“Albedo 0.39 est un superbe album qui, 40 ans plus tard, a sa place dans toutes collections de disques”
1 Pulstar 5:45 2 Freefall 2:20 3 Mare Tranquillitatis 1:45 4 Main Sequence 8:15 5 Sword of Orion 2:05 6 Alpha 5:45 7 Nucleogenesis (Part One) 6:15 8 Nucleogenesis (Part Two) 5:50 9 Albedo 0.39 4:30 RCA Victor-RS 1080 (1976) Esoteric Recordings-ECLEC 2422 (CD 42:30) (V.F.) (E-Prog Rock, E-Jazz, Orchestral Electronic)
Après 2 albums figés entre l'électronique et l'acoustique, Vangelis retourne dans les territoires plus électronique avec ALBEDO 0.39. Et autant le dire tout de suite, quitte à me faire lancer des tomates, je ne suis pas ici dans ce que je peux décrire comme étant ma période préférée de Vangelis. En fait je me souviens d'être resté de marbre lorsque mon copain Bernard a tenté de me faire découvrir cet album quelques semaines (un avant-gardiste ce Bernard) après la sortie de cet album qui doit son étrange titre à l'indice de la réflexion de la Terre; Albedo 0.39. Album phare de par l'exploration des textures soniques des synthétiseurs, ce ALBEDO 0.39, qui cachait dans son enveloppe très avant-gardiste les 2 premiers véritables succès de Vangelis, a connu pas loin de 50 versions. Celle que je vous propose ici est la version remasterisée par Vangelis lui-même et qui est sorti sur Esoteric Recordings en 2013.
Pulstar? Comment ne pas accrocher instantanément? Nous sommes en 1976 et Vangelis amène l'univers des synthétiseurs à un autre niveau ici avec une pièce de MÉ qui est construite sur un modèle de pulsations séquencées qui défilent en vif staccato dans des éclatements d'arrangements orchestraux. Rythme ou non-rythme, la fureur du mouvement transperce nos oreilles avec une étonnante gradation dans le mouvement qui se peuple de superbes harmonies d'un synthé qui unit ses solos au vives saccades spasmodiques des séquences. La finale, avec sa voix monotone qui semble égrener le temps, l'horloge parlante, marquera à jamais notre imagination que tentait à l'époque de comprendre ce style de musique d'extra-terrestres. Freefall est une petite ballade mécanique montée sur un gamelan. Les multiples séquences de carillons et de percussions métalliques tintent dans les charmes d'un synthé ombragé d'une mélodie d'un genre orientale. Et les parfums de cette mélodie s'échappent vers Mare Tranquillitatis qui est un court titre ambiant nourri d'échantillonnages de voix et de sons de la NASA et des vols Apollo. Main Sequence est un titre pas mal plus fougueux et dont le mouvement saccadé des séquences peut faire penser à Pulstar. Sauf que les percussions, qui font très Free Jazz, et le synthé, qui sonne bien comme Keith Emerson, transporte la fureur du titre dans des territoires aussi tempétueux que certains moments de Heaven and Hell, notamment avec ces trompettes en folie qui font vraiment Free Jazz. Les percussions, qui sont de vraies en passant, sont jouées d'une façon ahurissante par Vangelis. Main Sequence apaise tant bien que mal sa fureur dans une finale aussi sereine que dans So Long Ago, So Clear.
Après la superbe ballade qu'est Sword of Orion, oh que Vangelis est de soie ici (est-ce que j'entends des parfums du future Blade Runner?), Alpha dépose le premier sceau d'hymne électronique de Vangelis. Une série de notes très limpides tintent dans une structure ambiante. Ces notes tombent goutte-à-goutte et tissent une mélodie évasive qui prend de plus forme avec des effets de synthé qui l'enveloppent d'un aura de surréalisme. Les tambours tombent et résonnent, sculptant ainsi un effet de drame qui conduira à un splendide crescendo lorsque le rythme épouse un genre de galop. C'est comme une cavalerie qui arrive et fait monter notre ligne d'émotions vers des endroits inattendus. Le synthé décrit ses arcs de tristesse alors qu'une autre ligne de trompette ajoute encore plus de poignant. Incroyable et intense! Sa finale électro-symphonique-pop est le point culminant de cet album au niveau de la chair de poule. Comme je le disais, grandiose! Et ce même après 40 ans. Le remaster de Vangelis donne plus de profondeur aux arrangements ici. Des nappes d'orgue, qui font très Yes et Rick Wakeman, nous sortent de notre rêverie engendrée par Alpha. L'introduction de Nucleogenesis (Part One) est forgée dans une ambiance du Fantôme de l'Opéra avec ces nappes gargantuesques qui conduisent la première partie de Nucleogenesis vers un lourd et furieux rock électronique avec une ligne de basses séquences aussi saccadée que celle de Pulstar même avec une nuance au niveau de l'approche harmonique. Dans les faits les 12 minutes de Nucleogenesis se fondent dans un espèce de rock progressive électronique très avant-gardiste avec des morceaux de mélodies sous forme de solos torsadés qui sont éparpillées dans les nombreuses directions d'un titre nourri d'explosions symphoniques et soutenu par un étonnant jeu de percussions. Il y a du Heaven and Hell là-dedans comme il y a un gros clin d'œil à la musique de Yes. La pièce-tire conclut ce superbe album de Vangelis, que j'ai appris à aimer sur le tard je dois ajouter, avec une approche très ambiosphérique. Les lignes de synthé, comme des nappes plus étendues et des solos très discrets, figent le temps avec une belle fusion d'ambiances où l'ingénieur de son d'ALBEDO 0.39, Keith Spencer-Allen, raconte les diverses propriétés physiques de la Terre, comme sa masse, la longueur de l'année dans diverses mesures et finalement son albédo.
Y a-t'il une différence entre cette version remasterisée par Vangelis et la version originale d'ALBEDO 0.39? Honnêtement! Mon ouïe est rendue trop usée pour vouloir jouer dans ces paramètres. Sauf que j'ai remarqué une nette différence au niveau des arrangements qui me semblent plus accentués, mieux définis, ici. Mais...allez savoir! Mais à la fin vous devez savoir que ce ALBEDO 0.39 est un album très important dans l'histoire de la MÉ contemporaine à cause de la signature très stylisé dans la recherche des sons de Vangelis. C'est un album très éclectique où l'électronique, le symphonique et le rock progressif, même le Jazz, se donnent rendez-vous dans une symphonie de sons qui ne banalise pas, mais pas du tout, ce côté ballade et sentimental du maître Grec. Un incontournable!
Sylvain Lupari (08/04/16) *****
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