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Writer's pictureSylvain Lupari

ZANOV: Chaos Islands (2020) (FR)

Zanov nous amène à ce point de convergence où le chaos trouve son équilibre dans cette beauté indéfinissable qu'est la nature de la musique ... sous toutes ses formes

1 Edge of Chaos Island 7:16

2 Inception Island 6:18

3 Strange Attractor Island 6:52

4 Three Body Island 6:46

5 Phase Space Island 8:10

6 Instability Island 6:57

7 Emergence Island 6:17

(CD/DDL 49:04)

(Electronic Music)

Un des gros défis des musiciens visionnaires est de dompter des oreilles habituées à un autre son, à une autre conception de structures musicales. Ça été le cas de Synergy, de Vangelis et plus près de la Berlin School, Keller & Schonwalder. Et si on parle d'artistes contemporains dans le domaine de MÉ sans frontières ni territoires, on doit ajouter le nom de Zanov juste à côté de Kurtz Mindfields. On constate que le musicien Français est en très bonne compagnie. Et pour cause, CHAOS ISLANDS est un album d'une richesse sonore indescriptible avec 7 chapitres, d'une durée moyenne de 7 minutes, où la musique change de formes en prenant soin d'attacher les phases mobiles de façon à ce que le chaos, lorsqu'il y a, devienne harmonie. Inspiré par le drame mathématique de la Théorie du Chaos, ce dernier album de Pierre Zalkazanov nous introduit dans son univers en nous proposant les délices de son dernier bijou; le synthétiseur MatrixBrute d'Arturia.

C'est en mélangeant une structure philharmonique à des vagues de sons futuristes que l'introduction en mode valse morphique de Edge of Chaos Island entraîne l'auditeur dans sa première fausse perception. Dès qu'un ion sauteur se pointe après 60 secondes, ce premier titre de CHAOS ISLANDS traverse les corridors du tumulte et de la quiétude pour trébucher dans un excellent rock électronique du futur. Des effets de saccades secouent les phases proposées, un peu comme dans l'ouverture de World's Away de Strange Advance, alors que séquences organiques et percussions s'agrippent aux strates de violons qui ont déjà remodelées le rythme en une ballade lunaire où le chaos se libère de toute contrainte dans une finale qu'on a pas entendue passer. De ses 7 minutes et des poussières, Edge of Chaos Island est d'une instabilité à faire travailler notre ouïe farouchement. Si c'est un titre qui commande plus qu'une première écoute, Inception Island en demande un peu plus! L'impression d'être sur un tapis roulant qui glisse dans un tunnel en verre donnant un accès visuel à une faune sonore multipistes est la meilleure façon que j'ai pour décrire cette fascinante marche lunaire où les âmes de ceux qui nous ont quittés sont tissées dans des voiles et des murailles musicales. Ces figures asymétriques sont restituées avec retenue et défilent avec ces secousses panoramiques ressenties dans Edge of Chaos Island. L'ouverture de Strange Attractor Island a capturé mon intérêt dès ses premières notes. J'aime cette structure sphéroïdale qui maintient le rythme dans son statut minimaliste et entraînant, alors que les synthés organisent les différentes visions d'une mélodie tricéphale qui nous ramène aux premiers pas de la musique cosmique française. C'est très beau, même si quelquefois l'indiscipline rythmique de Zanov en perturbe le charme. Mais ça il faut vivre avec!

L'exemple est la belle ouverture tout en nostalgie de Three Body Island. Les notes sont graves et résonnent en symbiose avec une triste voix d'opéra masquée par les effets réverbérants des accords et d'un rideau circulaire où scintillent des prismes. Un délicieux rythme ondulant étend une fausse impression d'un accordéoniste qui se perd dans des corridors où les sons se reflètent sur des miroirs afin de former une entité mélodieuse. C'est comme une course à contresens dans un labyrinthe où le commencement se perd dans des chants creux inexplicables. C'est dans un effet de course de halètements et de tremblements chétifs que se déroule les premiers moments de Phase Space Island. Structuré sur deux phases qui ne se comprennent pas, le rythme et ses ambiances épousent le recto-verso de son antagoniste dans une structure de rythme trop rapide pour ces mêmes éléments d'ambiance. Le style chevrotant/grelottant des couches d'ambiances font un épais manteau de saccades stroboscopiques sur rythme dont l'étrange forme sphéroïdale le dissout dans une structure qui s’émiette après le passage d'une note. J'imagine fort bien ce down-tempo sans frontières faire partie d'une musique de danse dans les prochaines trilogies de Star Wars. Et après plusieurs essais-erreurs, le plus long titre de CHAOS ISLANDS fond en même temps que mon problème d'inattention refait surface! Instability Island me ramène dans ce qui a de plus beau dans ce dernier album de Zanov, soit deux entités contraires qui forgent une agréable mélodie dans le tumulte des synthés du musicien Français. Ces éléments qui hachurent les horizons maintiennent le niveau d'écoute sur le qui-vive, alors que sous ces instabilités rythmiques des matières atmosphériques se crée une belle mélodie qui s'attache à des arpèges défilant en courtes phases pyrographiques. Seriez-vous surpris si je mentionne que le finale renifle la possibilité d'un transfert pour un rock électronique? C'est dans un genre de Rumba, aux dimensions sonores saccadées, que Emergence Island termine un album enchanteur au niveau sons et intrigant au niveau rythme versus ambiances et mélodies.

C'est dans une production sans taches que CHAOS ISLANDS dévoile son univers aussi particulier que les recherches musicales et les visions artistiques de son auteur-compositeur et interprète-synthésiste. Dans une musique qui réussit à tisser ses liens entre la complexité et la simplicité, Zanov nous amène à ce point de convergence où le chaos trouve l'équilibre dans cette beauté indéfinissable qu'est la nature de la musique…sous toutes ses formes.

Sylvain Lupari (20/05/20) ****¼*

Disponible chez Zanov Music

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