“Construit sur un lit de percussions atypiques, Kola est difficile à apprivoiser et est aussi fluide qu'une eau oxygénée par des millions de bulles sonores”
1 Pinata 6:13
2 Polyglot 5:24
3 Omara 4:31
4 Maniok 7:32
5 Habitat 7:36
6 Petroleum 5:41
7 Diaspora 10:07
(DDL 47:08)
(Experimental tribal EM)
Le rythme est sec et nerveux. Nourri d'un alliage de percussions aux tonalités variées et de souffles saccadés un brin flûtés, Pinata éclate entre nos oreilles comme du maïs surchauffé dans un micro-onde. Ces percussions ont la fièvre d'une fascinante dance tribale avec une suite de mouvements secs qui dansent comme des gourous en transe avec une ligne de basse aux ronflements organiques. Bienvenu dans l'étonnant monde de percussions aux tonalités éclectiques de KOLA. Vous vous souvenez des rythmes échevelés du dernier album de Centrozoon, Boner? Eh bien, Tobias Reber en faisait parti. Sauf pour les structures de rythmes arquées sur un éventail de percussions aux tonalités aussi disparates qu'éclatantes, KOLA n'a rien en commun avec Boner….Humm mis à part Pinata. Même si Tobias Reber y amène son arsenal de programmations électroniques qui faisaient les étrangéités de Boner, ce nouvel album respire d'une étrange quiétude en eaux troubles. Ici, tout est sujet à interprétation. Car ce dernier album solo de Tobias Reber est bercé par des rythmes aux figures aussi abstraites que les mélodies peuvent être évasives. Des rythmes indomptables qui pétillent et éclatent dans une étonnante et une sauvage faune de percussions dont les diverses tonalités hétéroclites se chamaillent sur un fond musical qui semble avoir été soutiré des labyrinthes d'une jungle inexplorée. Si Pinata offre une structure de rythme très débridé, le reste de l'album repose sur des rythmes plutôt ambiants avec des percussions qui pétillent en tous sens, comme des bouteilles qui s'entrechoquent dans un tout petit bassin d'eau saisi de courants halieutiques contraires. C'est la valse des claquements sur un fond sonique où l'improvisation des harmonies sied bien leurs incertitudes. Comme dans Polyglot et Diaspora où les multiples et voraces frappes de xylophone gigotent comme un iguane sur des tessons ardents. On croirait entendre l'ossature rythmique, incluant basse, d'un King Crimson qui cherche son linge. C'est assez spécial. On a l'impression qu’il y a une forme de vie qui gargouille tout aux longs des rythmes évasifs et organiques qui sursautent comme des balles aux contours triangulaires. La portion de guitare, notamment sur Omara et sur le lourd mais fuyant Petroleum, enracine la perception d'entendre un King Crimson à l'état très expérimental. De l'anti-musique? Nous ne sommes pas vraiment loin. Riches en percussions truffées de tonalités éclectiques et de lignes de basses aux pulsations organiques, KOLA grouille d'une faune rythmique atypique. Prenons Maniok et Habitat où les rythmes restent d'ambiance avec des percussions qui battent une mesure irréelle sous les multiples cris de chauve-souris anémiques. Bref, ce dernier album de Tobias Reber est une expérience sonique pour des oreilles friandes d'une aventure extra musicale où les limites restent toujours à définir. C'est du rythme sans peau, ou presque. Des squelettes de rythmes où les os de verres chantent plus que les harmonies enchantent. Un album difficile à apprivoiser mais non dénué d'intérêt qui plaira assurément aux fans de musique où les chaos d'Art Zoyd et/ou Univers Zero sont aussi fluides qu'une eau oxygénée de millions de bulles soniques.
Sylvain Lupari (20/01/14) ***½**
Disponible au Tobias Reber Bandcamp
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