“Voilà un truc où une fois que nous avons la piqûre, ne décolle tout simplement plus de notre lecteur”
1 Future Light Cone 9:30
2 Cirrus ISM 23:18
3 Caeruleum 15:35
4 Diffusion of Silver Light 24:48
(DDL 73:12)
(Minimalist, ambient beats)
Voilà un truc où une fois que nous avons la piqûre, ne décolle tout simplement plus de notre lecteur. The Polymusicon est le projet de Graeme Nattress; un musicien canadien possédant une vision des rythmes minimalistes qui ont effectivement besoin de temps, d'espace et d'énergie afin de débloquer vers des rythmes ambiants tout simplement dévorant. EVALAKE est un premier album très magnétisant qui écoute après écoute trouve une justification pour le réentendre. Quatre longs titres tout simplement divins qui demandent patience et désir de découverte. Deux qualités qui seront hautement récompensés par une dépendance qui peut vous suivre à n'importe quel moment de la journée.
Future Light Cone ouvre notre appétit pour une MÉ vintage avec vision séraphique sans égale! Une ligne de synthé libère un flux mélodieux qui infiltre ses battements pulsatoires. Ce synthé, et ses chants ésotériques, est imbibé des couleurs musicales de New Age of Earth, alors que des arpèges roulés en boucles s'agrippent aux pulsations sautillantes pour structurer une phase de rythme délicieusement saccadé. Le mouvement est linéaire et totalement magnétisant avec ses délicates impulsions qui redéfinissent la courbe ascensionnelle d'une structure où la vision mélodique est en symbiose avec les fines nuances rythmiques. Et ce synthé qui chante et chante alors que le rythme devient plus nerveux, voire spasmodique …Un très beau titre enchanteur dont les notes de piano à la finale lui donnent une teinte légèrement plus dramatique! Une finale qui dépeindra sur le déroulement de Cirrus ISM qui flirte entre les zones sibyllines et le New Age progressif. Tissé dans les origines des boucles répétitives de Manuel Göttsching dans Ocean of Tenderness, la musique évolue avec les teintes affectives d'une ligne de basse dont chaque nouvelle impulsion ajoute un voile d'intensité implosive. Les nappes de synthé sont gorgées de voix absentes et de leurs fredonnements séraphiques qui donnent une touche New Age méditatif. Les boucles ensorcelantes sont imbibées de tonalités cristallines qui pétillent et chantent avec de belles inclinations dans les tons, ajoutant un autre élément de charme qui efface le sentiment de redondance à cet énorme titre. Magnétisant, Cirrus ISM joue autant avec la progression de son rythme que les couleurs émotives de ses nappes enveloppantes qui nous accompagne autant que Reflections in Suspension, un classique de Steve Roach dans Structures from Silence, peut le faire vers un sommeil illuminé de nappes blanches. Ce titre vient dans une version allongée lorsque l'on achète EVALAKE.
La seconde partie de cet album propose une autre approche, toujours très éthérée, qui est plus axée sur le travail du clavier. Caeruleum est aussi nappé d'une brume avec des filets de voix absentes. Son rythme est très lent, pour ne pas dire amorphe. En fait, c'est plus une mélodie rêvée sur le clavier d'un piano et de ses notes qui tintent avec une tonalité cristalline. La brume ondoyante a une teinte bleutée sans pour autant chasser le reflet sibyllin qui rôde dans ce panorama nocturne où se multiplient les subtils effets d'écho. Ces effets se fondent à des notes du clavier qui font bondir des filaments sonores s'agglutinant dans une masse musicale en mouvement. Plus sombre que la première moitié, Caeruleum accentue sa course qui détache le rêveur de la réalité de The Polymusicon qui privilégie maintenant cette ouverture où le rythme n'en n'est pas un, et où les ambiances ne sont pas pour la méditation. Nous sommes dans l'antre d'une MÉ animée doucement par un galop rythmique et une ligne de séquences qui l'accompagne dans un style plus électronique. Et c'est à ce niveau que nous amène Graeme Nattress avec Diffusion of Silver Light. Ce long titre de 25 minutes tangue entre ses phases de rythmes, très près du Berlin School d'Ashra, et des phases ambiantes chloroformiques en exploitant ces bulles de cristal qui se fragmentent pour de tisser des filaments sonores d'une harmonie spectrale. Les bouts de rythmes sont à mi-chemin entre ces boucles hypnotiques qui roulent en spirales ascendantes et des bouts délicieusement spasmodiques. Le musicien insère des phases éthérées remplies de flûte ou de brumes chantantes dans ces tourbillons horizontaux, créant des harmonies qui me font penser au magnifique Sebastian Im Traum de Frank Specht et à des structures de Rainbow Serpent des années 2005 et 2006.
EVALAKE est ce genre d'album qui nous obsède et que l'on écoute en boucles sans vraiment saisir les origines de cet assujettissement. C'est du minimaliste servi dans une belle présentation vintage avec une progression dans chacune des phases qui nous conduit vers un New Berlin School tout simplement majestueux en Diffusion of Silver Light qui est le pinacle de cet album. Un excellent album et une très belle découverte qui j'espère aura une suite. Même si la barre sera très haute après un premier album comme EVALAKE.
Sylvain Lupari (17/01/20) ****½*
Disponible à The Polymusicon Bandcamp
Comments