“Nul doute ici, c'est le plus beau des 6 tomes”
1 Prisms (James Bernard) 8:11
2 Vänta (Elin Piel) 6:59
3 Eddy Currents (Field Lines Cartographer) 8:54
4 Contradictory Forecasts (Sarah Belle Reid) 8:23
5 Waving in Harmony (Adrian Beasley) 7:15
6 Upward (Elinch) 7:28
7 Random Possibilities (Steve Roach) 6:29
8 In the Shadow of Giants (Ombient) 6:32
9 The Mutation Trio (Doug Lynner) 9:01
(CD/DDL 69:28)
(Experimental, Ambient, Upbeat)
La série Tone Science Module du label DiN connait un franc succès auprès des amateurs de musique électronique (MÉ) qui s'intéressent aux expérimentations sonores des synthés modulaires. Et chaque nouveau tome attire un public de plus en plus curieux par une démocratisation de cette curieuse musique qui a tous les atouts d'une musique plus expérimentale que mélodieuse ou rythmée. Et si Integers and Quotients était plus séduisant que Form and Function, on peut dire la même chose de PROTONS AND NEUTRONS qui est encore plus séduisant que le 5ième volume d'une collection qui impressionne toujours un peu plus. Préparez bien vos oreilles, puisque cette 6ième édition toujours aussi bien agencé et édité par Ian Boddy inclut de petits bijoux qui vont vous donner un coup de foudre musical.
L'illustre musicien américain James Bernard a l'honneur d'ouvrir cette 6ième rencontre d'un 3ième type sonore de DiN. Une onde de synthé monte jusqu'à l'horizon de nos oreilles avec de fines boucles répétitives qui se sont détachées. Elles forment une structure de rythme ambiante où se perche une autre ligne de synthé ayant une tonalité plus près d'un mélange entre un orgue et un accordéon. Une ligne de basse pulsations caoutchouteuses se greffe à cette éclosion sonore, amplifiant ce rythme ambiant résonnant mais aussi très musical, sinon mélodieux. Si la musique de Prisms n'a pas les couleurs de son titre, il en a les éclats qui forment des boucles harmonieuses dans un beau panorama sonore dont le mélodieux rythme méditatif rappelle les plus belles berceuses lunaires de Steve Roach, aussi présent sur PROTONS AND NEUTRONS. Avec des crépitements statiques sur une onde de synthé qui refuse de s'élever, Elin Piel nous réserve aussi une belle surprise avec Vänta. Dans une cadence à peine plus animée, la musique épouse celle d'une berceuse qui tourne comme une ballerine dans sa petite boîte à musique. L'ombre d'une basse résonne dans ce décor bucolique, donnant une chaleur tonale qui rehausse la vision mélodieuse du mouvement minimaliste du séquenceur. Dans une enveloppe sonore emmurée dans les réfractions d'une nappe de basse envahissante, Field Lines Cartographer nous introduit à la partie plus expérimentale de cette compilation avec Contradictory Forecasts. Sur un plancher de grésillements et de bruits insolites, des billes sonores s'entrechoquent dans une texture organique remplie d'une flore tonale aux fragrances orientales. Les lignes de synthés sont filiformes avec des tonalités écarlate alors que d'autres gémissent dans une structure sans rythmes mais avec de séduisants éléments percussifs. J'avais hâte d'entendre la participation de Sarah Belle Reid de qui on dit beaucoup de bien dans sa maîtrise de son système Buchla. Bien que je doive admettre qu'il y a un travail minutieux dans son titre Contradictory Forecasts, la musique et ses effets de bruits organiques, de même que ces petits pas courant un peu partout mais pas tout le temps, revêt une texture aussi abstraite qu'originale. Membre du trio Airsculpture, Adrian Beasley propose un titre purement atmosphérique avec Waving in Harmony. Dlune onde de synthé aux modulations réverbérantes, les ambiances gravissent les échelons de nos émotions avec des intonations graves et bourdonnantes. Elles accentuent leurs emprises qui vrombissent de plus en plus en effectuant des torsades anémiques pour atteindre une zone de turbulence sonore avec les lentes élucubrations d'un bourdon géant sur le bord de mordre nos tympans. Ici aussi, ce n'est pas pour toutes les oreilles.
On revient dans une zone plus accessible avec Upward de Elinch et dont on peut observer son cheminement créatif sur une vidéo de YouTube. Le musicien Allemand ouvre la partie la plus rythmique de PROTONS AND NEUTRONS avec un séquenceur qui délie un mouvement rythmique gravitationnel avec des ions sauteurs. Leurs bonds saccadés et synchronisés dans un parfait équilibre entre chaque fini par développer une bonne structure spasmodique. Une ligne de basse pulsation s'invite, ajoutant une texture chaleureuse à cette structure qui se remplit de longues lignes de riffs de guitare qui sont agressifs de leurs bourdonnements corrosifs. Très bon et devant Steve Roach, ça devient un des moments forts de ce 6ième tome de Tone Science Module. Random Possibilities est un titre axé sur des lignes de rythmes séquencés qui se rencontrent dans un carrefour de rythmes flirtant avec les premières esquisses rythmiques du musicien Américain. La musique expose ses lignes de rythmes légèrement décalés ou juste un peu en retard l'un par rapport à l'autre, créant une masse de rythmes qui est bien encadrée par de bonnes vibrations de basses pulsations. Un titre qui peut aussi bien nous faire aussi revivre l'épisode de Skeleton Keys avec une enveloppe sonore plus chaleureuse. In the Shadow of Giants, de Ombient, continue cette exploration rythmique avec une ligne de rythme spasmodique sautant sur une flore organique. La musique du synthésiste américain Mike Hunter est très créative et entraînante avec un maillage de percussions caoutchouteuses et une ligne de séquences limpides qui se dandine dans une structure de rythme inondée d'effets sonores qui sont familiers aux adeptes du genre. Elin Piel, Elinch et Ombient sont de très belles découvertes qui méritent d'investiguer un peu plus les univers musicaux de ces artistes. On revient dans l'art abstrait du modulaire avec The Mutation Trio du musicien de San Francisco Doug Lynner. Le jeu des billes de son ouverture me rappelle le brillant Theme of Secrets d'Eddie Jobson. Là s'arrête la comparaison puisque la musique emprunte une avenue aussi expérimentale, voire abstraite, que celle de Sarah Belle Reid avec de grotesques réverbérations sur des ondes de synthé aux formes et couleurs d'une aurore boréal dans ses phases plus atmosphériques.
De belles découvertes, une MÉ créative et une production sans failles signée Ian Boddy, Tone Science Module No.6 PROTONS AND NEUTRONS arrive à séduire encore plus facilement que les tomes précédents. Ce qui est peu dire! On y trouve une belle diversité atmosphérique et rythmique dans des décors organiques et des textures de basse qui procurent une fascinante chaleur pour une MÉ de ce genre. Les quelques titres plus expérimentaux finissent toujours par séduire, témoignant ainsi que l'audace trouve toujours sa place lorsque bien fait. Nul doute, c'est le plus beau des 6 tomes.
Sylvain Lupari (05/03/22) ****¾*
Disponible chez DiN Records
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