“La beauté de cet album est sa capacité à créer en studio les ambiances de TD en concert”
1 Kronos21 Part 1 (26:30)
2 Kronos21 Part 2 (29:23)
(CD/DDL 55:53) (V.F.)
(TD's Schmoelling years)
Danger in Dream avait fait tout un tabac avec l'album Entrance en 2001. La particularité de cet album était le rôle du séquenceur et ses évolutions rythmiques à travers une fresque musicale fortement inspirée par Tangerine Dream des années Schmoelling. Eh bien, voici Wave Walkers et son KRONOS 21, un excellent album qui sonne effectivement comme ce même Tangerine Dream sans nécessairement le copier. Comme DiD en fait! Wave Walkers est un projet de deux musiciens Belge Jurgen Vitrier et Germain Ghys. KRONOS 21 est un premier album qui est disponible en CD manufacturé de même qu'en format téléchargeable. C'est près de 56 minutes d'une musique que l'on mange des oreilles avec un constant ébahissement.
Une vague de sons, comme dans l'ouverture de l'album éponyme Danger in Dream, déferle vers nos oreilles pour laisser entendre des arpèges pensifs dans une vision industrielle futuriste. Plus brèves, d'autres vagues tournoient comme l'œil d'un phare dans une ouverture où l'état pensif côtoie celui d'alerte. Cette indécision dépasse les 4 minutes lorsque ces arpèges aux tonalités caramélisées font résonner leurs timbres sur le battement métronomique d'un de ces arpèges séquencés. Ce stoïque mouvement minimaliste est supporté par une ambiance intense d'où s'échappe une ligne chancelante autour de la 6ième minute. On peine à suivre le parcourt de cette ligne qui roule avec une bonne vélocité, montant et descendant comme un centipède ivre. Elle roule à vive allure jusqu'à ce qu'un tonnerre d'éléments percussifs frappe de plein fouet une écoute absorbée par le jeu du séquenceur. Intense, cacophonique mais dans les limites de l'acceptable, Kronos21 Part 1 propose un cadre de rythme dysfonctionnel où tinte toujours cet accord laissé libre depuis son ouverture. La première véritable métamorphose a lieu autour de la 9ième minute lorsque le rythme dévie vers une autre source du séquenceur et que le synthé libère une brume orchestrale, amenant la musique dans les parfums du Dream lors de la tournée 80-81. Le rythme est pesant et roule dans un style de Berlin School camouflé par une intensité musicale qui atteint ces moments de folie de Tangerine Dream en concert. Il est construit avec deux structures du séquenceur qui s'entrecroisent, une ligne de basse-séquences et ces énormes percussions taillées dans l'inconnu. Les riffs de clavier et les pads de synthé ajoutent une dimension harmonieuse, alors que le synthé se détache de cette emprise afin de livrer de bons solos aux tonalités hybrides. Maintenant toujours cette intensité musicale, Kronos21 Part 1 se sert de sa 14ième minute pour faire une métamorphose qui est plus tangible cette fois en offrant un rythme constitué de bonds et de leurs sauts élastiques sur une fébrilité du séquenceur. Encore une fois, ça ressemble à du Dream sans en être. Et contrairement à Danger in Dream, Jurgen Vitrier et Germain Ghys multiplient les solos de synthé dans une ambiance corrosive. Et que dire du séquenceur?! Sur une structure très entrainante pour les pieds et stimulante pour les neurones, WW parvient à en soutirer des phases de rythme adjacents tout comme faire dribbler ses ions sauteurs alors que Kronos21 Part 1 tire vers sa finale, toujours nappée de très bons solos de synthé, qui se change en un gros rock électronique agressif. 26 minutes de pur plaisir!
Moins turbulent, Kronos21 Part 2 n'en reste pas moins très attrayant, comme très entraînant. Disons que cette partie de KRONOS 21 est plus homogène. Son intro est de lourde brume où tinte un accord dans des jets d'éléments percussifs que le Dream exposait lors de ses spectacles dans les années Schmoelling. Tout musical avec un synthé mélodieux, ce long titre qui flirte avec les 30 minutes débute avec classe et mélodie dans des éléments qui se collent plus au mythique trio Allemand ici que sur le premier titre. Notamment la tonalité du synthé qui tisse de magnifiques solos mélodieux, de même qu'une belle brume orchestrale. La première structure de rythme est onirique, mais lourde et lente avec sa suite d'un ion sautant tout en nous enjôlant dans un pattern hypnotique. Cette suite continue sa route en dribblant et en accélérant la cadence pour reprendre son rôle initial jusqu'à la 8ième minute. Un mellotron flûté exorcise les ambiances quelques 20 secondes plus loin. Les accords résonnants étendent une aura chtonienne qu'un ruisselet de séquences en suspension accompagne dans une chorégraphie ondulante. Léger combat entre synthé et mellotron, avant qu'un bon rock électronique n'attire Kronos21 Part 2 pour une seconde virée folle cernée d'effets vocaux et de psybient. Un rock soutenu sur une période de plus de 20 minutes avec une phase en suspension où la batterie électronique fait une bonne besogne ici alors que le synthé fait chanter de bons solos tout en déposant de belles nappes chloroformiques. Le rythme ralentit la cadence vers la 16ième minute avec ses éléments en suspension. Cette phase plus stationnaire fait entendre d'autres magnifiques solos de synthé avant de se remettre dans un rock électronique vivant toujours avec ces étranges effets de voix, ces solos, ces éléments percussifs claquant comme deux cymbales géantes, cette brume mythique et finalement un superbe solo de guitare performé par Jens Ambrosch.
Ouf! La beauté de cet album est sa capacité à reproduire en studio les mêmes ambiances musicales que Tangerine Dream dégageaient lors de ses concerts. La dynamique, la fluidité dans les changements de phases, le jeu du séquenceur, les excellents solos de synthé et bien d'autres éléments arrivent dans une capacité de séduire qui amène la musique à un autre niveau. Bref, un splendide album de Wave Walkers en espérant ne pas avoir à attendre 20 ans avant que le prochain n'arrive. Rappelez-vous Danger in Dream!
Sylvain Lupari (05/11/21) ****½*
Disponible chez Wave Walkers Bandcamp
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