue de façon anémique sur cette collection d'interprétations. Oui la guitare est belle mais l'émotion n'est pas vraiment à point.
Heroes est une autre déception où j'ai l'impression qu'il est reproduit que sur un seul accord. Les violons chimériques ne rendent aucunes émotions et la voix de Hausl n'est pas à la hauteur de celle de Bowie. Dans ces cas je me dis, je sais que je ne suis pas musiciens, on joue sur la structure, les séquences et la profondeur rythmique. En lieu et place on a droit à un Heroes qui passerait très bien dans un ascenseur. The Model est tout à fait génial et entre vraiment dans la catégorie d'interprétation nouveau genre. Ici point de rythme électronique, ni de synth-pop, mais une belle ballade joué au piano où la voix de Hausl est caressée par de beaux arrangements orchestraux et de suaves flûtes. Une très belle, mais surtout étonnante, interprétation. Désolé mais je n'aime pas la version de Wicked Game qui ici prend des allures d'un gros techno pop avec une voix qui semble limitée, et on sait que Hausl possède toute une voix, sur une structure qui copie un peu trop les rythmes vides et aseptisés du Dream des années hors-Dream. Mais il n'y a pas que des déceptions, Suzanne est une très belle interprétation avec un rythme un peu plus prononcé et une voix étonnement juste de Thorsten Quaeschning qui m'a redonné le goût de redécouvrir l'original. Idem pour Hallelujah qui est vraiment crevante d'émotion et de mélancolie. Enregistré en concert, Norwegian Wood est une solide interprétation avec un rythme lourd et minimalisme et un superbe amalgame de guitares, sitar et synthé aux errances stridentes qui enveloppent très bien la voix de Quaeschning. Wish You Were Here? Bah...Je suis outré. Si le piano y est beau et les accords scintillants ajoutent une nouvelle dimension à ce classique de Pink Floyd, je ne vois absolument pas la raison d'y avoir ajouté une touche de synth-pop. Je me dis qu'avant de s'attaquer à un monstre vaut mieux être bien nanti au niveau de l'imagination et le Dream ici en est dépourvu!
Est-ce que le Dream a gagné son pari? Je ne serais le dire. Si UNDER COVER-CHAPTER ONE a une touche de rock, ce n'est pas du rock électronique mais du pop-rock joué avec des équipements électronique. Je ne peux nier la présence de lourds riffs et séquences, sauf que ces éléments sont torpillés par une structure anémique fidèle à ce que Tangerine Dream produit au fil des dernières années. Oui il y a de bons moments, mais il y a tellement de potentiel derrière la très grande majorité des titres sélectionnés qu'on ne peut être que déçu de l'approche très téméraire et symétrique du Dream, qui n'a pas l'audace du potentiel de ses équipements. En fait j'ai comme l'impression que le Dream a approché ce défi assis sur sa réputation et sans effort, avec un détachement artistique édifiant. Et ce qui me chicote? S'il y a un Chapter One ça veut dire qu'il y aura un Chapter Two? Qui oserait un tel pari? Et si jamais c'est Stairway to Heaven qui passe dans le tordeur!
Sylvain Lupari (22/04/11) *****
Disponible chez Groove nl
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