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Writer's pictureSylvain Lupari

TANGRAM: Lustbient (2013) (FR)

Quand la MÉ peut être sensuellement dansable avec des rythmes ambiants aussi efficaces que rêveurs, cela donne un album comme Lustbient

1 Lustbient 3:38   2 After Dark 4:16   3 Sensual Overdrive 5:09   4 Bedroom Diaries 3:41   5 Silk and Blood 4:25   6 Touched by Fire 4:58   7 Venus Miracle 8:30   8 Random Hearts 4:18   9 Mademoiselle Leatherette 5:24   10 The Smokepioneer Lizard 4:12 Tangram Music

(DDL/CD-r 48:34) (Down-tempos, psybient)

Dans son dernier album, Layers, Tangram avait laissé comme visite une carte musicale signée de savoureux down-tempos et de synth-pop aux fins arômes de psybient. LUSTBIENT emprunte la même approche en offrant un éventail musical aussi éclectique mais résolument penché sur des rythmes ambiants. Des rythmes souples et hypnotiques qui supportent des mélodies délicatement dessinés dans des axes complexes où les lignes d'harmonies s'entrecroisent et se charment dans des structures dont le parallélisme flirte avec ses contradictions.

Et la pièce-titre nous plonge tout de go dans ces ambiances rythmiques ambigües. Le tout débute avec une approche métaphysique où une voix angélique marmonne des paroles insaisissables qui se perdent sur un doux rodéo séquencé. Des percussions de genre Tablas résonnent. Ils figent une danse clanique qui tambourine sous des solos de synthé dont les lamentations apocalyptiques sifflent comme des sirènes de guerre. Les rythmes et les mélodies qui remplissent le dernier skeud de Tangram forment d'intéressants duels soniques qui se démarquent des usuels albums de down-tempos. Mais c'est dès After Dark que l'enveloppe musicale se profile avec plus de netteté. L'intro est ornée de brises paradisiaques qui flottent sur les accords vrombissants d'une ligne de basse. Les percussions tombent. Les coups sont secs et pourtant traînent des lustres de poussières. Ils martèlent un doux rythme soutenu qui ondule tel un savoureux down-tempo cosmique sous les lignes d'un synthé rêveur. Des lignes qui flottent comme des feuilles tombant d'un arbre et qui sifflent parmi de fins arpèges dont les tonalités de prismes forgent un savoureux ver d'oreille. Quoique plus affamé, le rythme de Sensual Overdrive ne déborde pas des griffes d'un bon down-tempo aux tendances de psybient modéré avec des ambiances et des harmonies qui nagent en pleine contradiction. La faune sonore est organicosmique et crache des pépiements qui érodent des couches de synthés nettement plus musicales. Bedroom Diaries explique en moins de 4 minutes le phénomène d’ambiguïté musical qu'est Tangram où rien n'est vraiment simple. La base est un genre de synth-pop des années Pet Shop Boys mais avec une enveloppe sonique qui fait papillonner ses accords dans une sphère stationnaire où percussions claniques et bruits d'autres horizons lointains ornent un panorama musical qui s'abreuve à tous les râteliers mais qui cache une superbe approche mélodieuse. Et ces mélodies tisseuses de ver d'oreille et qui nourrissent des rythmes accrocheurs abondent sur ce dernier opus de Peter Fabok. Sur un efficace rythme technoïde dominé par des pulsations sobres et des cymbales tsitt-tsitt, Silk and Blood offre deux structures harmonieuses qui se complètent et s'harmonisent parmi un langage robotique aux gargouillis organiques.

Touched by Fire figure au rayon des belles perles. C'est un lent, mais un lent down-tempo où les martèlements de la batterie modulent une marche funèbre. Encore là, Tangram fait montre d'ingéniosité et orne sa structure avec des éléments soniques qui attirent l'ouïe. Ici se sont des percussions qui résonnent comme les souffles des flûtes de pan indigènes sur un rythme lent où pépient des harmonies distraites. Venus Miracle est le titre le plus long! Il offre une délicate structure de rythme minimaliste où percussions et ions sauteurs synchronisent leurs sautillements dans des fins filets stroboscopiques. Rêveur, le synthé lance des lignes sifflotées qui alternent leurs harmonies avec des arpèges tout autant musicaux. Le même précepte s'applique à Random Hearts qui en revanche offre un rythme plus lourd. Difficile à cerner, Mademoiselle Leatherette roule sur un mélange de funk et groove avec des percussions qui roulent comme dans un jazz évasif. Les harmonies sont tressées autour d'arpèges cristallins qui tintent d'une fascinante agressivité sur un synth vêtu d'un fuzz wha-wha. Le résultat est aussi déroutant que fascinant. The Smokepioneer Lizard clôture LUSTBIENT avec une structure ambiante. Un concerto pour cloches cosmiques qui tintent dans un néant aromatisé de tonalités biscornues.

Il faut prendre Tangram au sérieux. L'homme démontre une belle plume musicale en taillant des titres plus courts sans tomber dans les habituelles inepties des supposés down-tempo ambiants ou d'une supposée MÉ qui cherche à faire bouger plutôt que de rêvasser. LUSTBIENT affiche les mêmes couleurs que Layers, l'un des beaux albums de MÉ aux couleurs d'une IDM autant harmonique qu'intelligente à avoir caressé mes oreilles en 2012. Lorsque la MÉ peut être sensuellement dansante.

Sylvain Lupari (28 Août 2013) ***½**

Disponible au Tangram Bandcamp

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