“Tons sur tons et dans des structures de rythmes atypiques, Delay Line fait briller son sens dans un autre album acceptable de MÉ abstraite par Thomas Meier”
1 New Sparkle 10:48 2 End of Voltaire 15:07 3 Debussy on Keys 18:18 4 Refinery 8:48 5 Artificial Sequence 12:38 6 Introspective 10:5 Syngate | CD-R TM13
(CD-r/DDL 76:36) (Abstract, ambient & New Berlin School)
Structuré? Pas vraiment! DELAY LINE nous amène dans les territoires de surprises sonores avec un Thomas Meier fort de ses nouveaux instruments. Offert en format CD-r, une version Hi-Res 24-96 est aussi offerte sur DVD, ou en format téléchargeable en 16 ou 24 Bits, ce dernier ouvrage de TM Solver offre près de 80 minutes d'expérimentations tonales sur 6 structures de rythmes ambiants qui naissent, vont, s'éteignent et renaissent dans une forme collatérale quelques instants plus loin.
D'un tintamarre d'effets électroniques naît une furtive ligne de basses séquences qui entreprend la chaotique ascension de New Sparkle. Comme des pas espiègles montant un escalier avec quelques arrêts minutés, le rythme ambiant étend ses couleurs mixtes dans une masse sonore en mouvement. Bancs de brumes nébuleuses, bruits électroniques aussi recherchés que dans l'univers de Robert Schroëder, et étranges murmures accompagnent cette marche aérienne qui augmente la cadence avec l'arrivée des percussions. Des filaments acuités se détachent des bancs de brume et forment la partie harmonique de New Sparkle avec des nappes flottantes qui chantent comme ces sirènes électroniques nageant dans les brumes intersidérales. Flirtant avec un univers abstrait, la musique de DELAY LINE se concentre sur les échantillonnages et des textures organiques qui suivent les courbes de rythmes atypiques. Avec un peu d'imagination, il n'est pas exagéré de comparer le rythme d'End of Voltaire à un cha-cha-cha qui se danserait quelques 1000 ans plus tard. Son rythme a aussi besoin de percussions afin de bien faire bouger nos pieds qui tapotent le plancher. Saccadée, autant dans le débit des arpèges que des séquences, la structure propose de très beaux flashbacks sonores des années 71-73 de la Düsseldorf School. L'aspect contemporain n'est pas laissé de côté avec un décor sonore qui reste aussi riche que créatif et qui fait sourciller nos oreilles de bonheur à une couple d'occasions. En fait, un des bonheurs auditifs de ce DELAY LINE réside dans sa concentration d'effets sonores qui rappellent les années d'exploration et découvertes sonores avec la venue des banques d'échantillonnages et de leurs immenses réservoirs de tons.
Ces réservoirs se remplissent constamment, poussant toujours les limites de la musique vers d'autres galaxies. Debussy on Keys en profite largement avec son rythme rétro qui modifie à peine son parcours dans son enveloppe de 18 minutes. Le rythme est ambiant et se compare à l'effet d'un aspirateur géant qui ramasse des poussières tonales dans de perpétuelles spirales symétriques. Cette structure minimaliste est propice à un duel d'arpèges scintillants de diverses tonalités ainsi qu'un autre duel entre synthés qui libèrent des solos aux multiples couleurs tonales. Il y a un côté très mélancolique dans cette spirale rythmique perpétuelle qui dégage des parfums de Baffo Banfi. J'aime bien le rythme soutenu de Refinery qui me fait penser à l'éclosion rythmique dans The Dark Side of the Moog 9, Set the Controls for the Heart of the Mother, du tandem Schulze-Namlook. Les solos donnent un relief plus abstrait à une belle structure délicieusement convulsive. Des nappes de voix éthérées et des accords de guitare acoustique accueillent le rythme clopinant et caquetant comme un canard bipolaire de Artificial Sequence. Maintenant son cap linéaire, le rythme sautille dans une panoplie d'effets sonores avant de faire cavalier seul autour des 4 minutes. La structure referme sa boucle quelques 2 minutes plus tard. Les influences de Robert Schroëder sont palpables ici. Le séquenceur est épuisé? C'est l'impression que nous avons avec Introspective et sa structure de rythme qui semble traîner l'univers sonore sur sa route. Ce rythme lent nous fait revivre les bons moments sonores de DELAY LINE, surtout ceux dans End of Voltaire, et repose un peu notre imagination avec une brume anesthésiante où pétillent toujours ces arpèges cristallins qui font partie des plusieurs charmes d'un album de MÉ flirtant avec l'abstrait et la naissance du New Berlin School des années 85-90. Un album à la hauteur de nos attentes vis-à-vis la signature et l'esthétisme sonore de TM Solver.
Sylvain Lupari (29/01/19) ***¾** SynthSequences.com
Disponible au SynGate Bandcamp
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